Chine : les marchés ont-ils vraiment cédé à la panique ?

Par Sarah Belhadi  |   |  827  mots
Lundi 24 août, le plongeon de la bourse chinoise a entraîné dans sa chute l'ensemble des places financières mondiales.
Au lendemain d'un lundi noir ce 24 août, la tempête boursière s'est calmée sur le Vieux Continent et aux Etats-Unis, ce mardi, après l'annonce d'une baisse des taux d'intérêt par la banque centrale chinoise. Pour beaucoup d'analystes, la panique des marchés qui se sont offert un lundi noir estival est une surréaction exagérée.

Un lundi noir. Une succession de mauvais résultats d'entreprises. La dégringolade. Inquiets d'une éventuelle contagion d'un ralentissement de l'économie chinoise au reste du monde, les investisseurs ont cédé à la panique lundi 24 août. Certains commentateurs du spectacle décrivaient hier un "bain de sang" rappelant les pires heures du krach boursier de 2008.

La Bourse chinoise, qui montrait des signes de faiblesse depuis plusieurs semaines, a accusé alors sa plus forte baisse depuis huit ans, avec une chute de 8,75%, qui s'est poursuivie ce mardi. Les autres places boursières asiatiques ont suivi : Tokyo, Hong-Kong, Singapour, Séoul, Taiwan. Puis la dégringolade se transforme en épidémie mondiale. Les places européennes ont chuté de plus de 5%. A Paris, la Bourse termine alors sur une baisse de 5,35% à 4383,46 points. Le CAC 40 perd même plus de 8% en séance avant de se reprendre en fin de journée. A Francfort, le DAX accuse, quant à lui, son plus fort recul en pourcentage sur une séance depuis novembre 2011, avec une baisse à la clôture de 4,70% à 9648,43 points.

Le vent de panique emporte ensuite les Etats-Unis. L'indice Dow Jones vacille, et enregistre la plus forte baisse en valeur de son histoire, perdant jusqu'à 1.089 points (-6,6%). Il se reprend mais rechute. En fin de journée, il perd 588 points, soit 3,58%, et enregistre son pire déclin en séance depuis août 2011.

La conjoncture, source d'anxiété

Ce stress financier, communiqué par l'empire du Milieu, était-il démesuré ce lundi 24 août ? Dans une note de La Financière de l'Échiquier en date du 24 août, Marc Craquelin, directeur de la gestion d'actifs, explique que "l'inquiétude des marchés n'est pas irrationnelle : la Chine représente à elle seule 13% du PIB mondial et 30% du PIB du monde émergent".

Il y a quelques jours, les mauvais résultats du secteur manufacturier chinois ont également contribué à l'inquiétude des marchés : "l'économie du pays multiplie les signaux de fragilité. Dernier en date : la publication d'un indice PMI manufacturier chinois en baisse de 0,7 point à 47,1, sont plus bas niveau depuis 2009", détaille Marc Craquelin.

Mais le coup de grâce a-t-il été porté le 11 août par Pékin ? La banque centrale de Chine annonce une dévaluation du yuan de 2%. Dès le lendemain, elle abaisse de nouveau le taux-pivot du renminbi. C'est la plus grosse dévaluation de la monnaie chinoise en dix ans. Elle vise à relancer les exportations du pays en baisse de 8,3% en juillet et à envoyer un signal positif au FMI qui doit prochainement statuer sur l'intégration du yuan dans les droits de tirage spéciaux (DTS). Mais l'annonce rend alors les marchés nerveux.

"La baisse pilotée du yuan, si elle est justifiée au regard de la baisse des devises émergentes, a créé un mouvement de panique sur les marchés mondiaux", note La Financière de l'Échiquier".

Une chute des indices boursiers relative ?

Pour certains, en dépit de la conjoncture macro-économique, cette chute des indices est toutefois à relativiser."En toile de fond, nous avions des marchés survalorisés, en lévitation, sur les plus hauts annuels en pleine période estivale alors que les matières premières indiquent un ralentissement global que la Chine et les émergents commencent à matérialiser", explique CMC Markets France dans une note du 25 août. Cette baisse brutale pourrait être uniquement le résultat d'une correction technique :

"Depuis le mois de mai, les indices boursiers DAX, CAC 40, SP500 et Nikkei avaient réalisé des mouvement haussiers anthologiques (...). Il se pourrait tout simplement que la chute des bourses en cette fin de mois d'août soit un "accident baissier" estival, une correction violente due au manque de liquidités ce qui a accéléré le mouvement", détaille CMC Markets France.

La Banque centrale chinoise stoppe l'hémorragie, enfin presque

Ce mardi matin, les mesures annoncées par Pékin ont permis de rassurer les marchés européens. La banque centrale de Chine (PBOC) a annoncé une nouvelle baisse de ses taux d'intérêt, pour la cinquième fois depuis novembre, tout en réduisant encore les ratios de réserves obligatoires des banques. Peu après l'ouverture de 9h00, la Bourse de Paris gagne alors 1,42%, Francfort 1,74% et Londres 1,49%. De l'autre coté de l'Atlantique, le calme est revenu. Et Wall Street reprend des couleurs : le Dow Jones reprend 2,13%, le Nasdaq de 2,65%.

En fin de journée, la reprise européenne se confirme : Londres finit en hausse de 3,9%, Amsterdam 4%, Bruxelles 4,11%. Rebond confirmé aussi pour le DAX qui clôture sur un bond de 4,97%. Paris reprend aussi ses esprits avec une hausse de 4,14% en fin de journée.

Mais en Asie, la tempête se poursuit en Chine. Les places boursières asiatiques se sont redressées sauf la Bourse de Shanghai qui a encore clôturé ce mardi sur un plongeon de plus de 7%, après une chute de 8,5% la veille.