La croissance révisée à 2% en 2017, du jamais-vu depuis 6 ans

Par Grégoire Normand  |   |  1053  mots
La croissance de la construction s'est élevée à 2,6% en 2017.
C'est une première depuis six ans : la croissance a atteint l'an dernier le seuil symbolique des 2% grâce à une accélération de l'investissement. Dans une première estimation publiée fin janvier, l'Insee avait estimé à 1,9% le rythme de croissance enregistré par l'économie tricolore en 2017. Mais mercredi, l'organisme public a revu ce chiffre à la hausse, à 2% tout rond.

L'embellie se confirme pour 2017. Selon les dernières données de l'Insee publiées ce mercredi 28 février, la croissance du PIB a atteint 2% en France l'an dernier, soit 0,1 point de plus que ce qui avait été préalablement annoncé. Cette annonce est une bonne nouvelle pour l'exécutif qui multiplie les réformes à grand pas alors que les tensions sociales s'aggravent dans la fonction publique et chez les cheminots. L'économie tricolore reste néanmoins à la traîne de la zone euro qui a connu en 2017 une croissance de 2,5%, du jamais vu depuis dix ans, selon l'Office européen de statistiques Eurostat.

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Une révision favorable

Les derniers chiffres de l'institut de statistiques "correspondent à une croissance forte", explique Hélène Baudchon, économiste chez BNP-Paribas interrogée par La Tribune. Mais "il faut être conscient que ce chiffre peut être révisé dans les années à venir" précise la spécialiste de la conjoncture française. Pour retrouver ce niveau de croissance, il faut revenir à 2011 (2,1%) même si ce taux s'inscrit dans une période de reprise éphémère, dans le contexte de la crise des dettes souveraines en Europe. Selon elle, il faut remonter à 2007 ou 2006 pour retrouver des taux comparables.

"Ce que l'on observe par rapport aux années récentes, c'est que 2017 met fin à plusieurs années de croissance molle autour de 1%", ajoute Mme Baudchon.

Dans sa dernière loi de finances, l'exécutif avait parié sur une croissance de 1,7%. Mais le ministre de l'Économie Bruno Le Maire avait laissé entendre, début janvier, que le résultat pourrait être supérieur aux attentes et "approcher les 2%".

Ce rebond de l'activité repose sur plusieurs facteurs. "L'investissement des entreprises et des ménages a été particulièrement dynamique en 2017 avec un petit effet des exportations". Pour les ménages, "c'est principalement un effet de rattrapage après plusieurs années de baisse [...] Un accès favorable aux crédits a également permis aux ménages d'investir plus facilement".

Du côté des entreprises, "la mesure de suramortissement (dispositif qui a pris fin en avril 2017 ; NDLR) et le redressement des taux de marge des entreprises ont contribué au dynamisme de l'investissement [...] Mais on se demande si ça va continuer". Elle évoque également un environnement international favorable.

En ce qui concerne 2018, l'économiste de l'institution bancaire annonce "des prévisions résolument optimistes avec un taux de 2,4% [...] Avec ce chiffre, on se situe tout en haut du consensus". Pour expliquer ces projections favorables, l'experte évoque notamment "une marge d'accélération possible pour la consommation des ménages et des exportations". En revanche, elle se montre plus prudente sur "l'investissement des ménages et des entreprises qui pourraient ralentir légèrement en 2018 par rapport à 2017".

Repli de la consommation de biens en janvier

Les dépenses de consommation de biens des ménages français ont reculé de 1,9% en janvier, après avoir déjà reculé de 1,2% en décembre, a annoncé l'organisme public dans un communiqué. Ce repli s'explique en particulier par une diminution de la consommation d'énergie (-7,6%). En raison de la douceur du mois de janvier qui a été le plus doux depuis 1900, les dépenses de chauffage ont été particulièrement basses.

"La consommation de produits raffinés est également en baisse, quel que soit le type de carburant considéré (essence, gazole, fioul, butane, propane)."

Les dépenses en biens fabriqués ont pour leur part diminuées pour le deuxième mois consécutif, de manière toutefois moins marquée qu'en décembre (−0,8% après −1,5%). Dans le détail, les achats de matériels de transport ont reculé de 3%, en particulier les achats d'automobiles neuves et d'occasion, mais également ceux de motocycles et de véhicules de loisirs.

Les dépenses en équipement du logement ont quant à elles rebondi légèrement (+1,7% après −6,8%), en raison notamment d'une hausse des achats de matériel audiovisuel, informatique et téléphonique. La consommation alimentaire, enfin, a continué de diminuer (−0,6% après −1,5%), tant dans les produits agricoles non transformés (fruits, légumes) que dans les produits agro-alimentaires (viandes, produits laitiers) et les boissons. Les chiffres de la consommation sont une donnée importante pour la croissance française, traditionnellement portée par les achats des ménages. Le chiffre de l'Insee ne prend toutefois en compte que la consommation de biens, et pas celle de services. Ce repli de la consommation s'ajoute à la légère baisse du moral des ménages au mois de février.

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Légère inflation sur un an

Les prix à la consommation ont augmenté de 1,2% en février sur un an, l'inflation revenant à son niveau de décembre après une accélération en janvier, a indiqué mercredi l'Insee dans ses estimations provisoires.

La baisse du taux est due à "un ralentissement des prix des services, de l'alimentation et du tabac", tandis que les prix des produits manufacturés ont connu une "légère hausse" et que les prix de l'énergie ont progressé "au même rythme que le mois précédent". Sur un mois, les prix à la consommation restaient stables, après une baisse de 0,1% en janvier.

La stabilité en février est due au repli des prix de l'alimentation, des produits manufacturés et des services. Les prix énergétiques sont restés stables sur un mois, "la baisse des prix des produits pétroliers étant compensée par la hausse de ceux du gaz et de l'électricité", explique l'Insee. L'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), utilisé pour les comparaisons au sein de l'Union européenne, a augmenté de 1,3% sur un an, une hausse moins soutenue qu'en janvier (+1,5%), mais en accélération par rapport à décembre (+1,2%).

Selon l'OCDE, la croissance devrait atteindre cette année 1,8% en France. D'après le FMI, elle devrait s'élever à 1,9%. L'Insee, qui prévoit une hausse du PIB de 0,5% puis 0,4% au premier puis deuxième trimestre, publiera le 20 mars sa prévision annuelle.

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