Juncker invite l’Union européenne à devenir un acteur global

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(Crédits : Vincent Kessler)

par Gilbert Reilhac

STRASBOURG (Reuters) - Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a exhorté mercredi les Etats à renforcer les capacités d'action de l'Union européenne pour que celle-ci joue pleinement son rôle d'acteur global sur la scène internationale.

A huit mois des élections européennes, l'ancien Premier ministre luxembourgeois, qui prononçait son dernier « discours sur l'Etat de l'Union » devant le Parlement européen à Strasbourg, a estimé que les peuples européens, de plus en plus tentés par les mouvements populistes et anti-européens, demandaient des résultats et non des « demi-mesures ».

« Les alliances d'aujourd'hui ne seront peut-être plus les alliances de demain », a-t-il dit dans une allusion à la prise de distance des Etats-Unis vis-à-vis de plusieurs instances multilatérales.

« Le monde d'aujourd'hui a besoin d'une Europe forte et unie" », a ajouté Jean-Claude Juncker, estimant que l'Europe ne pouvait se contenter d'être un « payeur global ». « Nous devons devenir davantage un acteur global ».

« L'heure de la souveraineté européenne a définitivement sonné », a-t-il encore affirmé, invitant les Etats à avancer rapidement dans la construction d'une Europe de la Défense mais aussi dans leur capacité à parler d'une même voix sur la scène internationale.

"Ne retombons plus jamais dans l'incohérence des diplomaties nationales concurrentes et parallèles", a-t-il dit en proposant que le Conseil des ministres des Affaires étrangères prenne ses décisions à la majorité qualifiée dans des domaines précis : droits de l'Homme ou missions civiles.

"ABERRANT"

Le président de la Commission a également annoncé des initiatives pour renforcer le statut de l'euro comme monnaie mondiale, à commencer par un renforcement de l'Union économique et monétaire.

"Il est aberrant que l'Europe règle 80% de sa facture d'importation d'énergie, qui s'élève à 300 milliards d'euros par an, en dollars américains alors que 2% seulement de nos importations d'énergie proviennent des Etats-Unis", a-t-il souligné.

Jean-Claude Juncker a encore estimé que l'UE devait définir de manière « irrévocable » son attitude vis-à-vis des Balkans occidentaux (les pays de l'ex-Yougoslavie et l'Albanie, candidats à l'adhésion), « autrement, d'autres se chargeront de façonner notre voisinage immédiat ».

Sur le plan intérieur, le président de la Commission a proposé que la lutte contre le terrorisme soit ajoutée au mandat du parquet européen qui coordonne la coopération judiciaire entre les Etats.

Evoquant la politique migratoire comme un relatif succès du fait de la baisse des arrivées sur les côtes méditerranéennes et du sauvetage de « 690.000 vies en mer depuis 2015 », il a proposé de porter à 10.000 le nombre de garde-côtes européens d'ici 2020 (contre 1.500 prévus à ce jour).

Jean-Claude Juncker a parallèlement invité les Etats membres à « ouvrir des voies d'accès légales vers l'Union européenne », les propositions de la Commission européenne étant déjà sur la table.

UNE NOUVELLE ALLIANCE AVEC L'AFRIQUE

« L'Europe ne sera jamais une forteresse tournant le dos au monde et notamment au monde qui souffre », a-t-il affirmé.

Il a proposé « une nouvelle alliance entre l'Afrique et l'Europe » dans laquelle les investissements, publics et privés, se substitueraient à l'aide au développement.

« Cette alliance permettrait de créer jusqu'à dix millions d'emplois en Afrique au cours des cinq prochaines années », a-t-il précisé.

Le dirigeant chrétien-social est revenu sur l'échéance des élections européennes pour inviter les Etats membres à trouver d'ici là des accords sur les propositions de la Commission, et notamment sur le budget européen pour après 2020.

Au nombre des décisions attendues par les citoyens, il a cité la taxation des géants de l'internet, l'interdiction des ustensiles en plastique à usage unique et le changement d'heure qui redonnerait la main aux Etats sur le sujet au nom du principe de « subsidiarité ».

Jean-Claude Juncker a également évoqué les tensions entre Etats sur certains dossiers pour estimer que l'Europe était « trop petite pour se diviser ». « D'ici les élections européennes, nous devons démontrer que l'Europe peut surmonter les différences entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest », a-t-il dit.

« Nous restons préoccupés par l'évolution des débats dans certains Etats membres », a-t-il néanmoins ajouté dans une allusion à la situation politique en Pologne et en Hongrie que la Commission poursuit devant la justice européenne. « L'article 7 (procédure de sanction prévue par le traité de l'Union européenne) doit s'applique là où l'Etat de droit est en danger », a-t-il affirmé.

(Edité par Sophie Louet)