Range Rover Evoque : Look d’enfer, luxe et baroud

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1427  mots
Ce petit Range Rover est un formidable succès. Chic, « glamour », ce baroudeur compact hante surtout les beaux quartiers. Séduisant, il est malheureusement très cher !

Carré, agressif, trapu, original, le Range Rover Evoque interpelle. Provocateur ? Sans doute. En tous cas, il ne passe pas inaperçu. Pour une fois qu'une voiture a une personnalité pareille, loin de l'improbable style consensuel américano-coréano-nippon insipide et interchangeable, nous, on applaudit ! Ce Baby Range massif, relativement haut et large mais très compact en longueur (plus petit qu'un Renault Koleos ou qu'un Volkswagen Tiguan), a l'air d'un énorme engin, alors qu'il reste en fait très sage dans ses mensurations. Bel effet visuel. 

Super raffiné 

Evidemment, avec sa ceinture de caisse très haute et son faible vitrage, le Range Evoque n'est pas lumineux et la rétrovision apparaît dangereuse tant la lunette arrière est minuscule... Mais, bon, pour une fois, on accepte de sacrifier certains aspects au design…. A l'intérieur, on retrouve un salon cossu, avec des matériaux assez soignés, des formes élégantes, un choix de coloris chauds et raffinés - sauf le noir, certes. Cuir, aluminium, une belle réussite, renvoyant les rivaux asiatiques au rôle de transport de troupes !

Mais il y a des choses qui agacent. L'écran tactile comporte trop de sous-menus fouillis, l'affichage personnalisable s'efface à chaque remise en route au profit de la page standard et le bouton rotatif pour la boîte auto escamotable à l'arrêt est nettement moins pratique qu'un vrai levier. Mais, ne chipotons pas, l'ensemble, pas forcément pratique, ne manque pas d'originalité. Et quelle classe !

 

Quelques "bugs"

La qualité perçue est bonne, mais elle n'égale pas  tout-à-fait celle des allemandes. Notons avec satisfaction l'absence de grincements et crissements de mobilier ou de suspensions, même sur très mauvaise route. En revanche, nous avons subi un « bug » exaspérant à plusieurs reprises. Pour faciliter l'entrée et la sortie du véhicule, le siège conducteur s'éloigne automatiquement du volant à l'arrêt et reprend sa position initiale au démarrage… en principe. Car, il ne revient pas toujours en position initiale, voire devient « fou », et il faut alors recommencer les réglages.

L'accès sans clé manque aussi de sensibilité. On a beau appuyer les doigts contre la poignée, la portière ne se verrouille pas toujours au premier ni même au deuxième coup. Irritant aussi. Nous serons par ailleurs critiques sur la faible habitabilité à l'arrière et la médiocre accessibilité. Le coffre n'est pas non plus familial. Bref, ce n'est pas une grande voiture à l'intérieur, ce qui est d'ailleurs logique vu sa faible longueur.

 

Boîte auto pas assez réactive

Le moteur diesel de 2,2 litres de cylindrée est une vieille connaissance. Issu de la coopération entre Ford (ancien actionnaire de la marque Land Rover) et PSA, c'est globalement celui qu'on retrouve sur les Peugeot 508 et Citroën C5. Il est doux, linéaire et performant. Il se révèle toutefois assez bruyant et n'émet évidemment pas la douce sonorité rauque d'un six cylindres. Si la vivacité n'est pas critiquable en soi, les reprises à bas régime sont marquées par un... trou.

La transmission automatique semble hésiter en cas de relance  au-dessous de 1.500 tours et la voiture s'ébroue avec un décalage. Pendant quelques secondes, on a l'impression que la mécanique n'a pas compris l'injonction du conducteur. A part ce trou gênant en ville, la combinaison moteur-transmission automatique est plutôt plaisante et efficace, à condition de placer la molette en position « S » (pour Sport). Le mode « D » est trop lymphatique. En « S », l'ensemble se montre réactif à la descente des rapports, avec une belle propension à rétrograder automatiquement au coup de frein avant un virage. Contrepartie : c'est parfois assez brutal.

Suspensions souples 

La plate-forme est aussi d'origine Ford. C'est celle de la compacte Focus, une excellente base au demeurant. Les suspensions sont un peu déconcertantes avec la monte pneumatique « standard ». La caisse semble se vautrer dans les virages. En fait, ce n'est qu'une impression, car l'Evoque s'accroche bien au bitume et se montre sûr. Mais il faut s'habituer à ce côté un rien « paquebot ». A cause du poids (1,7 tonne) et d'un centre de gravité haut.

