Les Suisses votent dimanche sur l'immigration

Par Romaric Godin  |   |  544  mots
Devant le Parlement fédéral, à Berne, une manisfestation en faveur du "non"
Les Helvètes doivent se prononcer ce dimanche sur une initiative du parti populiste UDC sur "l'immigration de masse". Le résultat est incertain.

C'est une votation qui occupe les esprits depuis longtemps en Suisse. Dimanche, les citoyens helvétiques seront invités à se prononcer sur une initiative du parti populiste UDC « contre l'immigration de masse. » Le texte soumis aux suffrages des Suisses réclame « un changement systématique de politique migratoire », et, par la modification de la constitution, l'établissement de plafonds pour les autorisations de séjour et les demandes d'asile.

Montée du « oui »

Cette votation a passionné la Suisse. Progressivement, l'ambiance a changé autour de cette votation. Voici quelques mois, son rejet ne faisait pas de doutes. C'est beaucoup moins le cas ces dernières semaines. Un sondage de la radio romande du 30 janvier montre que l'écart entre les « oui » (qui acceptent l'initiative) et les « non » est passé de 18 points à sept points en un mois. Ceux qui acceptent l'initiative seraient 43 %, ceux qui la rejettent 50 %.

Faible appui politique à l'initiative

La participation, qui pourrait être beaucoup plus élevée qu'ordinairement lors de ces votations, sera déterminante, mais le score devrait être serré. Pourtant, l'initiative est rejetée par le gouvernement et tous les grands partis du pays à l'exception de l'UDC et de quelques autres partis populistes comme le Mouvement citoyens genevois (MCG), un mouvement hostile aux frontaliers français bien implanté dans le canton de Genève. Mais la crainte d'un scénario répétant la surprise de l'interdiction des minarets en 2009 est désormais bien présente.

Craintes dans le camp du « non »

Cette crainte est d'abord celle des milieux économiques. Ils craignent un manque de main d'œuvre dans un pays où le taux de chômage est de 3,2 %. Par ailleurs, l'initiative est floue et elle pose le problème du maintien ou non de la Suisse dans l'espace Schengen. Beaucoup de patrons suisses craignent une remise à plat des accords avec l'UE de la part de Bruxelles.

Cette peur d'une rupture avec l'UE est, du reste, le principal argument des « pro-non. » La Suisse a en effet une situation assez commode, mais fragile. Non membre de l'UE après le refus du peuple et des cantons en décembre 1992, la Suisse s'est engagée depuis 1999 dans des négociations bilatérales qui l'ont rapprochée fortement de l'UE. Certaines études estiment qu'un tiers des emplois suisses dépendraient des relations avec l'UE.

Craintes dans le camp du « oui »

Mais beaucoup de Suisses vivent mal l'immigration. Les frontaliers allemands, italiens ou français sont accusés de « casser les salaires. » Dans le sondage déjà cité, la moitié des sondés attribuait à l'immigration la baisse de la qualité de vie et l'augmentation de la criminalité. L'UDC estime enfin - et atteint souvent son but dans l'opinion - que la Suisse ne peut supporter une croissance démographique trop forte.

Le gouvernement a tenté de donner le change

Sous la pression de cette votation, le Conseil fédéral (gouvernement) a déjà serré les vis en supprimant le 15 janvier les aides sociales pour les étrangers qui viennent en Suisse chercher un emploi, ainsi que la création d'un fichier sur les personnes ayant touché indûment ces aides. Mais rien n'y fait, le « oui » semble monter inexorablement. Il faudra attendre dimanche pour savoir s'il réussira finalement à l'emporter et à créer la surprise.