La livre turque en chute libre

Par Estelle Nguyen  |   |  537  mots
Déjà à l'agonie depuis plusieurs jours, la devise turque s'est effondrée de 19% par rapport au dollar sur la journée de vendredi. (Crédits : Umit Bektas)
La livre turque (TRY) a brutalement dégringolé, perdant plus de 19% de sa valeur sur la journée du vendredi 6 août. Les déclarations du président Erdogan et la hausse des droits de douane décidés par le président Trump ont provoqué un nouveau krach.

C'est son plus bas niveau historique à ce jour. La livre turque, déjà à l'agonie depuis quelques jours, s'est effondrée de 19% par rapport au dollar sur la journée. La devise, qui perdu près de 40% de sa valeur par rapport au billet vert, s'échangeait à 6,6 livres environ contre un dollar à 13h35 GMT. Cette chute spectaculaire survient après l'annonce du président américain Donald Trump d'une forte augmentation des taxes à l'importation sur l'acier et l'aluminium turcs.

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« Je viens juste d'autoriser le doublement des taxes douanières sur l'acier et l'aluminium en provenance de Turquie puisque leur monnaie, la livre turque, descend rapidement contre notre dollar fort ! L'aluminium sera désormais taxé à hauteur de 20% et l'acier 50%%. Nos relations avec la Turquie ne sont pas bonnes en ce moment ! » a tweeté le président Trump ce vendredi 10 août

Face à cette situation, le président turc Recep Tayyip Erdogan a appelé ses concitoyens à la « lutte nationale », en leur demandant d'échanger leurs devises étrangères pour soutenir leur monnaie. Mais son appel n'a eu que pour effet d'intensifier la chute de la livre.

« Avec l'aide de Dieu, nous allons surmonter ces catastrophes et, de plus, nous mènerons avec succès la guerre économique », a assuré le dirigeant turc à l'agence de presse étatique Anadolu.

Cet effondrement qui pousse la Turquie vers une crise monétaire survient sur fond de fortes tensions diplomatiques entre les deux pays. La Turquie est en effet embourbée dans une grave crise diplomatique avec les États-Unis, au sujet d'Andrew Brunson, un pasteur américain accusé par les autorités turques de terrorisme et d'espionnage, détenu par Ankara.

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(Un graphique de notre partenaire Statista. Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

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Les banques européennes sous pression

Selon le Financial Times, l'inquiétude a dépassé les frontières turques. Le quotidien économique a en effet affirmé vendredi que la Banque centrale européenne (BCE) se disait préoccupée par l'exposition de certains acteurs à la Turquie. Le régulateur craint que certains emprunteurs ne soient pas couverts contre la baisse de la livre turque et commencent à faire défaut sur des emprunts en devises. Ces crédits représentent jusqu'à 40% des actifs du secteur bancaire turc, souligne le journal économique anglais.

« Les investisseurs voyaient la crise monétaire en Turquie comme un problème local. Cependant, il semble que la rapidité de la chute [de la livre] renforce les inquiétudes d'une possible exposition de banques européennes au système bancaire turc » explique Michael Hewson, analyste de CMC Markets, à l'AFP.

La chute du livre turque a bien pesé sur le secteur bancaire. De Londres à Francfort en passant par Paris, l'indice des valeurs bancaires européennes perd 3%. Quasiment tous les établissements sont dans le rouge, avec BNP Paribas (-3,7%), ING (-3,8%), UniCredit (-3,8%), Deutsche Bank (-4%) et BBVA (-5%) qui signent les plus fortes baisses.

(avec agences)