La Bourse baisse généralement après les élections présidentielles

Traditionnellement, la Bourse est plutôt baissière après une élection présidentielle à cause de l'incertitude liée à l'installation de la nouvelle équipe et d'un effet saisonnier défavorable. Cette fois-ci, pourtant, elle paraît euphorique! Le point sur les précédents scrutins par un spécialiste de l'historique boursier, Didier Coutton, docteur en sciences de gestion, professeur à l'Istec, consultant et auteur de L'Almanach 2007 des marchés financiers.

La Bourse est légèrement sensible à l'élection présidentielle, car elle enregistre une baisse de 5% environ dans le mois qui suit, mais la tendance générale reprend vite le dessus. Elle a même chuté de 27% dans le mois qui a suivi l'élection inattendue de François Mitterrand en 1981. Ce plongeon, le plus fort enregistré à la Bourse de Paris depuis sa création, est imputable autant à l'effet de surprise qu'au programme du candidat. Cette déprime boursière ne sera pourtant que passagère: le septennat boursier sera euphorique. L'indice va en effet quadrupler entre mai 1981 et mai 1988, soit une augmentation annuelle supérieure à 20% et 6 années consécutives de hausse seulement stoppées par le krach d'octobre 1987! La Bourse n'est pas partisane. Elle est pragmatique.

Si la reprise économique a accompagné le mouvement haussier des périodes postélectorales des années 1988 et 1995, les statistiques tendent à montrer que les 3 à 4 mois qui suivent le scrutin sont plutôt orientés à la baisse. Deux hypothèses peuvent l'expliquer: l'incertitude et l'effet saisonnier.

L'incertitude incite les investisseurs à se mettre à l'abri. Or, les 100 jours d'état de grâce sont une période propice pour lancer les grandes réformes législatives, c'est aussi une période de changements que les investisseurs, plutôt conservateurs, n'apprécient guère. L'effet saisonnier est dicté par la date des élections: mai. Or, les plus mauvais mois boursiers sont en France, comme outre-Atlantique, les mois d'été et plus précisément mai, juin, août et septembre. Autrement dit, la tendance est généralement baissière après une élection présidentielle. Retour sur les précédents scrutins.

1969: Georges Pompidou, Premier ministre, sort largement vainqueur avec 58,2% face à un adversaire du même bord, Alain Poher, président du Sénat. Sa politique est empreinte d'un volontarisme étatique dans la modernisation industrielle du pays. Mais le franc est dévalué en août. La Bourse perd 7% dans l'année qui suit l'élection.

1974: Valéry Giscard d'Estaing, ministre de l'Economie et des Finances, l'emporte de justesse face à François Mitterrand avec 50,8%. Quatre mois avant l'élection, le franc sort du serpent monétaire, la Bourse baisse de 20% avant de les regagner pour l'élection. Mais, avec l'annonce d'un plan de "refroidissement" économique, elle chute à nouveau de 35% dans les quatre mois qui suivent avant de se reprendre. Un an plus tard, elle n'a perdu que 5%, pourtant le prix du baril de pétrole a triplé dans le même temps.

1981: François Mitterrand l'emporte avec une nette avance (51,8%) et un slogan: "La force tranquille" face à Valéry Giscard d'Estaing. C'est la panique à la corbeille, la Bourse plonge de 35% dans les quatre mois qui suivent. Il est vrai que les investisseurs sont refroidis par l'annonce du gouvernement Mauroy de "rompre avec le capitalisme". Elle se redresse néanmoins et termine un an plus tard au même niveau qu'au jour de l'élection.

1988: après le krach d'octobre, où la Bourse perd 40% de sa valeur entre septembre 1987 et février 1988, le marché remonte de 20% avant la réélection sans surprise de François Mitterrand (54% des votes). Un an plus tard, elle a gagné 50%, presque un record.

1995: Jacques Chirac s'impose d'abord devant son "ami de 30 ans", Édouard Balladur, puis face à Lionel Jospin avec 52,8% des voix. Un an après, la hausse est de 15%, c'est le prélude de la bulle Internet, qui se dégonflera à partir de septembre 2000.

2002: après la surprise du premier tour, la réélection de Jacques Chirac (82,1% des votes) n'est frappée d'aucune incertitude. Pourtant, après l'élection, la baisse entamée à partir de l'éclatement de la bulle Internet en septembre 2000 se poursuit en raison de l'inquiétude suscitée par la guerre d'Irak. L'indice baisse de 30% en un an.

L'élection présidentielle de cette année n'aura probablement guère plus d'effets sur la Bourse que les précédentes. Cependant, les investisseurs doivent rester prudents, la baisse des bénéfices des entreprises et les risques du marché immobilier pourraient bien déstabiliser les marchés dans le semestre à venir. D'autant que la Bourse vient de connaître quatre années consécutives de hausse et qu'il est rare de voir se renouveler cette performance une cinquième fois.

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