L'annulation de l'encadrement des loyers réjouit les professionnels de l'immobilier

Par Hugo Baudino  |   |  838  mots
Les professionnels de l'immobilier voient globalement d'un très bon œil la fin de l'encadrement des loyers.
Le coup d'arrêt porté à l'encadrement des loyers à Paris satisfait les principaux acteurs de l'immobilier. Selon eux, l'attention doit maintenant être portée sur l'offre de logements sur le marché locatif.

Le couperet est tombé hier soir. Depuis celle décidée à Lille fin octobre, l'annulation de l'encadrement des loyers à Paris était à attendre. Et le tribunal administratif de Paris a donc bel et bien annulé les trois décrets d'applications, publiés en 2015, 2016 et 2017, de l'encadrement des loyers version parisienne. La mairie de Paris a réagi en premier, regrettant l'annulation d'un dispositif jugé efficace pour endiguer la hausse des loyers. Le gouvernement est allé dans ce sens et envisage, comme pour Lille, de faire appel de la décision du tribunal administratif.

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Si les pouvoirs publics regrettent la décision du tribunal administratif, ce n'est pas le cas des professionnels de l'immobilier. Ainsi, Bernard Cadeau, président du réseau d'agence Orpi, n'est "pas surpris" par une décision qui "suit la logique lilloise" et ne regrettera pas un dispositif qu'il ne juge "pas utile". De plus, l'encadrement des loyers produit selon lui "des contre-effets", à savoir des propriétaires qui se "désintéressent de l'investissement locatif et qui louent sur Airbnb".

"L'encadrement des loyers n'est pas bon parce qu'il est coercitif, il agit tel un repoussoir psychologique. Entre l'incitation et la contrainte, il y a un monde", poursuit Bernard Cadeau, qui penche clairement pour la première solution.

Pierre Hautus, directeur de l'Union national des propriétaires immobilier, voit dans cette annulation "une très bonne nouvelle". "L'UNPI s'est battue depuis le début dans ce dossier et c'est la seule à avoir obtenu gain de cause", fanfaronne-t-il. Il faut reconnaître que le seul recours retenu par le juge administratif lillois pour annuler l'encadrement des loyers était celui émis par l'UNPI, et il semblerait que ce soit aussi le cas à Paris.

"L'encadrement des loyers est une mesure inefficace et obsolète", selon Pierre Hautus, qui tient également à revenir sur les propos de Ian Brossat, adjoint à la mairie de Paris en charge du logement. "Contrairement à ce qu'a dit Ian Brossat, les loyers ne vont pas s'envoler à Paris car ils sont déjà soumis à un plafonnement". Un plafonnement qui persistera en cas de fin définitive du dispositif d'encadrement des loyers.

Quelles alternatives pour faire baisser les loyers ?

Pour Bernard Cadeau, le marché immobilier est un "modèle de libre concurrence". Ainsi, la hausse des prix n'est simplement dû qu'à une pénurie d'offre par rapport à une demande trop importante.

"On cite souvent l'exemple de l'Allemagne, où l'encadrement des loyers existe, mais les Allemands ont un parc immobilier locatif suffisant pour faire face à la demande. A Paris, on a huiy demandes pour un logement, ce n'est pas tenable", résume Bernard Cadeau.

C'est donc en agissant sur l'offre que le marché locatif pourra se rééquilibrer, et les loyers baisser (ou au moins cesser d'augmenter aussi vite). Le réseau Orpi milite donc depuis plusieurs années pour la création d'un statut de bailleur privé, qui protège plus efficacement les particuliers qui font le pas de l'investissement locatif. Avec une meilleure protection, plus de propriétaires pourraient donc, selon lui, faire le choix de la mise en location de leur logement.

Cette vision est partagée par Pierre Hautus, directeur de l'UNPI. "Il faut faire en sorte d'améliorer l'offre" de logements disponibles, cela passe selon lui par le rétablissement d'une "équité fiscale" vis-à-vis des propriétaires. Cela fait écho au rapport présenté début novembre par le rapporteur de la commission des finances Albéric de Montgolfier (LR). Le rapport rappelait la très forte progression, +28% en dix ans, de la fiscalité sur l'immobilier, en prenant en compte l'intégralité des prélèvements liés au logement : de la TVA sur les travaux à la taxe foncière en passant par les droits de mutations.

Cette hausse de la fiscalité a eu pour conséquence directe de plomber la rentabilité de l'investissement locatif. Pierre Hautus propose donc de corriger le tir au niveau fiscal tout en simplifiant les processus légaux relatifs à la location afin de convaincre réellement les propriétaires et les investisseurs de se lancer vers l'immobilier locatif.

Quelques rares regrets

Les professionnels de l'immobilier voient donc globalement d'un très bon œil la fin de l'encadrement des loyers. La voix de la confédération nationale du Logement (CNL) est une des seules à le regretter  : "Oui, le dispositif mis en place depuis août 2015 n'était pas parfait et maintes fois la CNL a dénoncé ses failles mais nous nous battions alors pour l'amélioration de la mesure, pas pour sa suppression."

"Les locataires parisiens sont en droit de se poser la question suivante : « Où va-t-on se loger ? ». Le privé se transformant rapidement en jungle spéculative alors que le secteur HLM est, lui, gravement menacé", s'alarme la CNL. La confédération réclame par conséquent "un observatoire des loyers contrôlable et vérifiable ainsi qu'une place plus importante des associations de locataires dans le processus de réclamation en cas de loyers abusifs".