Retraites : uniformiser les règles de calcul des pensions entre privé et public n'est pas forcément toujours « injuste »

Par latribune.fr  |   |  687  mots
L'essentiel de l'étude de la Drees est consacré à la génération des fonctionnaires nés en 1958. (Crédits : Reuters)
Dans sa future réforme des retraites, le gouvernement semble écarter l'hypothèse d'imposer aux fonctionnaires les règles de calcul des pensions des salariés du privé, car jugées trop injustes pour les agents publics, selon Olivier Dussopt. Toutefois, selon une étude publiée jeudi par la Drees, le service des statistiques du ministère du Travail, les impacts seraient loin d'être aussi négatifs.

Les contours de la future réforme des retraites que le gouvernement souhaite lancer début 2023 se précisent. Alors que le gouvernement mène depuis octobre des concertations avec le patronat et les syndicats de salariés et de fonctionnaires, l'hypothèse d'imposer les règles de calcul des pensions du privé aux fonctionnaires semble s'éloigner. Ainsi, récemment, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a estimé qu'uniformiser le calcul des pensions du public sur celles du privé serait « une injustice terrible pour les agents publics », du fait de « modalités de rémunération » très différentes entre privé et public.

Depuis les précédentes réformes, pour avoir une retraite à taux plein, c'est la durée de cotisation qui est alignée entre public et privé. En revanche, tandis que le calcul de la pension de retraite des fonctionnaires est calculée sur la base du salaire des six derniers mois (hors primes et indemnités), celle des salariés du privé est calculée en fonction de leurs 25 meilleures années de carrière.

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Si le gouvernement n'envisage pas d'uniformiser cette règle entre public et privé, l'hypothèse a néanmoins été étudiée par la Drees, le service des statistiques du ministère du Travail. Et la réalité n'est pas forcément si terrible à en croire une étude publiée ce jeudi sur les impacts potentiels d'une telle mesure. Appliquer les règles de calcul du privé au public ferait des « perdants » certes, mais aussi des « gagnants », selon la Drees.

L'essentiel de l'étude, qui attribue aux fonctionnaires une pension calculée sur la base du salaire de leurs 25 meilleures années de carrière plutôt que sur les six derniers mois (hors primes et indemnités), est consacré à la génération de fonctionnaires nés en 1958. Si on leur appliquait la règle de calcul des 25 ans - comme dans le privé - la pension de ces fonctionnaires serait en moyenne supérieure de 1,5% par rapport à celle qu'ils auraient touchée en vertu des règles actuelles (calcul sur la base des six derniers mois). En d'autres termes, « il n'y aurait pas d'iniquité manifeste au niveau global », résume la Drees.

Les plus favorisés seraient perdants, les autres plutôt gagnants

Néanmoins, « les impacts seraient très variables selon les individus et leur niveau de pension initial ». Un gros tiers (35%) des fonctionnaires de la génération 1958 bénéficieraient d'une augmentation de leur pension supérieure à 10% par rapport aux règles de calcul actuelles. A l'inverse, 13% la verraient baisser de plus de 10%. « Les individus aux pensions les plus élevées sont majoritairement perdants, tandis que les individus aux pensions des tranches intermédiaires seraient plus souvent gagnants », résume la Drees.

Par ailleurs, l'uniformisation des règles de calcul profiterait davantage aux fonctionnaires dont la rémunération est largement composée de primes. De façon générale, « le passage des fonctionnaires aux règles du secteur privé aurait plutôt tendance à resserrer les écarts de pension » entre agents publics. Mais en changeant les règles de calcul, le niveau des cotisations retraites acquittées par les agents publics serait « modifié à la hausse ». En moyenne, les fonctionnaires verseraient plus de 28% de cotisations supplémentaires, et même près de 40% de cotisations supplémentaires pour ceux dont le salaire est largement composé de primes.

En cumulant l'effet des règles uniques de calcul sur le montant des cotisations et des pensions, le revenu perçu par les fonctionnaires tout au long de leur vie diminuerait en moyenne de 0,7%.

La Drees a enfin étudié l'impact de règles de calcul uniformisées sur les générations nées après 1958. Il en ressort que les générations de la fin des années 1960 et du début des années 1970 seraient « relativement plus favorisées », à l'inverse des générations ultérieures.

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 (Avec AFP)