L’effet du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi sera connu en…2017

Par Fabien Piliu  |   |  734  mots
Tic tac tic tac....
C’est le temps qu’il faut au Comité de suivi chargé de son évaluation, piloté par le Commissariat général à la Prospective, pour évaluer avec précision les effets du crédit d’impôt pour la compétitivité et l'emploi. Selon nos informations, Bpifrance avait accepté 10.720 dossiers pour un montant de 927 millions d’euros entre février et octobre. Les effets sur l'export et l'innovation ne devraient pas être bien élevés.

"Je vais vous décevoir. Vous n'aurez pas aujourd'hui les premières évaluations des effets du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi [CICE]. Il faut du temps pour évaluer correctement et avec sérieux ce dispositif", a déclaré Jean Pisani-Ferry, le Commissaire général à la Stratégie et à la Prospective (CGSP) à la tête du Comité de suivi pour le CICE, dont l'enveloppe globale est de 20 milliards d'euros. Qu'il est loin, le temps où les gouvernements faisaient résonner tambours et trompettes pour annoncer les effets de la loi Travail emploi et pouvoir d'achat (TEPA), de la loi de modernisation économique (LME) ou des allégements de charges sur les bas salaires !

Prendre son temps

A l'heure de l'instantanéité de l'information, le CGSP, qui ressuscite d'une certaine manière l'ancien Plan de Jean Monnet puisqu'il essaie de décrypter l'avenir, prend son temps. Beaucoup devraient être déçus.

Reste que la méthode consistant à mesurer les effets d'une loi ou d'un dispositif est quasiment inédite en France. Bien souvent réclamée par les économistes et les organisations patronales, inspirée des pratiques en vigueur dans les pays scandinaves et anglo-saxons, cette étude d'impact était prévue par l'article IV de la loi de finance rectificative 2012, qui avait elle-même entériné la création du CICE. Pour conduire ses travaux, le Commissariat s'est entouré des huit partenaires sociaux représentatifs au niveau national interprofessionnel, des représentants des administrations compétentes, ainsi que de la Banque de France, du Commissariat général à l'investissement (CGI), de l'ACOSS et de deux experts.

Une méthode, trois axes de recherche

Pour évaluer le CICE, qui concerne toutes les entreprises employant des salariés soumises à un régime d'imposition et qui porte sur la masse salariale n'excédant pas 2,5 SMIC - il s'élève à 4% en 2013 et passera à 6% à partir de 2014 -, le Comité de suivi a fait le choix d'une méthode en trois points.

Près d'un milliard déjà versé aux entreprises

Selon les données recueillies par La Tribune et datées d'octobre, Bpifrance avait déjà accepté 10.720 dossiers de préfinancement pour un montant de 927 millions d'euros depuis le lancement du dispositif en février. Le gouvernement a fixé à la BPI l'objectif d'atteindre rapidement les 2 milliards d'euros préfinancés.

Dans un premier temps, il dressera la liste, exhaustive espère-t-il, des questions relatives au CICE. Quelques exemples: qui en bénéficie? Quels sont ses effets sur les comportements des entreprises, sur le commerce extérieur, sur les investissements, sur la politique salariale ? Quel est l'effet de captation - certains évoquent du racket au CICE - des donneurs d'ordre ?

Ensuite, la méthode à proprement parler consistera à évaluer les comportements micro-économiques, c'est-à-dire des entreprises bénéficiaires et des autres. "Cette tâche sera compliquée", prévient déjà Jean Pisani-Ferry. En effet, il est bien évident que les comportements des entreprises ne dépendent pas du seul CICE ! Pour jauger ces comportements, le Commissariat compte solliciter des équipes de recherche, françaises ou étrangères, via des appels d'offre.

Des résultats en 2017

Enfin, la dernière partie du travail du Comité de suivi consistera à évaluer le bouclage macro-économique. Pour l'instant, seules des hypothèses ont été formulées par l'exécutif et les économistes.

"Les premiers résultats sérieux ne seront pas connus avant la fin de la législature", prévient Jean Pisani-Ferry.

Peu d'effets sur l'innovation et l'export

Peut-on en déduire que l'Insee, qui estime à 15.000 le nombre d'emplois qui devraient être créés grâce au CICE au second semestre, a agi à la légère ? Jean Pisani-Ferry balaie cette hypothèse : "Les travaux de l'Insee reposent sur les observations portant sur des mesure similaires, en particulier celles consistant à réduire le niveau des charges salariales", explique-t-il. Par ailleurs, à défaut de les quantifier, peut-on déjà anticiper l'effet du CICE sur l'emploi et l'export ? Sachant que ce sont les plus petites entreprises qui bénéficient du CICE - les micro-entreprises concentrent 85% des gains sur lamasse salariale -, que l'industrie ne recolte que 20% de ces gains, ils devraient être assez faibles. C'est somme toute assez logique, le CICE ne concernant que les salaires inférieurs à 2,5 SMIC. Or, les salaires des chercheurs et des chargés d'affaires à l'international dépassent bien souvent ce plafond...