Logement : les maires récalcitrants à construire seront-ils pénalisés ?

Par Mathias Thépot  |   |  627  mots
Jean-Paul Huchon, le président de la région Ile-de-France s'est inquiété du nombre de 5.000 logements stoppés par des nouveaux maires.
En Ile-de-France, la tension monte entre la région, soutenue par l’Etat, et les maires fraîchement élus qui stoppent des programmes de constructions de logements.

Le raz-de-marée bleu aux dernières élections municipales de mars, qui a vu la gauche perdre 155 villes de plus de 9.000 habitants, remet en cause un certain nombre d'opérations de constructions de logements, notamment sociaux. La situation est particulièrement marquée en Ile-de-France où les besoins en nouveaux logements sont pourtant les plus criants.

5.000 logements arrêtés

En effet depuis les élections municipales de mars 2014, la mise en chantier de plusieurs milliers logements a été stoppée par des maires franciliens fraîchement élus. Ce qui préoccupe fortement l'Etat et la région Ile-de-France.
Ensemble, ils ont dressé un état des lieux encore partiel des projets de construction dans la région : "43 sites ont été recensés par l'Institut d'Aménagement et d'urbanisme (IAU) d'Ile-de-France et le conseil régional où sont engagées des opérations majeures représentant 20.000 logements. Nous veillerons à ce que ces projets soient menés à leur terme", a assuré mercredi Jean-Paul Huchon, le président PS de la Région IDF. Avant de rappeler qu'en juin, il s'était "inquiété de 5.000 logements arrêtés par des nouveaux maires".

Les bailleurs sociaux très inquiets

L'angoisse monte tout particulièrement chez les bailleurs sociaux. Très implanté en Ile-de-France, 3F a par exemple déjà indiqué que 1.700 de ses logements dans diverses communes de l'hexagone ont été retardés, voire définitivement perdus à cause d'interventions intempestives de maires qui ont fait leur campagne contre des projets de construction. Au milieu de l'été, Libération a par exemple épinglé l'UMP fraîchement élu à Chelles (Seine-et-Marne) Brice Rabaste qui a annulé le permis de construire de 52 logements sociaux prévu par l'ancienne municipalité pour ne pas "dénaturer" le paysage.

Négociations avec les maires

Afin d'éviter que ce type de situation ne se reproduise, la région Ile-de-France opte pour une posture de négociation. "Chaque préfet de département va avoir des discussions avec ces maires qui ont bloqué des projets", a expliqué le préfet de région Jean Daubigny. "C'est l'engagement de chaque commune qui nous permettra d'atteindre l'objectif (de 70.000 nouveaux logements par an) qu'attendent les Franciliens" pour résoudre la pénurie qui touche la région francilienne, a-t-il insisté.

Pour atteindre cet objectif, le préfet n'hésitera pas à actionner les leviers nécessaires. Il compte mettre les maires récalcitrants "devant leurs responsabilités et leurs conséquences" en rappelant que le co-financement de certains équipements publics sont directement liés à la réalisation de logements. En outre, les comités de pilotage des Contrats de développement territorial (CDT) seront aussi "des instruments de négociation si une collectivité contractante se désiste", a souligné le préfet.

Des mesures financièrement contraignantes ?

Des mesures plus contraignantes pourraient tout de même être prises si les appels à la raison devaient ne pas être entendus. Emmanuelle Cosse (EELV), la vice-présidente de la Région en charge du Logement, a pour se justifier rappelé les "implications financières" de la décision de bloquer un projet immobilier: "beaucoup de maires ont oublié qui a acheté le terrain et qui a dépollué ! (...) Certains programmes arrêtés étaient portés par l'Établissement public foncier l'Ile-de-France", a-t-elle expliqué.

Du reste, pour tirer significativement vers le haut la construction de logements en Ile-de-France, d'aucuns attendent la mise en œuvre de la mesure qui instaurera des aides aux maires bâtisseurs par le biais d'une modulation de la dotation globale de fonctionnement. Ce dispositif devrait figurer dans la prochaine loi de finances. Le préfet Daubigny en est en tout cas convaincu : "le Premier ministre a dit que cet engagement serait tenu, il a été très clair", s'est-il réjoui.