En Allemagne, les loyers vont être encadrés

Par Mathias Thépot  |   |  706  mots
Les prix des loyers à Hambourg ont pris plus de 20% depuis 2007.
Une loi a été adoptée la semaine passée en Allemagne pour encadrer les loyers à la relocation. Ce dispositif n’est cependant pas comparable à la loi française que Manuel Valls tente de détricoter.

Alors que la France revient partiellement sur son encadrement des loyers - pourtant une promesse de campagne de François Hollande votée par le Parlement -, l'Allemagne prend le contrepied et vient d'adopter une loi qui accroît le contrôle des loyers à la relocation. Celle-ci sera appliquée au cours du premier semestre 2015. Le gouvernement allemand compte bien grâce à cela limiter l'impact de la hausse des loyers sur les revenus des locataires outre-Rhin. Ils ont en effet augmenté substantiellement dans les grandes villes entre 2007 et 2012 : +30% à Berlin, +23% à Hambourg, + 19% à Francfort et + 14% à Munich, d'après les chiffres du DIW, l'institut économique de Berlin, avec pour effet collatéral de faire croître doucement mais sûrement la part des propriétaires allemands.

Hausse limitée à 10% du loyer moyen

Le gouvernement fédéral a donc instauré un blocage des loyers à la relocation. Cette mesure va limiter les hausses de loyers à la relocation (changement de locataire) à 10% du loyer moyen dans les zones tendues. Et si les loyers sont déjà supérieurs à 10% du loyer moyen de référence, ils seront bloqués. Seront dispensés les logements neufs et les logements « modernisés » ou rénovés, sachant que les associations de locataires regrettent qu'une définition exacte de la modernisation n'ait pas été fixée dans la loi. De quoi peut-être entraîner des abus...

Rien à voir avec l'encadrement de la loi Alur

Cette mesure n'a donc pas grand-chose à voir avec l'encadrement des loyers intégré dans la loi Alur portée par Cécile Duflot. En effet, le dispositif voté par le Parlement français limitait les loyers  - et non les hausses à la relocation - à 20% au-dessus du loyer médian du quartier dans les zones tendues. On était en France davantage dans une limitation des abus... que Manuel Valls n'appliquera finalement de manière expérimentale que dans Paris et sa première couronne.

De fait, la loi allemande ressemble davantage à l'encadrement à la relocation qui s'applique en France depuis le décret du 1er août 2012. Celui-ci instaure un contrôle des loyers sous conditions à la relocation ou lors d'un renouvellement de bail à hauteur de la seule hausse de l'indice de référence des loyers (IRL). Publié trimestriellement par l'Insee, il s'est fixé à 0,57% au deuxième trimestre 2014.

Une volonté de maîtriser les prix internes

Du reste, c'est davantage la volonté allemande de maîtriser la hausse des loyers qui interpelle. Car, pour l'instant, la situation y est moins alarmante qu'en France. A Munich, la ville la plus chère du pays, le loyer moyen au mètre carré s'élève à seulement 12 euros, même s'il a crû de manière accélérée dernièrement, selon les chiffres du DIW. De même, le loyer moyen n'était que de 11 euros du m² à Francfort, de 9,5 euros à Hambourg, 8,5 euros à Düsseldorf, et enfin à Berlin, l'une des capitales les moins chères d'Europe, d'un peu plus de 7 euros du m². Ces niveaux sont bien inférieurs à ceux que l'on peut constater en France. Si Paris est hors catégorie -23.2 euros du m² début 2013 selon l'Observatoire Clameur-, à Lille (14,3 euros), à Nice (13,6 euros), à Lyon et à Marseille (12,5 euros), les loyers sont toujours nettement plus élevés que dans les grandes villes allemandes.
Outre-Rhin plus qu'en France, on attache une attention toute particulière à lutter contre le coût élevé du logement qui pourrait limiter la mobilité des jeunes salariés, et ,plus globalement, participer à accroître l'impact négatif des prix internes élevés sur la compétitivité.

Un discours plus favorable aux locataires

En matière d'éléments de langage aussi, les Allemands sont plus précautionneux vis-à-vis des locataires. Le ministre de la justice Heiko Maas déclarait ainsi au Guardian pour justifier la nouvelle mesure allemande que "la location devait rester abordable pour ceux qui sont au niveau du revenu moyen", tout en précisant que les propriétaires-bailleurs ne pouvaient pas considérer la location uniquement comme une source de revenus, sans se soucier de la personne qui y habite. "Maximiser les profits ne peut pas être le seul objectif" d'un propriétaire-bailleur indiquait-il ainsi. Un discours qui a pris du plomb dans l'aile en France...