Le gouvernement accusé de "détricoter" les propositions de la CCC ? "J'adore le tricot", répond Barbara Pompili

Par Jérémy Marot et Amélie Bottollier-Depois, AFP  |   |  859  mots
Alors que certains de ses collègues sont accusés de s'octroyer le droit d'écarter des mesures supplémentaires aux trois déjà décidées par Emmanuel Macron, Barbara Pompili a souligné qu'"à la fin nous aurons une décision prise par le chef du gouvernement". (Crédits : Reuters)
Face aux accusations de "détricotage" des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), le gouvernement a tenté ce mercredi de donner des gages à leurs représentants. "J'adore le tricot. Et ce qu'on est en train de faire, c'est de tricoter un beau pull vert que vous pourrez mettre à Noël", a ironisé de son côté la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, à l'issue de la réunion avec les "citoyens".

"On avance !", a assuré le Premier ministre Jean Castex sur Twitter après une réunion à Matignon avec quelques membres de la CCC qui a remis en juin à l'Élysée 149 propositions que le président s'est ensuite engagé à reprendre, à l'exception de trois.

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"Une trentaine de propositions ont déjà trouvé des suites favorables, notre ambition est intacte, mais je ne nie en rien les difficultés qui s'ouvrent à nous", a ajouté Jean Castex.

Ces dernières semaines, des déclarations de ministres sur le malus en fonction du poids des véhicules neufs, l'écotaxe sur le transport aérien, ou les propos du président lui-même sur les opposants à la 5G comparés aux Amish ont suscité des inquiétudes chez les défenseurs de la planète.

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Et la publication lundi du budget 2021, associé au plan de relance, n'a pas rassuré.

"Le gouvernement répète à l'envi qu'il n'a pas de baguette magique pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Mais il en a visiblement une pour faire disparaître dans les limbes toute proposition qui permettrait de se rapprocher un peu de la neutralité carbone", a dénoncé ce mercredi Clément Sénéchal, de Greenpeace France, listant les mesures non reprises dans le budget: encadrement des dividendes, taxation des engrais azotés, écotaxe sur les billets d'avion...

"Après les discours enthousiastes vient le temps du détricotage", ont également dénoncé ce mercredi dans une tribune publiée dans Le Monde le maire EELV de Grenoble et le député EDS Matthieu Orphelin.

"Un beau pull vert"

Des accusations rejetées par la ministre de la Transition écologique. "J'adore le tricot. Et ce qu'on est en train de faire, c'est de tricoter un beau pull vert que vous pourrez mettre à Noël", a ironisé Barbara Pompili à l'issue de la réunion avec les "citoyens".

Alors que certains de ses collègues sont accusés de s'octroyer le droit d'écarter des mesures supplémentaires aux trois déjà décidées par Emmanuel Macron, elle a souligné qu'"à la fin nous aurons une décision prise par le chef du gouvernement".

Et pas par le ministre de l'Économie ou le ministre délégué aux Transports, comme le craignent les défenseurs de l'environnement, voire certains membres de la CCC.

"Mme Pompili est quelqu'un qui s'investit vraiment pour la transition écologique. Toutefois nous sommes plusieurs citoyens à espérer qu'elle ait un peu plus de soutien de la part de ses collègues au gouvernement", a noté Muriel Pivard, co-présidente de l'association de participants à la Convention "Les 150".

"Elle n'y arrivera pas seule", a-t-elle ajouté, estimant aussi que "certaines mesures sont détricotées".

Selon le gouvernement, 20% des propositions de la Convention sont reprises partiellement ou en totalité dans le plan de relance: aide à la rénovation énergétique des bâtiments, renforcement du malus CO2 sur les véhicules les plus polluants, soutien au vélo...

Et le gouvernement assure qu'il n'en restera pas là pour reprendre les propositions de la Convention visant à réduire "d'au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre dans un esprit de justice sociale".

"On ne lâchera pas"

Ainsi, des amendements au projet de loi de finance seront présentés: révision de l'indemnité kilométrique pour les voitures, hausse du forfait mobilité durable, baisse des taxes sur les assurances pour les voitures électriques...

Et des concertations se poursuivent, notamment avec les "citoyens" et les élus, pour l'élaboration d'un projet de loi spécifique dont le texte devrait être présenté en Conseil des ministre en décembre.

Agriculture, publicité, mobilité... Certains thèmes sont particulièrement sensibles, comme les transports aériens et routiers, gros pollueurs mais aussi gros employeurs fragilisés par la crise liée à l'épidémie de Covid-19.

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L'instauration de l'écotaxe proposée sur les transports aériens aurait des "conséquences absolument délétères" sur le plan social pour un secteur déjà sinistré, a d'ailleurs mis en garde il y a quelques jours le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari.

"On sent que nos mesures peuvent faire polémique et qu'il n'y a pas forcément une ligne gouvernementale qui se dégage", a commenté Grégoire Fraty, co-président des "150". Mais "on ne lâchera pas", a-t-il promis en quittant Matignon.