Les dépenses en faveur de l'emploi : une efficacité remise en cause

Par Grégoire Normand  |   |  645  mots
(Crédits : Eric Gaillard)
Plus de 133 milliards d'euros ont été dépensés en 2016 pour favoriser l'emploi selon une étude du ministère du Travail. Ce travail, qui dresse un panorama des différents dispositifs, met en évidence des résultats contrastés au regard de la lente baisse du chômage.

Voici une étude qui devrait relancer les débats sur l'efficacité des politiques publiques. D'après des travaux du service de statistiques du ministère du Travail (Dares) publiés ce vendredi 9 février, les dépenses en faveur de l'emploi et du marché du travail ont atteint 133 milliards d'euros en 2016, soit 6 points de produit intérieur brut (PIB). Cette enveloppe en augmentation de 9% par rapport à 2015 n'a pas toujours permis d'obtenir les résultats escomptés. En effet, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi a régulièrement augmenté malgré tous ces efforts budgétaires. Si la crise entamée en 2007 et la crise des dettes souveraines dans la zone euro sont passées par là, les choix de politique en matière d'emploi opérés par les gouvernements successifs indiquent que les résultats ne sont pas toujours à la hauteur des promesses exprimées.

67 milliards de dépenses ciblées

Pôle emploi, formation professionnelle, incitations à l'emploi, aides à la création d'entreprises. Les dépenses ciblées pour les politiques du marché du travail sont orientées vers un foisonnement de dispositifs très variés. Elles représentaient environ 67 milliards d'euros en 2016, en hausse de 2,5% par rapport à 2015. "Leur niveau reste nettement supérieur à celui de la période 2006-2008 (où elles représentaient environ 2,5 points de PIB). Les transferts aux individus, aux employeurs et aux prestataires de services représentent respectivement 74,1 %, 14,1 % et 11,8 % de ces dépenses ciblées" rapportent les auteurs du document qui ont illustré leur étude avec un graphique particulièrement frappants en mettant en regard les montants alloués et le nombre de demandeurs d'emplois inscrits.

Sur les grands postes budgétaires, les dépenses ont connu des évolutions contrastées. Les sommes allouées à la formation professionnelle des demandeurs d'emploi ont bondi de 17,3% entre 2015 et 2016 passant de 6,1 milliards d'euros à 7,2 milliards d'euros. L'entrée en vigueur du plan "500.000 formations supplémentaires pour les demandeurs d'emploi" décidée sous le quinquennat de François Hollande peut expliquer en grande partie cette hausse spectaculaire des dépenses allouées à l'ensembles des dispositifs. Ainsi, plus de 1 million d'entrées en formation ont été recensées en France en 2016. Toutes les mesures d'incitations à l'emploi (Contrat unique d'insertion, emplois d'avenir, contrat de génération, primes de retour à l'emploi,...) ont également connu une forte hausse dans l'ensemble de leurs moyens entre 2015 et 2016 (+22,3%). A l'opposé, les aides à la création d'entreprise ou les sommes allouées au préretraites ont clairement chuté respectivement de de 15% et 51,5% entre 2015 et 2016. "La politique de réduction des dispositifs publics de préretraite menée depuis le début des années 2000 conduit à l'extinction lente de ces mesures."

Une hausse en faveur des exonérations

La forte hausse des dépenses en faveur  du marché du travail s'explique en partie par les mesures d'exonérations accordées aux entreprises. Selon les données communiquées par les services du ministère du Travail, ces dépenses s'élevaient à 49,2 milliards d'euros en 2016, soit une augmentation de 8,3% par rapport à 2015. La poursuite du pacte de responsabilité avec l'extension des taux réduits de cotisations patronales aux salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC à partir du premier avril 2016 et la montée en puissance du CICE ont fortement contribué à augmenter ces dépenses pour une efficacité parfois contestée notamment par les économistes du conseil d'analyse économique (CAE).

> Lire aussiLa baisse des charges au-dessus de 1,6 SMIC critiquée par des économistes

 Les services publics de l'emploi à la diète

Les dépenses consacrées au service public de l'emploi ont diminué de 8% d'après les chiffres rapportés dans l'étude, passant de 5,7 milliards d'euros à 5,6 milliards en un an. Si les prestations de services (Pôle emploi, mission locale ou Apec) ont connu une hausse, les services dédiés à l'accompagnement ont vu leurs moyens fortement diminués(-32,1%).