Immobilier  : les terrains ne se vendent pas, malgré une fiscalité attractive

Par Mathias Thépot  |   |  583  mots
Les mesures visant à mobiliser le foncier privé n'ont pas encore eu d'effet.
Le gouvernement a instauré l'été dernier une fiscalité attractive pour les ventes de terrains afin de libérer le foncier privé. Mais celle-ci ne semble pas avoir les effets escomptés.

Dans l'immobilier, il ne suffit pas toujours d'accorder des avantages fiscaux conséquents pour doper l'activité. Le gouvernement Valls est en train d'en faire l'amère l'expérience, lui qui a instauré un abattement supplémentaire exceptionnel de 30 % sur les plus-values de cessions de terrains à bâtir pour les promesses de vente signées entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2015. Bercy espérait que cette mesure permettrait "de relancer immédiatement le marché et d'encourager les détenteurs de terrains à bâtir à céder leurs biens".

Mais malheureusement, il n'y a pas eu de frémissement sur le marché des terrains à bâtir depuis septembre. En Île-de-France notamment, un marché où la pression sur les prix est telle que fluidifier le foncier privé est absolument primordial, « la réduction de 30% sur les plus-values pour les promesses réalisées jusqu'au 31 décembre 2015 ne semble pas pour le moment porter ses fruits », déplore Christian Godard, notaire en Seine-et-Marne (77).

Moins de ventes de terrains en Grande couronne

Sur la surface de la grande couronne, qui représente près de 80 % du marché des terrains à bâtir d'Île-de-France, seulement 6.100 ventes sur 1 an ont été réalisées, insistent les notaires d'Île-de-France. « Depuis 2010, on assiste à une baisse continue de 24 % des ventes de terrains en grande couronne, et de 44 % par rapport à la moyenne de la période 1999-2007 », ajoute Christian Godard.

Plus globalement, au niveau national, « on n'a ressenti ni d'effet sur les volumes de ventes de terrains, ni d'effet sur les prix depuis l'instauration de l'abattement », déplore Thierry Thomas, président de l'Institut notarial du droit immobilier. « Seuls des notaires de Marseille semblent observer un frémissement lié à l'avantage fiscal », précise-t-il toutefois.

Pas un marché d'urgence

Le cadre fiscal n'a donc peut-être jamais été aussi favorable aux vendeurs. Mais alors pourquoi n'y a-t-il pas davantage de transactions ? D'abord à cause de la nature propre du marché des terrains à bâtir qui n'est « pas un marché d'urgence pour les vendeurs », insiste Thierry Thomas, président de l'Institut notarial du droit immobilier. En période de crise, les vendeurs sont plus prudents et ne sont pas forcément enclins à baisser leurs prix.

Ensuite, « un autre facteur, qui n'est pas à négliger, est la grande quantité de réglementations qui pèsent sur les acquéreurs de terrains en vue de construire (fondations antisismiques, RT 2012 etc...). Incontestablement, il est plus compliqué de construire que ça ne l'était », juge Thierry Thomas. Souffrant notamment du coût croissant de la construction, les promoteurs ont d'ailleurs réduit fortement leurs lancements de programmes. De peur de ne pas vendre, ils ont donc réduit leurs prospections de foncier.

Aller plus loin dans abattement ?

Enfin, certains experts immobiliers estiment que le cadre fiscal pourrait être encore plus favorable. En effet, depuis 2011, l'exonération totale de l'imposition sur le revenu des plus-values de cessions de terrains a été fixée après 30 ans de détention, contre 15 auparavant. Si depuis, elle a été rabaissée à 22 ans par le gouvernement Valls, l'exonération totale des prélèvements sociaux a en revanche été maintenue à 30 ans. Ce qui reste un délai « trop long », au sens Thierry Thomas. Peut-être y-a-t-il donc encore des marges de manoeuvre en matière de fiscalité...

Du reste, selon l'avis général, un frémissement des ventes de terrains devrait tout de même se faire ressentir, comme souvent, juste avant que ne prenne fin l'abattement exceptionnel, c'est-à-dire le 31 décembre 2015.