Notre version d'essai Dynamic avec l'option « Black Design Pack » était équipée d'énormes roues de 20 pouces avec des pneus très larges aux flancs ultra-bas. Cette monte sportive améliore indéniablement la tenue de la caisse en virage. Mais c'est son seul avantage ! Pour le reste, cette monte pneumatique fragile et très onéreuse à remplacer apporte un inconvénient de taille, à savoir un confort dégradé. Dommage. Car, sinon, le confort - sauf à basse vitesse - est l'une des caractéristiques de l'Evoque ! 

Un vrai aventurier 

Ce Range Rover Evoque nous a globalement séduits. Même si la mécanique et les trains roulants ne sont pas au niveau des meilleurs. Cet anglais peut être défini par la légendaire figure du colonel de l'Armée des Indes, gentleman dans les clubs et aventurier dans l'âme. Car ce Range se montre à la hauteur en tout-terrain - sauf avec la monte pneumatique de notre modèle de test qui diminue les aptitudes baroudeuses de l'engin !…

Avec des pneus normaux, essayés par ailleurs, il ne déparera pas l'image de la marque créée en 1948. Grâce aux réglages électroniques propres à chaque type d'utilisation, avec des hauteurs de caisse variables. Seul hic : qui risquera un si bel engin dans la boue ou la caillasse? A propos d'Armée des Indes, la marque Land Rover (dont la gamme Range fait partie) et sa sœur Jaguar, fleurons britanniques, sont la propriété de… l'indien Tata. Ironie de l'histoire. 

Très cher 

Au fond, le plus gros défaut de l'Evoque, c'est son prix, très élevé par rapport à l'habitabilité. Même s'il est mieux équipé, il se révèle plus onéreux qu'une Audi ou BMW concurrente ! Il est vrai que les prestations hors bitume du Range sont autrement plus sérieuses. Notre version sportive Dynamic SD4 automatique est à 49.000 euros ! Et, comme chez Audi ou BMW, les options sont nombreuses et dispendieuses. La nouvelle option « Black Design Pack » optionnelle sur la version Dynamic et qui équipait le modèle que nous avions en test coûte 3.030 euros.

Avec ses jantes noires énormes de 20 pouces et tous les chromes remplacés par du plastique noir, elle transforme l'Evoque en engin genre « voyou méchant », un style très à la mode - ça en dit long sur l'état de déliquescence morale de notre société ! Pour ceux qui ne rêvent pas de passer pour un chef maffieux adjoint (les chefs roulent, eux, en Porsche Cayenne ou en Range « Full Size »), il y a là une économie à réaliser !

 TD4 Pure plus raisonnable

Conseillons pour notre part l'Evoque TD4 (150 chevaux) à boîte auto en finition de base Pure, avec des jantes sages de 17 pouces seulement et moins de gadgets, donc moins de sources de dysfonctionnements potentiels. Il en coûte 37.650 euros, auxquels il faut ajouter 620 euros pour les sièges en cuir. C'est plus raisonnable, même si le prix ne semble pas un handicap pour la diffusion de cet Evoque, très prisé, et que les clients achètent surtout dans des versions haut de gamme...  Négligeons en revanche l'offre de base à 33.500 euros à simple traction avant, indigne d'un véhicule du spécialiste légendaire des 4x4. A signaler : pour 1.000 euros de… plus, on vous enlève deux portières ! L'Evoque se retrouve ainsi grimé en (faux) coupé, quasi-inaccessible aux places arrière. Pour les amateurs d'insolite.

 On ne se consolera pas des tarifs salés avec les consommations… tout aussi élevées. Nous avons absorbé 10,3 litres de gazole aux cents durant l'essai. Une BMW 320d GT, d'un poids équivalent, sans quatre roues motrices mais autrement plus habitable, avait consommé quasiment trois litres de moins il y a quelques semaines !

Prix du modèle d'essai : Range Rover Evoque SD4 Dynamic bva : 49.000 euros (+1.500 euros de malus)

Puissance du moteur : 190 chevaux (diesel) 

Dimensions : 4,35 mètres (long) x 1,96 (large) x 1,63 (haut) 

Qualités : Forte personnalité, ligne réussie, intérieur « so British » raffiné et élégant, prestations générales satisfaisantes, bonne tenue en tout-terrain, agrément mécanique global…

Défauts : … sauf « trou » en reprises à bas régime, consommation et prix élevés, habitabilité et accessibilité arrière réduites, mauvaise rétrovision, « bugs » électroniques

Concurrents : BMW X1 2,0d X Drive Executive auto: 42.900 euros ; Audi Q3 2,0 TDi 177 S Tronic S Line : 43.200 euros

Note : 14,5 sur 20