Accord à l'Opep sur une modeste hausse de la production

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Accord a l'opep sur une modeste hausse de la production[reuters.com]
(Crédits : Heinz-Peter Bader)

par Rania El Gamal, Alex Lawler et Shadia Nasralla

VIENNE (Reuters) - L'Opep a conclu vendredi un accord prévoyant un modeste relèvement de la production de pétrole à compter de juillet, mais cet accord ne devrait pas être suffisant pour compenser la baisse attendue des exportations du Venezuela et de l'Iran.

Les marchés ont été déstabilisés par le manque de clarté concernant les objectifs visés de hausse de la production et les cours du baril de brut ont gagné jusqu'à 3%.

"J'espère que l'Opep va augmenter sensiblement la production. Il faut faire baisser les prix!" a écrit le président américain Donald Trump dans un tweet moins d'une heure après l'annonce de la décision de l'Opep.

De grands consommateurs de pétrole comme les Etats-Unis, la Chine et l'Inde appellent à une hausse des quotas de production afin de faire baisser les prix et éviter le risque d'une pénurie qui pourrait affecter la croissance de l'économie mondiale.

L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a annoncé dans un communiqué un retour au respect à 100% de l'accord de réduction de la production signé l'an dernier mais n'a donné aucun chiffre concret sur le relèvement prévu.

L'Arabie saoudite a dit que le cartel et ses alliés, y compris la Russie, dit Opep+, s'étaient entendus sur une augmentation d'environ un million de barils par jour (bpj) de la production, représentant environ 1% de l'offre mondiale.

Ce relèvement de la production est nominal. L'augmentation réelle devrait être plus limitée dans la mesure où plusieurs pays, qui ont récemment produit moins de pétrole que prévu, auront du mal à retrouver leurs quotas de production tandis que d'autres ne seront pas autorisés à combler l'écart.

Le ministre iranien du Pétrole, Bijan Zanganeh, a précisé que la production augmenterait en fait de moins de 700.000 bpj. L'Irak a dit que la hausse effective serait d'environ 770.000 bpj. Cet accord équivaut à un feu vert tacite donné à l'Arabie saoudite pour dépasser son quota, dans la mesure où le cartel n'a pas fixé de nouveaux quotas par chacun des 14 pays membres.

L'IRAN REFUSE DE CÉDER À LA PRESSION US

L'Iran, troisième producteur de l'Opep, avait invité le cartel à ne pas céder à la pression de Trump pour augmenter les extractions, soulignant que les sanctions de Washington étaient à l'origine de la récente hausse des cours du pétrole.

La Maison blanche a imposé de nouvelles sanctions contre l'Iran en mai et les experts estiment que la production iranienne diminuera d'un tiers d'ici la fin de l'année. Un accord sur une hausse des pompages n'est donc d'aucune utilité pour Téhéran, à l'inverse de Ryad.

Le ministre saoudien de l'Energie, Khalid al Falih, semble cependant avoir convaincu son homologue iranien Bijan Zanganeh de soutenir la proposition d'un relèvement des extractions quelques heures avant la réunion de l'Opep de vendredi.

L'an dernier, l'Opep et ses alliés ont signé un accord dit Opep+, réduisant la production cumulée des participants de 1,8 million de barils par jour pour désengorger le marché mondial.

Cet accord a contribué à faire remonter le cours du Brent autour de 73 dollars le baril contre 27 dollars en 2016.

Mais les perturbations survenues au Venezuela, en Libye et en Angola ont retiré du marché environ 2,8 millions de bpj ces derniers mois.

L'accord conclu vendredi avait déjà été largement intégré dans les cours et a été jugé insuffisant.

"Ce sera suffisant pour le moment mais pas assez pour le quatrième trimestre pour faire face à une baisse des exportations iraniennes et vénézuéliennes", a déclaré Gary Ross, directeur d'études sur le pétrole chez S&P Global.

"Il n'y a pas beaucoup de capacités inutilisées dans le monde: si nous perdons un million de bpj de production du Venezuela et de l'Iran au quatrième trimestre, d'où viendront tous ces barils? s'est-il interrogé. "Nous sommes partis pour avoir des prix élevés pendant plus longtemps."

RISQUE DE PÉNURIE

Khalid al Falih a noté que le monde pourrait être confronté à un déficit d'approvisionnement pouvant atteindre 1,8 million de bpj dans la deuxième moitié de 2018 et que la responsabilité de l'Opep était de répondre aux inquiétudes des consommateurs.

"Nous voulons éviter la pénurie et la contraction que nous avons constatées en 2007-2008", a-t-il déclaré, faisant référence à la période où le baril était monté jusqu'à près de 150 dollars.

L'accord de l'Opep est basé sur l'idée de revenir au respect à 100% des quotas fixés, alors que la production des pays participants est actuellement supérieure de 40-50% à ces objectifs, pour compenser notamment les perturbations de la production au Venezuela, en Libye et en Angola.

Selon Bijan Zanganeh, si l'Opep revenait à un respect à 100% des quotas, le cartel n'augmenterait plus sa production que d'environ 460.000 bpj. L'Iran s'est opposé à ce que les membres disposant de capacités supplémentaires comme l'Arabie saoudite comblent l'écart de production du Venezuela.

"Tant l'Arabie saoudite que l'Iran peuvent montrer qu'ils ont gagné", a conclu un délégué de l'Opep.

Les producteurs Opep et non-Opep doivent se réunir samedi pour fixer les derniers détails de l'accord, puis en septembre pour faire le point. La prochaine réunion formelle de l'Opep est prévue le 3 décembre.

(Avec les contributions d'Ahmad Ghaddar, Ernest Scheyder et Vladimir Soldatkine, Claude Chendjou pour le service français, édité par Juliette Rouillon)