Policiers blessés : les Républicains sèment le désordre dans les chiffres

Les Républicains veulent dénoncer les violences contre les forces de l'ordre en pleine campagne de la primaire. Sauf que les blessures des policiers ne sont pas toujours dues aux violences, comme pourrait le laisser penser la présentation des chiffres de la droite.
Grégoire Normand
Les Républicains n'en sont pas à leur premier coup d'essai en matière de confusion sur les chiffres concernant les violences contre les policiers.

La dénonciation des violences contre les policiers pourrait prendre de l'ampleur chez les sympathisants Républicains. Il y a quelques jours, le parti a diffusé des chiffres sur une hausse de 25 % des violences contre les policiers sur Twitter. Le chiffre est également diffusé sur la plateforme directcitoyen, présentée comme "une réponse aux attentes des Français en matière de démocratie participative [...] et vise ​à​ numériser et moderniser la vie politique française".

Sauf que le chiffre exprimé et la présentation avancée peuvent être trompeurs. Dans un note publiée quelques jours auparavant, l'observatoire nationale de la délinquance et de la réponse pénale (ONDRP) a mis en exergue des chiffres sur les policiers blessés entre 2010 et 2015. En 2015, l'observatoire a recensé 12.388 policiers blessés contre 11.126 en 2010. Mais l'institution opère une distinction essentielle pour bien appréhender les statistiques. Les blessures sont ainsi comptabilisées selon deux moments distincts : lorsqu'ils sont en mission ou bien quand ils sont en service. L'ONDRP donne à ce propos des définitions précises :

  • Les blessés en mission : survenus soit en opération de police, soit en service commandé, au cours desquels le fonctionnaire met en œuvre les prérogatives attachées à sa fonction. Cela concerne les policiers sur le terrain.
  • Les blessés en service : survenus pendant les heures de travail de service ou sur le trajet domicile-travail.

Si l'on suit les chiffres présentés par les Républicains, la hausse des violences subies par les policiers a bien augmenté de 25% mais seulement pour les blessés en mission qui sont passés de 4.535 à 5.674. Si l'on prend en compte la totalité des blessés, la hausse "n'est plus que" de 11%. Au delà de cette différence dans les variations, l'ONDRP incite à regarder les chiffres dans le détail et à observer comment le recensement des blessures a évolué depuis 2010.

 [Graphique interactif] Vous pouvez choisir l'indicateur à l'aide du sélecteur situé en haut à droite de l'infographie. (*) La modalité « autre procédé » dans le dernier graphique regroupe les blessures dont la cause est accidentelle, pouvant être soit liée à l'absence de contact avec la ou les personne(s) à appréhender, soit due à un coup porté de manière accidentelle.

Dans le détail (voir dernier graphique), les blessures en mission dont la cause est liée à d'autres procédés (*) concernaient en 2015, 5.244 policiers, soit 42% du total. La présentation des Républicains est donc partielle puisqu'elle ne précise pas le moment où les policiers ont été blessés et la hausse de 25% concerne des blessures dont la cause est accidentelle. Par ailleurs, si une hausse plus importante peut être soulignée en 2011 et 2012, elle peut en partie s'expliquer par une meilleure prise en compte des blessures des policiers comme le rappelle un document de l'ONDRP qui permet de relativiser la progression :

"La progression enregistrée en 2012 par rapport à l'année précédente résulte en partie d'une application plus rigoureuse en termes de comptabilisation des blessés dans certains SGAP (**) (prise en compte des blessés même sans arrêt de travail)."

Un vieux serpent de mer

Quelques jours auparavant, la porte-parole des Républicains et vice-présidente de la région Grand Est Valérie Debord avait également communiqué des chiffres sur les policiers blessés pour dénoncer la prétendue hausse des fonctionnaires blessés sous Hollande liée au laxisme de sa politique.

A regarder les chiffres et les variations entre 2012 et 2015, une seule catégorie a connu une hausse des policiers blessés. Il s'agit des fonctionnaires blessés en mission (+ 0,8%) passant de 5.630 à 5.674. En revanche, entre 2010 et 2012 alors que la droite était encore au pouvoir jusqu'en mai, les policiers ont bien connu une augmentation des blessés dans leurs effectifs, peu importe la catégorie choisie.

S'il est indéniable que la profession de policier est bien plus exposée que d'autres professions comme le rappelle une étude du ministère de l'Intérieur publiée en octobre 2015, la confusion entretenue par les Républicains ne permet pas aux internautes consultés via la plateforme de s'exprimer correctement sur le besoin d'une fermeté accrue envers les agresseurs des policiers.

Le bureau des Républicains n'est pas le premier à entretenir la confusion sur les chiffres des violences contre les policiers. Eric Ciotti, pourtant auteur d'un rapport sur la légitime défense des policiers ou Marion Maréchal Le Pen ont déjà semé le doute à plusieurs reprises sur ce sujet comme le soulignait Libération.

(**)Secrétariats généraux pour l'Administration de la Police

Grégoire Normand
Commentaires 3
à écrit le 17/10/2016 à 18:58
Signaler
où est l état de droit , on en est plutot au droit de se faire du policier avec la bienviellance de l' état et de la justice qui ne reagit que par des mots ou des sentences non adaptées, c est comme dans les prisons l état de droit ce sont les caids...

le 17/10/2016 à 20:50
Signaler
Nous y sommes dans le mur et les pierres c'est dur ça fait mal.

à écrit le 17/10/2016 à 17:35
Signaler
"voilà le résultat de la politique laxiste et angélique du gvt" alors que l'état d'urgence est décrété elle veut quoi la droite une guerre civile ? Que l'on abatte directement les gens dans la rue ? C'est du grand n'importe quoi ces gens là sont ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.