La crise des "subprime mortgages" entraine-t-elle un risque systémique ?

La hausse des taux de défaut sur les prêts immobiliers les plus risqués risque-t-elle d'ébranler la solidité du système financier américain et à terme l'économie des Etats-Unis ? Démontant les mécanismes du marché hypothécaire, Christian Parisot, économiste d'Aurel Leven, conclut que s'il existe un risque financier, le risque systémique doit être écarté.

La crise des " subprimes mortgages", c'est-à-dire le flambée des taux de défaut sur les prêts immobiliers les plus risqués, qui lamine les Etats-Unis, comporte-t-elle un risque systémique? C'est la question que tout le monde se pose, au vu du nouveau coup de torchon sur les places boursières suscité par la rechute de Wall Street hier soir, qui a contaminé et l'Asie et l'Europe.

Le déclencheur: la faillite prochaine de New Century Financial. Son défaut de paiement ne remet pas en cause la solidité du système financier américain, puisque cette petite entité n'est responsable que de 0,3% de l'encours total des prêts hypothécaires émis au 31 décembre 2006, constate l'économiste d'Aurel Level, Christian Parisot.

Néanmoins, ajoute-t-il, plusieurs facteurs sont présents qui peuvent générer une crise: malversations comptables, risque d'effet domino sur les autres compartements des crédits hypothécaires, mauvaise prise en compte des risques de crédit des ménages et impact sur la liquidités des marchés financiers.

Premier constat: le marché des prêts hypothécaires (mortgages) est le premier marché obligataire mondial et l'endettement hypothécaire total des ménages américains dépasse 9.500 milliards de dollars. Mais la majorité des prêts consentis aux ménages est refinancée auprès des banques qui constituent des portefeuilles de mortgages et en titrisent une partie sur les marchés.

Pour Christian Parisot, le risque pour le système financier se situe à trois niveaux :

" 1) Quelques courtiers hypothécaires ont volontairement falsifié des dossiers, notamment les plus risqués. Le risque sur les prêts aux ménages a donc été fortement sous-estimé. De fait, sur la fin 2006, New Century a annoncé que 2,5 % de ses nouveaux clients ont fait défaut dès le premier remboursement ! Une ré-estimation des risques sur les crédits pourrait être nécessaire.

2) La mise en faillite prochaine de New Century souligne la limite pour les banques de se retourner contre les originateurs en cas de hausse des taux de défaut. Tant que la banque n'a pas titrisé le crédit, l'originateur a une obligation de rachat du prêt. Ainsi, du fait que Bank of America, Citigroup, Credit Suisse, Goldman Sachs et Morgan Stanley ont demandé un remboursement des prêts à New Century, la société va devoir se mettre sous la protection de la loi américaine sur les faillites, le fameux chapitre 11 ("chapter eleven"). Les banques supporteront, in fine, le coût de la remontée du taux de défaut sur les subprime mortgages.

3) Pour octroyer de nouveaux prêts, les originateurs n'ont pas suffisamment de fonds propres. Ces originateurs ont été victime de leur succès. Par exemple, New Century, qui n'a que 11 ans d'existence, a accordé pour 59,8 milliards de dollars de crédits en 2006, contre 6,3 milliards cinq ans plus tôt. Il devait donc trouver des financements pour porter les crédits avant de les revendre aux banques. Les banques ont donc ouvert à ces spécialistes des lignes de crédit à court terme : les warehouse lines. La suppression de ces lignes de crédit le 9 mars dernier a obligé New Century Financial à stopper toute offre de nouveaux prêts. De plus, avec la chute des prix sur le marché immobilier et, surtout, la chute des ventes, la valeur des garanties attachées à ces crédits a sensiblement baissé. En début de vie du crédit, les garanties peuvent ainsi se révéler inférieures au montant initial. Face à la crise actuelle, la société ne restera pas isolée. Un credit crunch sur ce marché des subprime mortgages est inévitable à court terme".

Mais une fois planté ce sombre décor, l'économiste se veut rassurant. Certes, le marché des subprimes mortgages a subi une violente correction, mais la contagion reste très limitée. Le véritable risque est psychologique Face à la montée du taux de défaut, les institutions financières pourraient être tentées de ne plus prêter au ménages, provoquant un " credit crunch" qui remettrait en cause le redressement du marché immobilier et amputerait la croissance américaine. On n'en est pas là. " Tant que le marché du travail reste tendu et que les revenus salariaux progressent rapidement, le risque hypothécaire gobal demeure faible, conclut Christian Parisot.

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