Gains en janvier, blé au grenier !

Didier Coutton, docteur es sciences de gestion et auteur de l'Almanach 2007 des marchés financiers, analyse les statistiques boursières des mois de janvier. Et se livre au difficile exercice des pronostics de début d'année: il invite à la prudence...

Gains en janvier, blé au grenier!

Cet adage voudrait signifier que la hausse en janvier se poursuit toute l'année. Or, à l'aube d'une année boursière, il est impossible d'échapper au terrible jeu des pronostics. Le nôtre est baissier et invite à la prudence. Cette prévision va à l'encontre de la majorité de celles formulées par les analystes et les opérateurs, qui ne la verront probablement pas d'un bon oeil. Il est vrai qu'en matière de prévisions, des recherches universitaires montrent que nous souffrons tous d'un biais comportemental, qui nous conduit à pécher par excès d'optimisme: les financiers n'y échappent pas.

Notre anticipation baissière ne repose ni sur une sérieuse étude de la conjoncture économique, ni sur un pessimisme exacerbé, mais sur la simple observation du passé.

L'année 2006 clôture un cycle de quatre années consécutives de hausse: 2003 (16,1%), 2004 (7,4%) et 2005 (23,4%). Or, depuis sa création en 1988, le CAC 40 n'a jamais connu cinq années successives de hausse. Avec seulement 19 ans de recul, l'analyse peut paraître sommaire, mais depuis 1856, les statistiques de la Bourse française ne font apparaître que cinq périodes de cinq années ou plus de hausse. Leur singularité est de précéder ou de suivre une crise majeure: 1877-1881 avec la crise boursière de 1882; 1908-1912 avec la crise russo-japonaise et le tremblement de terre de San Francisco (1907); 1922-1928 avec la crise de 1929; 1951-1957 avec la spéculation sur le franc (1958); 1982-1986 avec les chocs pétroliers. Toute la question est de savoir si l'éclatement de la bulle Internet, qui a précédé cette phase haussière, est le résultat d'une crise. Si tel est le cas, le marché aurait alors un potentiel de hausse.

L'anticipation de la tendance est peut-être à chercher dans la performance du mois de janvier, qui est statistiquement un excellent indicateur de la tonalité boursière de l'année. En effet, depuis 1988, le premier mois boursier imprime la tendance dans 80% des cas (15 fois en 19 ans). Aux Etats-Unis, c'est même vrai 9 fois sur 10 depuis 1950. Les exceptions à la règle s'expliquent par des événements économiques ou géopolitiques dans les mois qui précèdent ou suivent le mois de janvier de l'année en question: krach d'octobre 1987 (1988), création du marché européen des douze (1993), incertitude économique (1994), attentats du 11 septembre (2001) et guerre d'Irak (2003).

Si l'année 2007 ne connaît pas de bouleversements significatifs ou de catastrophes naturelles majeures, le baromètre de janvier a de grandes chances de donner la tendance de l'année. Et, à moins d'une surprise comme en 1981, où le marché a perdu 13% au lendemain de l'élection de François Mitterrand et 22% en 5 séances, l'élection présidentielle n'aura qu'une incidence modérée sur la tendance lourde de l'année.

La performance des cinq premières séances de l'année est aussi un indicateur de tendance intéressant, car depuis 1988 elle donne le sens de la performance annuelle dans 80% des cas. La même analyse conduite sur l'indice Dow Jones depuis 1970 aboutit à la même conclusion avec un taux de réussite de 85,7%. Janvier est donc à surveiller de près.

Voilà aussi la justification de notre maxime: Gains en janvier, blé au grenier!


Retrouvez les statistiques complètes, les anomalies et les curiosités boursières dans l'Almanach 2007 des Marchés Financiers (Valor Editions) et des informations sur le site www.amf-almanach.com.

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