Le bon fond des fonds

Les "hedge funds" ont tenu leur Woodstock de la finance. Faites de l'argent, pas la guerre, prônent-ils...

Que faisaient la semaine dernière les gérants de "hedge funds", ces fonds spéculatifs qui n'ont pas toujours bonne réputation, pendant que les marchés mondiaux s'écroulaient de concert? Ils tenaient festival dans une petite ville du nord de Londres, un rassemblement baptisé Hedgestock, sorte de Woodstock de la finance: plus de 4.000 gérants se sont réunis sous le soleil mercredi et jeudi, au son des meilleurs tubes des Who, venus chanter gracieusement pour l'occasion - à défaut des riffs mémorables de Jimmy Hendrix... Ces financiers, dignes héritiers des héros du "Bûcher des Vanités" de Tom Wolfe, au dire de l'écrivain américain lui-même, se seraient-ils convertis aux valeurs hippies, pacifisme, écologie, amour de son prochain?

Arborant force colombes et petites fleurs au graphisme psychédélique, le site Internet du rassemblement pourrait le laisser accroire. Mais Hedgestock a son propre credo: faites de l'argent, pas la guerre! Au lieu de "Peace & Love", leur leitmotiv serait plutôt "cash & return" - l'argent et le retour sur investissement. L'événement était d'ailleurs sponsorisé par le gratin des banques d'affaires, Crédit Suisse, Deutsche Bank, Merrill Lynch et autres UBS. Dans un village de tentes, entre des rangées de minibus Volkswagen customisés, vendus 14.500 euros l'unité, les participants, qui avaient troqué leur uniforme costume rayé-cravate pour un t-shirt et un short plus décontractés, ont pu partager leurs valeurs communes, l'amour pour l'argent, le goût du risque et une aspiration ultime: battre le marché. Tout en gardant les yeux rivés sur leur BlackBerry...

Car outre le concert des Who, les parties de poker et les tournois de polo et de cricket, Hedgestock a également organisé une vingtaine de conférences et une quinzaine de présentations très sérieuses sur les diverses techniques de gestion alternative. Plus de 3.000 rendez-vous en "one-to-one" ont permis à des gérants de rencontrer en face-à-face des investisseurs, dans un cadre moins austère que les bureaux, mais pour 15 minutes tout au plus. Même à Hedgestock, "time is money" reste la devise des nouveaux maîtres de la finance mondiale.

Quel rapport avec Woodstock, pourrait-on s'interroger? Les gérants de hedge ont peut-être en commun avec les hippies la contre-culture, se posant résolument à contre-courant des tendances d'investissement "conformistes", refusant le panurgisme des grandes gestions institutionnelles et cherchant à prendre à contre-pied le consensus. Peut-être aussi ont-ils finalement un bon fond: l'intégralité des bénéfices de l'opération, à 730 euros le ticket d'entrée, sera reversée à une oeuvre de charité, une fondation d'aide aux enfants cancéreux...

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