Immobilier : pourquoi Londres devient plus cher que Paris

Par Mathias Thépot  |   |  870  mots
Les prix de l'immobilier ont crû de 18 % à Londres en 2014.
Les marchés immobiliers parisiens et londoniens sont en partie comparables. Or dernièrement, la métropole anglaise voit ses prix de l'immobilier augmenter davantage que ceux de la capitale française. Explications.

En France, se loger dans Paris et sa banlieue proche coûte deux, voire trois fois plus cher que dans les autres métropoles de l'hexagone. La différence est telle que les marchés de l'immobilier de la capitale et des grandes villes françaises en deviennent incomparables. Beaucoup préfèreront confronter Paris avec les autres grandes villes monde, au premier rang desquels sa voisine Londres, la ville la plus attractive du vieux continent.

Mais ces deux grandes métropoles jouent-elles à armes égales en matière d'immobilier ? Oui si l'on se place d'un point de vue urbanistique. Comme Paris, Londres à son intramuros, le Inner London. Et comme Londres avec son Greater London, Paris aura son Grand Paris à partir de 2016.

Par ailleurs, au même titre que la France, l'Angleterre est un pays où l'activité économique est majoritairement centrée sur une grande ville. Un modèle Jacobin que ne partage par exemple par du tout l'Allemagne, où plus d'une demi-douzaine de grandes villes (Munich, Stuttgart, Francfort, Berlin, Hambourg, Düsseldorf, Cologne... ) se partagent l'attractivité du pays. Résultat, outre-Rhin, la demande est plus étalée et les prix de l'immobilier plus homogènes.

Les deux capitales les plus chères d'Union européenne

Ainsi en matière de prix, Paris et Londres sont largement au-dessus des autres capitales de l'Union européenne. En 2013, Le prix moyen au mètre carré à Paris était de plus de 8.100 euros, alors qu'à Londres, il atteignait 10.000 euros, selon une étude de Deloitte.
Cependant en 2014, les différences de prix se sont creusées entre les deux capitales : les prix à Paris sont en légère baisse, alors qu'à Londres, ils ont encore bondi de 18%, accélérant le rythme d'une croissance soutenue ces dernières années. Résultat, depuis 2007, les prix de l'immobilier ont crû de 26% à Paris et de 36% à Londres.

Comment expliquer cet envol de la métropole britannique par rapport à la capitale française ? Déjà parce que Paris intramuros stagne en termes de prix. Le plan de relance Sarkozy de 2009 (TEPA, Scellier, PTZ+...) et le rebond économique avaient participé à tirer les prix de l'immobilier parisien vers le haut : le prix médian à l'achat a crû en 24 mois de 100.000 euros à 434.000 euros courant 2011, selon la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim). Mais depuis les plans de relance ont laissé place à des plans de rigueur et en parallèle l'économie a rechuté.

Des plans de relance massifs outre-manche

A l'inverse en Angleterre, le gouvernement et la Banque centrale ont lancé des grands plans de relance et la croissance est revenue depuis fin 2012, en grand partie tirée par l'immobilier. Deux fameux plans ont notamment été lancés : le « Funding for lending » destiné à injecter des liquidités dans l'économie britannique, ainsi que le « Help to buy » dédié à l'achat immobilier et dans lequel les autorités britanniques garantissent jusqu'à 15 % d'un crédit hypothécaire dans le neuf ou dans l'ancien, limité à 600 000 livres, en vue d'inciter les banques et les caisses hypothécaires à accepter de financer un ménages ayant un apport représentant 5 % du prix d'achat.

Par ailleurs, il faut dire que les constructions de logements sont a un niveau très bas en Angleterre (140.000 unités en 2013), soit plus de deux fois moins qu'en France, et que pour ne rien arranger, la construction chute depuis deux trimestres outre-manche. Ce secteur souffre notamment du fait qu'il est interdit de construire sur les couronnes vertes qui bordent les grandes villes anglaises. De fait, celles-ci limitent le périmètre des métropoles anglaises, comme c'est le cas pour le Greater London. Elles empêchent l'étalement urbain, ce qui fait pression sur les prix.

Londres plus attractive, mais à quel prix ?

Du reste, l'attractivité de Londres à l'international demeure supérieure à celle de Paris, ce qui participe aussi à tirer les prix de l'immobilier vers le haut.

Ce surplus d'attractivité tient d'abord à une raison simple : la langue. L'anglais permet à Londres d'attirer un nombre d'étrangers bien supérieur, ce qui en fait une ville incroyablement cosmopolite. Ensuite, le cadre fiscal est plus favorable pour les non-résidents à Londres qu'à Paris. Les acquéreurs étrangers représentent désormais 50% du total des nouveaux acheteurs sur le territoire du Grand Londres, contre seulement 7% sur ce qui sera considéré comme le périmètre du Grand Paris, d'après la Fnaim. Cette part croissante d'acquéreurs étrangers à Londres est aussi la preuve de son embourgeoisement. A cause de la folle hausse des prix, les habitants historiques sont obligés de déserter le centre-ville de Londres.

A moins d'avoir des revenus très confortables, il est désormais très difficile d'habiter seul dans un appartement de la capitale anglaise. Peu de petites surfaces sont proposées à la location, trop chères pour les locataires et pas assez rentables pour les propriétaires bailleurs. Résultat, la colocation se développe. Londres comprend ainsi à elle seule plus du tiers des colocations en Europe ! Une situation davantage contrainte que voulue par un mode de vie spécifique.

Bref, si le Grand Paris prend exemple sur le modèle du Greater London, il ne faudra pas s'attendre à ce que les prix du logement baissent, ou même augmentent raisonnablement.