Alain Juppé qui rit, Nicolas Sarkozy qui pleure

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  925  mots
Selon le barômètre CSA pour "Les Echos" et "Radio Classique", Alain Juppé bénéficent de 76% d'opinions positives chez les sympahisants de la droite et du centre, contre 65% pour Nicolas Sarkozy
Rude journée pour Nicolas Sarkozy. Non seulement ses ennuis judiciaires ressurgissent mais deux enquêtes d'opinion montrent aussi qu'il est, pour l'instant, devancé par Alain Juppé dans la course à la primaire de droite qui désignera le candidat pour la présidentielle.

Alain Juppé doit se frotter les mains. Il y a des jours comme çà où les bonnes nouvelles s'accumulent. Lui, l'homme un peu seul mais décidé qui envisage toujours de se présenter - et de remporter - la primaire de droite et du centre de l'automne 2016 qui désignera le candidat à la présidentielle de 2017. Mais dans cette quête, il doit affronter le rouleau compresseur Sarkozy. Pas facile. Mais Alain Juppé sait qu'il y a un étroit passage et que le « coup » est jouable. Les évènements de ce 7 mai doivent le renforcer dans sa conviction.

Sarkozy et le retour des ennuis judiciaires

Il y a d'abord les ennuis judiciaires de Nicolas Sarkozy qui reviennent sur le devant de la scène. La Cour d'appel de Paris a en effet confirmé la validité des écoutes téléphoniques dont faisaient l'objet Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog. Alors que l'ancien chef de l'Etat espérait tout le contraire. Ces écoutes avaient été décidées par les juges qui s'intéressaient à un présumé financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy. Elles ont révélé que Nicolas Sarkozy a peut-être tenté d'obtenir des informations confidentielles d'un magistrat de la Cour de cassation sur l'état d'avancement du dossier Bettencourt, en échange d'un poste de très haut niveau à Monaco. Les écoutes concernaient non seulement la ligne officielle de l'ancien chef d'Etat mais aussi celle ouverte sous un « pseudo » devenu célèbre depuis : Paul Bismuth. Si les faits se révèlent exacts, Nicolas Sarkozy pourrait être poursuivi pour les délits de « corruption active », « trafic d'influence actif » et « recel de violation du secret professionnel ». Du lourd !
Au désespoir de Nicolas Sarkozy, l'enquête peut donc continuer, même si l'ex-président a déposé un recours en Cassation.


Un très proche de l'ex-président en garde à vue

Un malheur pour la Sarkozie n'arrivant jamais seul, Franck Louvrier, l'ancien conseiller en communication de Nicolas Sarkozy vient d'être mis en garde à vue dans le cadre de l'affaire Bygmalion. Sur ce dossier, les magistrats enquêtent sur un système présumé de fausses facturations qui aurait permis d'imputer à l'UMP des dépenses de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012. Franck Louvrier était très proche de Nicolas Sarkozy, travaillant avec lui depuis l'époque de la mairie de Neuilly dans les années 1980. Il a participé activement aux campagnes de 2007 et 20012.
Dans le camp Juppé, on ne peut que - discrètement - se réjouir de ce double coup dur pour Nicolas Sarkozy. Certes, le carré des sarkolatres crie déjà à l'acharnement judiciaire mais les sympathisants de droite et surtout du centre, moins sensibles aux coups de menton de l'ancien président, pourraient être tentés de lui trouver une alternative pour 2017.

Juppé devance Sarkozy dans les enquêtes d'opinions

C'est d'ailleurs ce que laissent entendre des enquêtes d'opinion dont les résultats doivent être une autre source de satisfaction pour Alain Juppé. De fait, la dernière livrée du baromètre CSA pour « Les Echos » et « Radio Classique » montre que la côte de popularité de l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac reste bien orientée. Les sympathisants UMP sont 78% a avoir une opinion positive sur lui, soit une progression de 11 points en un mois. Dans le même temps, Nicolas Sarkozy est jugé positivement par 76% des sympathisants, soit une baisse de 3 points en un mois.

Toutefois, quand on interroge l'ensemble des sympathisants de la droite et du centre et non uniquement ceux de l'UMP, Alain Juppé arrive en tête avec 76% d'opinions positives, en hausse de six points. Une donnée intéressante dans la perspective des primaires ouvertes de 2016. Nicolas Sarkozy, lui, perd deux points à 65%. D'après le baromètre CSA, il perd surtout du terrain au centre. Si Alain Juppé séduit 80% des sympathisants UDI, Nicolas Sarkozy, lui, plafonne à moins de 30%. Il va donc falloir à l'ancien Chef d'Etat rééquilibrer son discours pour se montrer moins clivant, notamment sur les questions sociétales. Sinon, lors des primaires, une grande partie des électeurs de l'UDI et du Modem risquent de définitivement lui faire défaut.... Et Alain Juppé l'emportera.

Le plein chez les sympathisants du MoDem

D'ailleurs, un autre sondage Ipsos-Le Point confirme cette tendance. Quand on interroge les électeurs potentiels sur leurs intentions de vote à la primaire. Alain Juppé fait le plein chez les sympathisants du MoDem (71 % d'entre eux choisissent l'édile bordelais) mais également chez les électeurs de l'UDI (48 %). En revanche, les UMP ne voteraient qu'à 29 % pour lui. Si Nicolas Sarkozy fait, de son côté, un meilleur score à l'UMP (51 %), il n'engrange que 6 % des voix du MoDem, et 9% de l'UDI. Résultat, en cas de second tour Juppé/Sarkozy, le maire de Bordeaux l'emporterait à 53 %, contre 47 % pour Nicolas Sarkozy.
Alors, Alain Juppé n'a plus qu'à (discrètement) espérer que les « affaires » viennent rattraper Nicolas Sarkozy pour le mettre définitivement hors course ou, au moins, l'affaiblir. Plus Nicolas Sarkozy sentira le souffre, plus une partie de l'électorat de droite et du centre s'éloignera de lui. C'est tout le pari d'Alain Juppé.

Le maire de Bordeaux doit sans doute passer une bonne journée. Les suivantes ne lui seront sans doute pas aussi favorables, tant l'animal politique Sarkozy est redoutable.

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>>> Plus populaire que jamais, le maire de Bordeaux explique à La Tribune pourquoi il veut mener le combat de la droite et du centre pour l'élection présidentielle de 2017.