Fiscalité : le Grand débat change de format

Par Grégoire Normand  |   |  792  mots
(Crédits : Reuters/Philippe Wojazer)
Plusieurs organisations syndicales et patronales, des représentants de collectivités ou des ONG ont échangé mercredi 13 mars pour apporter leurs contributions au Grand débat qui doit se clôturer officiellement le 18 mars.

Depuis le début de la semaine, les modalités du Grand débat ont changé. Après plus de de deux mois d'échanges et de réunions dans les territoires, plusieurs corps intermédiaires ont été sollicités pour élaborer un ensemble de propositions sur les quatre thèmes sélectionnés par le gouvernement. Mercredi, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin accueillait les différents participants dans l'enceinte du ministère de l'Economie pour qu'ils élaborent plusieurs propositions sur le thème de la fiscalité et des dépenses publiques.

« Le débat sur la fiscalité est celui a qui le plus passionné les Français si j'en crois le nombre de contributions. Il y a quelques paradoxes, beaucoup de contributions demandent moins d'impôts mais pas moins de dépenses. La question de la justice fiscale et de la redistribution sont au cœur des propositions. Elles existent déjà grâce aux impôts directs et indirects, notamment via l'impôt sur le revenu », a expliqué le ministre.

La matinée animée par le commissaire général de France Stratégie Gilles de Margerie a révélé la complexité de l'organisation d'un tel débat et ces limites. Selon un décompte réalisé par La Tribune à partir des données de l'organisation présentées sur le site officiel, 450.000 contributions numériques ont été recensées au 13 mars sans compter toutes les contributions récoltées dans les territoires. Le sujet sur la fiscalité et les dépenses publiques avait ainsi récolté 152.289 contributions numériques contre 121.903 pour la transition écologique, 90.028 pour la démocratie et la citoyenneté  et 89.771 pour l'organisation de l'État et des services publics.

L'heure des propositions

Au total, 46 participants avaient répondu à l'appel de la mission du Grand débat mercredi matin. Cette nouvelle étape avait rassemblé des organisations très diverses allant de l'assemblée des départements de France, en passant par la CFDT, la CFE-CGC, la FNSEA, le Medef ou encore le WWF. Le matin, chacun des participants devait voter pour cinq thèmes qui leur semblaient prioritaires à partir de 20 propositions elles aussi très hétérogènes. Les thèmes suggérés allaient de "la progressivité, l'équité et l'efficacité de l'impôt" à "la mobilisation des recettes de fiscalité environnementale pour plus plus de justice sociale" ou "l'encouragement de l'économie sociale et solidaire".

Au départ fermé à la presse, La Tribune a pu assister à l'atelier regroupant une quinzaine de personnes sur le thème de l'économie sociale et solidaire. Après plus d'une heure de débats et d'échanges, les participants ont inscrit quelques propositions à faire remonter sous l'œil attentif de l'ancien juge d'instruction, Guy Canivet, membre du collège des cinq garants du Grand débat national et désigné par le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand.

Les discussions se concentraient principalement autour de l'équité des conditions autour du financement et des dispositifs d'aides publiques entre les acteurs du privé et les acteurs de l'économie sociale et solidaire. La question d'un retour des emplois aidés a été également longuement débattue alors que le gouvernement actuel a réduit drastiquement ce dispositif depuis son arrivée au pouvoir.

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Une restitution complexe

Tout ce corpus issu des contributions sur la plateforme, des débats au niveau local et des cahiers de doléances mis à disposition des citoyens, devrait faire l'objet d'une restitution dans les prochaines semaines. Au regard de la masse de données récoltées, cette mission devrait se révéler complexe. L'organisation du Grand débat s'est engagée à ce que "sous le contrôle des garants, toutes les contributions seront rendues publiques, analysées et restituées au président de la République et au gouvernement".

Des jeux de données ont été mis à disposition des citoyens, des chercheurs et ou encore des journalistes sous licence ouverte, disponibles sur la plateforme data.gouv.fr. Outre cette immense base de données, toutes les contributions sous forme de documents manuscrits devront être numérisés par la bibliothèque nationale de France. Par la suite, ces données doivent être transmises à un consortium piloté par le cabinet Roland Berger, associé à Cognito et BlueNove, des sociétés spécialisées entre autres dans "l"intelligence collective massive [...] engagées activement dans la civic tech". Un représentant du cabinet est venu présenté "une cartographie lexicale qui devrait permettre de mieux comprendre les attentes des citoyens [...] mais il est encore trop tôt pour apporter les premiers résultats", a-t-il assuré. La restitution s'annonce périlleuse.