Nous les femmes

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Péters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job

La question des femmes agite de nouveau le landernau médiatique : débats sur la parité, prix récompensant la place des femmes dans l'économie (« La Tribune » décernera le sien le 8 novembre prochain) et bien sûr le rendez-vous normand du Women's Forum de Deauville qui se tenait fin de semaine dernière. 1.200 femmes venues témoigner d'un tournant. Les choses avancent....On est plus lucide sur ce qui bloque les femmes dans leur ascension. Mais un élément reste dans l'ombre. Celui revenu en boucle dans mes interviews des dirigeantes nominées par « La Tribune » : le manque d'estime de soi. « Jamais un homme ne refusera une promotion parce qu'il ne se croit pas compétent pour le poste, une femme si. Les femmes ont tendance à se sous-estimer », note Brigitte Liberman, vice-présidente de la division cosmétique active de L'Oréal. « On a tellement été habitué à ne pas être mise en avant que l'on croit que c'est normal. Nous aussi nous devons faire valoir nos réussites dans notre business », défend Nazan Erol, la dirigeante de Turkish Airlines en France. Jusqu'à Christine Lagarde qui s'interroge dans les médias sur ses qualités de Premier ministre ! Et toutes de souligner qu'il faut envers et contre tout se respecter. Se respecter ? C'est justement l'un des ingrédients incontournables d'une bonne estime de soi. Celle-ci s'actualise dans la fidélité à soi-même c'est-à-dire dans le fait d'agir conformément à ce qui revêt de l'importance à ses yeux. Chaque fois que nous choisissons de nous assumer en acceptant d'en porter les conséquences, notre estime s'en trouve rehaussée. Or souvent piégées par notre capacité de séduction et notre désir de ne fâcher personne, en nous adaptant parfois plus qu'il ne faudrait, en faisant preuve d'honnêteté, nous nous coupons l'herbe sous les pieds. On pense toujours qu'on pourrait mieux faire, en se posant sans cesse des questions.

Leur pire ennemi

La faute aussi à un sens aigu des responsabilités et du perfectionnisme. « Si je n?ai pas eu le poste c'est que c'est de ma faute », « Si mon équipe a de mauvais résultats, c'est que je n'ai pas su faire », autant de petites phrases qui vrillent l'estime de soi. Celle-ci étant fondée sur l'opinion que nous avons de nous-mêmes, les femmes sont souvent leur pire ennemi en la matière. « Les discours ont évolué mais les filles sont encore prises dans des systèmes d'inhibitions et restent prisonnières de ce qu'il convient de jouer », constate le chercheur Renaud Redien-Collot, président du conseil scientifique de Women Equity for Growth. Et de rappeler que l'enjeu de l'estime de soi prend racine dans le roman anglais, chantre de la « modesty » : « Relisez Jane Austen, ?le non? soi était une qualité féminine. Il fallait être discrète et effacée. Aujourd'hui lorsque l'on demande aux femmes de s'affirmer, elles se retrouvent coincées dans l'injonction paradoxale d'être modestes tout en sachant se mettre en valeur. » On a du coup développé des compétences appréciées en entreprise : on recueille des avis, on organise, on travaille en équipe, bref on fait du management participatif.

Dans ce domaine le manque d'assurance se révèle être un atout qui confère un ego moins surdimensionné et pousse à être plus consensuelle. S'intéresser aux individus : serait-ce la voie choisie par les femmes pour grandir en estime de soi et en confiance ? Signe des temps : au Women's Forum, les dirigeantes s'affichaient moins en tailleur pantalon qu'en jupe et escarpins vertigineux. Féminité assumée et désir affiché d'un partage plus égalitaire du pouvoir. Un changement de look qui parle aussi de respect de soi.

 

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