Pacte de responsabilité, économies... Manuel Valls passe son grand oral

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  1025  mots
Manuel Valls cherche à s'assurer une large majorité pour lui voter la confiance
Le nouveau Premier ministre va prononcer ce mardi 8 avril son discours de politique générale. Au menu, notamment, le contenu du pacte de responsabilité et le détail des 50 milliards d'euros d'économie.

« Il » aura passé son week-end à déminer. Ce lundi 7 avril encore, « il » reçoit les présidents des groupes Radicaux de gauche, communistes et Europe Ecologie-Les Verts de l'Assemblée nationale. « Il », bien sûr, c'est Manuel Valls qui prononcera demain mardi 8 avril son discours de politique générale devant les députés. Un moment important pour le nouveau locataire de Matignon puisqu'il devrait annoncer des mesures concrètes qui vont affecter la vie des Français pour les mois à venir. L'intéressé n'a pas dit autre chose dans le « Journal du Dimanche » : « Il s'agit d'un discours important, il faut que je me l'approprie », promettant du "concret", à l'image de celui délivré en 1988 par Michel Rocard.

"C'est ce discours de politique générale qui fixera les grands enjeux des mois à venir", a souligné pour sa part le nouveau porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.

Le pacte de responsabilité révélé

Une grande partie du discours du Premier ministre devrait donc être consacré au Pacte de responsabilité, nouvel arme du gouvernement pour, enfin, parvenir à inverser la courbe du chômage. On connaît déjà les grandes orientations de ce pacte : 30 milliards d'euros seront consacrés à la baisse du coût du travail, via, d'abord, le crédit impôt compétitivité emploi (CICE) déjà existant qui serait amplifié et, ensuite, grâce à de nouveaux allègements de cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas et moyens salaires.

En d'autres termes, les « allègements Fillon », dégressifs entre 1 et 1,6 Smic, seraient majorés et, sous ce seuil,  les cotisations sociales deviendraient définitivement progressives et non plus proportionnelles aux salaires. Ce que l'on appelle la « barémisation ».

 S'assurer un soutien large à gauche

Mais Manuel Valls veut aussi montrer que la majorité a entendu le message envoyé par les électeurs lors des élections municipales catastrophiques pour son camp où 155 villes de plus de 10.000 habitants ont basculé à droite.

"Le sentiment d'injustice est très prégnant", analyse-t-il dans le JDD. "Les ravages de la hausse des impôts depuis quatre ans sont très importants, les Français en ont assez du trop plein d'impôts, c'est frappant dans les classes moyennes et chez ceux qui se sont retrouvés imposables pour la première fois", relève encore l'ex-ministre de l'Intérieur. Concrètement, donc, le Premier ministre pourrait annoncer un petit geste en faveur des revenus modestes et moyens (ceux qui paient l'impôt sur le revenu), via une baisse des prélèvements, voire par un abattement de cotisations sociales salariales. Autant de gestes qui pourraient rendre nécessaire l'adoption en juin d'une loi de finances rectificative afin de pouvoir assurer leur mise en œuvre dès cette année.

Manuel Valls devrait aussi aborder d'autres questions concrètes, comme les rythmes scolaires, la réforme pénale ou la loi sur la transition énergétique qui devrait être défendue en juin.

Le Premier ministre, qui tient à « bichonner » ses troupes pour éviter d'être mis en difficulté lors du vote de confiance - celui-ci portera donc finalement sur la politique générale et non sur le seul pacte de responsabilité comme prévu initialement - qui suivra son intervention devrait participer à la conférence des présidents de groupe à l'Assemblée, mardi matin, ainsi qu'à celle des députés PS. ministre.

En vérité, il n'a pas trop de souci à se faire, le PS et ses proches alliés radicaux de gauche détenant la majorité absolue des 577 sièges. C'est du côté des turbulents alliés d'Europe Ecologie - Les Verts que les mauvaises surprises pourraient venir, même si Jean-François Placé, sénateur EE-LV a assuré que les parlementaires écolos ne voteraient « pas contre »… Ils devraient donc s'abstenir. Quant à l'aile gauche du PS, les nombreux contacts pris avec ses leaders par Matignon devraient également avoir calmé les esprits… Surtout que la nomination d'une douzaine de secrétaires d'Etat, qui doit être annoncée mercredi 9 avril pour compléter le gouvernement, a permis de faire miroiter des postes à cette tendance du PS…

Manuel Valls va aussi devoir trouver les mots pour rassurer la centaine de députés socialistes de diverses sensibilités qui ont signé ce week-end une pétition , appelée « contrat de majorité », où ils demandent que le Parlement joue un rôle accru et souhaitent de nouvelles "orientations" politiques. Notamment, ces parlementaires demandent qu'un message clair soit envoyé à la Commission européenne pour qu'elle cesse de vouloir faire revenir les Etats membres à l'équilibre financier à marche forcée. Manuel Valls pourrait aller dans ce sens…

Comment trouver 50 milliards d'euros d'économies

Last but not least, Manuel Valls devrait détailler de quelle façon il compte parvenir à économiser 50 milliards d'euros sur trois ans dans les dépenses publiques. Le quotidien Les Echos, dans son édition du 7 avril, a avancé des ordres de grandeur qui « collent » avec les données qui circulaient dans divers cabinets ministériels.

L'Etat serait mis à contribution à hauteur de 17 milliards d'euros, via notamment, un prolongement du gel du point d'indice des fonctionnaires. Mais des mesures pourraient tout de même être prises pour sauvegarder le pouvoir d'achat des personnels les moins bien rémunérés de la fonction publique.

La Sécurité sociale contribuerait à hauteur de 23 milliards d'euros, via un coup de frein sur l'évolution des dépenses de santé.

Enfin, on le savait, les dotations aux collectivités locales pourraient être amputées de 10 milliards d'euros. Ce plan d'économie va être observé de très près par Bruxelles. De fait, il sera intégré (tout comme le pacte de responsabilité) dans les « nouvelles trajectoires des finances publiques françaises » que le gouvernement va envoyer à la Commission fin avril. Et cet effort pour juguler la progression des dépenses et l'une des armes majeures à la disposition du ministre des Finances Michel Sapin, pour faire la démonstration auprès de la Commission de la bonne volonté de la France pour tendre le plus rapidement possible - si ce n'est pas en 2015 finalement - vers un déficit limité à 3% du PIB