Immobilier : quand Christian Noyer met les banques en garde...

Par Mathias Thépot  |   |  450  mots
En mai, les taux de crédits immobiliers ont baissé à 2,85% en moyenne
Le gouverneur de la Banque de France trouve que les banques dégagent de trop faibles marges lorsqu'elles accordent des crédits immobilier. Ce qui ferait peser un risque à terme sur leur bilan.

C'est assez rare pour être souligné. Le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer aurait mis en garde les banquiers français sur un sujet sensible. Il se serait inquiété auprès d'eux du faible niveau des taux d'intérêt des prêts immobiliers pratiqués dans l'Hexagone, rapportait le Monde il y a quelques semaines. "Vous avez les taux les plus bas d'Europe, vous êtes les banques qui prêtez le moins cher sur toute la zone euro; ce n'est pas une situation acceptable !", aurait ainsi prévenu le gouverneur.

Trop faibles marges

Pourquoi celui à qui l'on a souvent reproché de confondre sa mission de garant de la stabilité financière en France avec celle de garant des intérêts privés des banques françaises changerait-il ainsi de posture ?

Peut-être parce que sur ce sujet, la bonne santé des bilans des banques françaises est, d'évidence, en jeu. Elles dégagent de trop faibles marges par crédit immobilier car elles se livrent une concurrence de tous les instants sur ce type de prêt considéré comme le "produit d'appel" par excellence pour fidéliser les clients. Les taux de crédits immobiliers atteignent depuis quinze mois des niveaux bruts historiquement bas. En mai, ils ont baissé à 2,85% en moyenne, selon les données de l'observatoire Crédit Logement/CSA.

90% des prêt immobiliers sont à taux fixe

Sans coussin de sécurité, les banques françaises s'exposent davantage à une potentielle remontée des taux de refinancement. D'autant qu'elles assument le risque de taux étant donné qu'elles pratiquent massivement le taux fixe : 85% des 820 milliards d'euros d'encours de crédits immobiliers en France sont accordés à taux fixe.

Christian Noyer n'est du reste pas le seul à s'inquiéter du niveau des taux d'intérêt des crédits immobiliers. Le Comité de Bâle a lui aussi fait savoir récemment aux banques que l'environnement actuel des taux historiquement bas était une véritable menace pour l'équilibre financier des banques qui pratiquent massivement des prêts à taux fixe.

Un nouveau modèle de traitement des risques?

C'est pourquoi l'institution devrait proposer de revoir la manière dont les banques traitent le risque de taux dans leur bilan, notamment en leur demandant d'accroître les réserves à mettre en face des crédits immobiliers à taux fixe.

Si les banques souhaitaient échapper à ces contraintes, elles auraient alors le choix entre se couvrir davantage sur les marchés, revenir massivement aux prêts à taux variable en faisant de facto peser le risque de taux sur l'emprunteur en bout de chaîne, ou bien sortir les prêts de leur bilan par la technique de la titrisation.