Vive le cornucopianisme !

CHRONIQUE DU "CONTRARIAN" OPTIMISTE. Le monde court à sa perte. Nous sommes en train d'épuiser les ressources naturelles en ne prenant pas en compte leurs limites. Cette vision catastrophiste et millénariste ne correspond pas à la réalité. Au contraire, l'humanité n'a eu de cesse de résoudre les problèmes qu'elle a dû affronter, grâce à l'ingéniosité humaine qui, elle, à une capacité d'innovation sans limite.
Robert Jules
En 1990, nous avions environ 45 années de consommation (les réserves prouvées divisées par la production). En 2020, nous en avons 53,5 années.
En 1990, nous avions environ 45 années de consommation (les réserves prouvées divisées par la production). En 2020, nous en avons 53,5 années. (Crédits : Reuters)

L'un des sujets qui alimente régulièrement la une des médias est l'épuisement du... pétrole, de l'eau potable, des terres arables, ou encore la fin de la biodiversité, voire bientôt de l'espèce humaine avec le réchauffement climatique. Le catastrophisme ou, dans sa version moderne, la collapsologie se porte bien.

Cette conception des limites physiques apparaît d'autant plus évidente qu'elle découle d'un raisonnement simple : le monde étant fini, les ressources naturelles ont nécessairement des limites physiques, et, au fur et à mesure où nous les consommons, elles vont devenir de plus en plus rares.

La théorie du pic de la production pétrolière sans cesse démentie

Cette façon de raisonner est problématique car elle ne correspond pas à la réalité. Par exemple, depuis 40 ans, nombre d'experts annoncent régulièrement que nous avons atteint un pic de la production pétrolière, avant d'être démentis. En fait, aujourd'hui, le consensus des spécialistes considèrent que l'on est plutôt en train d'atteindre un pic de la... demande pétrolière.

Car paradoxalement les réserves prouvées ne font qu'augmenter alors même que nous en consommons de plus en plus, de 3,65 milliards de tonnes en 2000 à 4,61 milliards de tonnes en 2019 (2020 étant une année à part, en raison des confinements), selon l'AIE, soit un bond de 26,3%.

En 1990, nous avions environ 45 années de consommation (les réserves prouvées divisées par la production). En 2020, nous en avons 53,5 années, alors même que la production est passée en 10 ans (2010-2019) de 83,3 millions de barils par jour à 94,9 millions de barils par jour, soit une hausse de près de 14%.

Autrement dit, plus nous extrayons du pétrole de terre, plus nous en trouvons. Cette dynamique s'explique par le facteur économique. Si le prix du pétrole augmente, il y a une incitation financière à en chercher, et plus d'investissements vont aller dans la recherche technologique et trouver des solutions pour par exemple augmenter le taux de récupération de l'huile dans les roches ou permettre d'exploiter des gisements en offshore profond. Or, ce facteur économique est dynamique, il évolue sans cesse pour s'adapter. Quand le prix du brut est trop élevé, le consommateur va chercher à en utiliser moins, l'industriel à lui substituer un autre produit, etc., le temps que la production rééquilibre l'offre et la demande pour faire baisser à nouveau les cours.

L'économie circulaire est une innovation récente

Et même si dans les prochaines années, nous allons utiliser moins de pétrole pour le transport en migrant vers des véhicules électriques, l'exploitation se poursuivra car l'or noir est de plus en plus utilisé par les secteurs de la chimie (plastique) et de la pharmacie.

De même, depuis que l'humanité en consomme, nous avons extrait plus de 700 millions de tonnes de cuivre qui sont stockés à l'intérieur des produits qui nous entourent. Ce volume, inépuisable, peut être réutilisé pratiquement à l'infini. Or, l'économie circulaire qui repose notamment sur le recyclage n'est apparu que récemment pour répondre à des problèmes qui ne se posaient pas jusqu'à la moitié du siècle dernier.

Cette vision d'un monde sans limite a un nom savant :  le cornucopianisme (qui vient du latin qui a donné en français la "corne d'abondance"). C'est l'exact opposé du malthusianisme. Cette vision optimiste assure que grâce à des innovations permanentes l'humanité pourra toujours pallier nos manques de ressources naturelles.

En réalité, quelle que soit l'époque, les individus ont toujours été confrontés à la nécessité de reproduire chaque jour leurs moyens de subsistance vitale ce qui passe par l'obsession d'avoir un accès permanent à des ressources naturelles qui sont considérées comme rares parce que les individus ont peur d'en manquer. Au XIXe siècle, un chercheur qui s'intéressait au fonctionnement du mode de production capitaliste remarquait ainsi que "l'humanité ne se pose jamais que les problèmes qu'elle est capable de résoudre". On l'oublie souvent mais l'auteur de cette phrase, Karl Marx, était le contraire d'un utopiste. Il ne s'agit donc pas de concevoir un monde idéal mais bien de résoudre les problèmes qui se posent ici et maintenant.

Car une ressource naturelle en tant que telle n'existe pas, elle n'est jamais donnée, elle le devient par sa transformation en produit. Ce qui implique une activité, le travail humain (de la conception à la distribution en passant par la production), et du capital (pour acheter les moyens de production). Or ce coût est relatif à celui des autres marchandises dans une économie de marché.

Optimisme technophile

Ce qui oblige en permanence les entreprises à améliorer sans cesse leurs produits - en faisant plus avec moins - pour rester dans la course économique face à la concurrence.

Le cornucopianisme est souvent critiqué pour son optimisme technophile et sa justification du capitalisme d'un monde sans limite. En réalité, il n'est que l'expression du caractère inépuisable de l'ingéniosité humaine, comme il le fait en littérature, avec à peine 24 lettres de l'alphabet. Il considère que le monde sera par définition toujours imparfait mais qu'il peut sans cesse être amélioré, à condition de s'attaquer aux problèmes réels et non fantasmés.

Robert Jules
Commentaires 3
à écrit le 13/11/2021 à 9:29
Signaler
La dictature sanitaire est bien plus inquiétante c'est sûr ! Ah désolé pour la "positive attitude !" :-)

à écrit le 12/11/2021 à 20:26
Signaler
Quand on est a "l'aube" de sa vie, on ne cherche des mots compliqués pour dire: "Sauvez moi"!

à écrit le 12/11/2021 à 20:23
Signaler
Excellente découverte: l'homme s'adapte. Les vieux comme les jeunes ont besoin de revenir à cette réalité optimiste.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.