Secret des affaires : Michel Sapin promet un geste aux « lanceurs d'alertes »

Par Fabien Piliu  |   |  582  mots
Le gouvernement cherche désespérément les outils pour lutter contre l'espionnage industriel
Un amendement socialiste à la loi Macron prévoyait d'encadrer plus sévèrement la protection du secret des affaires. Le ministre de Finances a tranché : le texte sera amendé pour protéger les « lanceurs d'alerte ».

Les disciples d'Edward Snowden peuvent être rassurés. Les " lanceurs d'alerte ", c'est-à-dire les particuliers qui révèlent des scandales sur la base de documents confidentiels ne seront pas punis. Interrogé sur RTL ce mercredi, Michel Sapin a été catégorique l'amendement créant un secret des affaires et permettant de porter plainte contre un citoyen qui révèlerait une information économique sensible sera modifié lors de l'examen de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ou loi Macron.

La peur du gendarme

Cette disposition n'était pas intégrée dans le texte initial. Elle a été introduite via un amendement lors du débat en commission le 17 janvier par député PS Richard Ferrand, le rapporteur général de la loi. Il a reçu le soutien des députés de l'UMP et de l'UDI. Seules quelques voix se sont élevées, parmi lesquelles celles de Karine Berger, la députée socialiste des Hautes-Alpes.

Cet amendement permet de punir toute personne qui prendrait connaissance et/ou révèlerait sans autorisation une information protégée par le secret des affaires. Le contrevenant risquerait alors jusqu'à trois ans de prison et 375.000 euros d'amende. La peine de prison serait portée à sept ans dans le cas "d'atteinte à la sécurité ou des intérêts économiques de la France". Avec cette disposition, les députés espèrent combattre l'espionnage industriel en donnant aux entreprises les moyens légaux de se défendre plus efficacement et en accentuant la peur du gendarme.

Déjà, en 2012

En 2012, le député UMP Bernard Carayon avait tenté de légiférer sur ce point pour protéger les informations sensibles. Le projet de loi a été abandonné en raison e al complexité juridique du sujet. A la différence de la violation des secrets de fabrication, l'espionnage industriel n'est pas une qualification juridique inscrite dans le code pénal ou le code de la propriété intellectuelle.

Un droit d'alerte « affaibli » ?

En réponse aux critiques sur cet amendement, Richard Ferrand a précisé que la rédaction d'un amendement au code de la presse permettrait aux "journalistes de révéler des infractions éventuellement commises par une entreprise" et que la diffusion d'informations tombant sous le secret des affaires resterait autorisée à une condition : que cette diffusion de l'information soit "strictement nécessaire à la sauvegarde d'un intérêt supérieur, tel que l'exercice légitime de la liberté d'expression ou d'information ou la révélation d'un acte illégal". Cet amendement pouvait-il protéger les entreprises contre des attaques lancées par des Etats ? Non. Il est par ailleurs amusant de noter que la France, dans ce monde opaque de l'espionnage industriel, est régulièrement citée parmi les pays les plus en pointe das ce domaine.

Malgré ces précautions, quelques jours après les attentats ayant frappé Charlie Hebdo, l'initiative passe mal. Selon l'association Transparency International, le droit d'alerte, qui "n'a été reconnu en France que très récemment sous la pression de la société civile - et encore de manière lacunaire -", risquait d'être "considérablement affaibli". L'Association de la presse judiciaire est également montée au créneau et réclamé la suppression de cet amendement. Ils ont été entendus. Il ne reste plus aux entreprises qu'à renforcer leurs systèmes de défense.