Le héros de la gauche grecque Manolis Glezos attaque le compromis de l'Eurogroupe

Par Romaric Godin  |   |  581  mots
Manolis Glezos et Alexis Tsipras pendant la campagne électorale.
L'homme qui avait ôté le drapeau nazi de l'Acropole en 1941 s'estime déjà trahi par le gouvernement grec. Il appelle à refuser le compromis et demande aux militants de décider.

L'accord passé vendredi entre la Grèce et ses créanciers ne plaît pas à Manolis Glezos, le héros historique de la gauche grecque. Depuis Bruxelles, où il exerce ses fonctions de député européen élu l'an passé sur les listes de Syriza, ce vieil homme de 92 ans a publiquement « au peuple grec de [lui] pardonner d'avoir contribué à l'illusion » des promesse de Syriza.

« Dommage et encore dommage »

Dans un texte très virulent, dont on trouvera sur le site Okeanews la traduction en français, Ma nolis Glezos souligne que « changer le nom de la troïka en « institutions », celui du mémorandum en « accord » et celui des créanciers en « partenaires », ne change en rien la situation antérieure. » Il estime donc que le compromis trouvé à Bruxelles ne fera que poursuivre l'austérité. « Au lendemain des élections, d'une seule loi, nous abolissons la troïka et ses effets. Un mois est passé et cette promesse n'est toujours pas transformée en acte », affirme le texte qui ajoute « dommage et encore dommage. »

« La seule solution, c'est la liberté »

Manolis Glezos estime qu'il ne fallait accepter aucun compromis. « Entre l'oppresseur et l'oppressé, il ne peut être question de compromis, tout comme cela est impossible entre l'occupé et l'occupant. La seule solution c'est la liberté », indique le député européen qui appelle les militants et sympathisants de Syriza « à décider s'ils acceptent cette décision. » Bref, c'est un appel à la réflexion interne autour du compromis.

Epine dans le pied du gouvernement ?

Ce texte ne pouvait pas plus mal tomber pour Alexis Tsipras qui va devoir faire accepter à sa majorité le compromis bâti à Bruxelles. Du reste, plusieurs responsables de Syriza comme Sophia Sakofara, députée européenne, ou l'économiste John Milios, ont tweeté le texte de Manolis Glezos et fait part de leur soutien. Ceci dit, le gouvernement grec pourra aussi mettre cette agitation en avant pour justifier une certaine prudence vis-à-vis des demandes des « institutions », notamment concernant le marché du travail ou les assurances sociales. En attendant, le gouvernement a répondu gêné que, peut-être Manolis Glezos « n'est probablement pas bien informé des dures négociations qui se poursuivent. »

Héros des résistances grecques

Manolis Glezos, en tout cas, n'est pas n'importe qui pour les Grecs. Il est l'un des deux jeunes qui, le 30 mai 1941, ont décroché le drapeau de l'Allemagne nazie de la colline de l'Acropole. Condamné à mort par contumace, il a rejoint la résistance dans les rangs communistes et fut plusieurs fois torturé et emprisonné. Durant la guerre civile grecque, il fut à nouveau condamné à mort en 1948, sauvé grâce à la mobilisation internationale, il ne fut libéré qu'en 1954. Entretemps, depuis sa prison, il avait été élu député pour la Gauche démocratique unie (EDA). Durant le régime des colonels (1967-73), il fut encore arrêté, emprisonné 4 ans et exilé.

Figure de ralliement de la gauche autour de Tsipras

Manolis Glezos est le symbole de la résistance pour les Grecs. Il n'a jamais quitté la vie politique. Un temps rallié au Pasok, pour lequel il faut élu député européen, il a rejoint le Synaspsimos, l'ancêtre de Syriza, en 2000. Il fut une des principales figures de la défense contre l'austérité. C'est un personnage qui a joué un rôle dans le ralliement de la gauche autour d'Alexis Tsipras. Ses déclarations ne sont donc pas une bonne nouvelle pour le premier ministre.