Les entreprises au service du développement

L'aide au développement des pays riches a reculé en 2006 pour la première fois depuis dix ans. Un colloque organisé par l'ONG française SOS Sahel au Sénat s'est interrogé sur la contribution des entreprises à l'aide au développement.

Quel rôle les entreprises peuvent elles jouer dans le développement de l'Afrique ? Comment coordonner leur action avec celles des bailleurs de fonds ? C'est à ces réponses que la conférence organisée par SOS Sahel au Sénat en début de semaine a tenté de répondre. Les entreprises présentent en Afrique, au-delà des richesses qu'elles contribuent à créer, peuvent concrètement participer au développement du continent africain. La ville de Lyon a ainsi noué un partenariat original avec Veolia dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.

La communauté urbaine de Lyon souhaitait être un acteur des objectifs de développement du millénaire adoptés par l'Onu, notamment en participant à la réduction de moitié de la proportion de personnes n'ayant pas accès à l'eau potable d'ici 2015. Grand Lyon a donc créé en 2002, en partenariat avec Veolia, un fonds de solidarité pour l'eau et le développement. Ce fonds alimenté à hauteur de 600.000 euros par an permet de finance une dizaine de projets par an en Afrique. La demande doit provenir des autorités locales et impliquer les populations.

Pour autant, "l'aide publique au développement reste indispensable", rappelle Salifou Ouedraogo, directeur exécutif de Sos Sahel au Burkina Faso. Dans ce pays enclavé d'Afrique de l'Ouest, l'un des plus pauvres du monde, 45% de la population continue de vivre avec moins d'un dollar par jour. Et, l'on ne compte qu'un médecin pour 100.000 habitants. Les entreprises ne peuvent donc en aucun cas se substituer à l'aide des pays riches.

L'aide au développement à destination de l'Afrique a encore augmenté de 23% l'an dernier à 28 milliards de dollars. Mais il s'agit d'une hausse en trompe l'oeil qui s'explique presque exclusivement par les annulations de dettes accordées aux pays africains. Les acteurs du développement continuent de déplorer l'absence de coordination des bailleurs de fonds. Chaque bailleur à ses priorités, ses propres procédures, si bien que certains ministres des finances africains consacrent plus de temps à gérer les exigences des différents bailleurs qu'à leur travail.

Un exemple ? Sos Sahel a réussi à convaincre plusieurs communautés villageoises de construire des barrières contre l'avancée du désert afin de protéger leurs cultures, raconte Salifou Ouedraogo. La coopération allemande poursuit le même but mais paye pour cela les communautés villageoises pour construire ces barrières déresponsabilisant du même coup les villageois. Il arrive aussi parfois que les priorités des bailleurs de fonds ne soient pas celles du pays récipiendaires.

François Jay, le directeur général de coopération 92, une société d'économie-mixte des Hauts de Seine engagée dans des projets de développement en Afrique, explique ce manque de coordination par la nature atypique des organisations de développement. "Ceux qui donnent l'argent ne sont pas ceux qui en bénéficient ce qui fait du développement une activité très particulière, explique-t-il. Une partie légitime du métier de tous les acteurs de la coopération est de faire connaître son action. La pérennité de l'organisation en dépend".

Le Vice-président de Bolloré, Michel Roussin, déplore pour sa part le manque de coordination entre la sphère privée et publique en Afrique. L'ancien ministre stigmatise notamment "l'échec" du Nepad. Lancé en 2001 lors du sommet de chefs d'Etat africains de Lusaka (Zambie) le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique avait pour ambition de mettre le secteur privé au coeur du développement du continent. "Pourtant, le Medef n'a jamais été sollicité une seule fois depuis le lancement de cette initiative sur ces projets en Afrique", regrette Michel Roussin. Malgré certaines avancées, le climat des affaires reste "difficile" en Afrique.

L'ancien ministre de la coopération regrette aussi le manque de réflexion sur la capacité d'absorption des Etats récipiendaires de l'aide. "Cela peut sembler ahurissant, mais on a beaucoup de mal à utiliser l'ensemble de l'aide européenne (23 milliards d'euros sur la période 2000-2005)", souligne Michel Roussin. Dans une logique de responsabilisation des bénéficiaires, de plus en plus de bailleurs préfèrent confier l'argent aux Etats plutôt que de financer des projets précis. Malheureusement, estime Michel Roussin, "l'aide budgétaire est devenue la forme institutionnalisée de la politique des fins de mois".

Faut il suspendre l'aide aux régimes corrompus ou non démocratiques ? Pour Salifou Ouedraogo "l'aide doit continuer". Car les premières victimes d'un boycott ne sont pas les régimes en place mais les populations. "L'une des possibilités est de participer à des projets identifiés par la population", ajoute Michel Roussin.

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