Coup de semonce sur la Chine, Moody's dégrade à « négatif » sa perspective économique

Par latribune.fr  |   |  691  mots
Dans la foulée de ce rapport, le ministère chinois des Finances ce mardi s'est dit « déçu » par la décision de Moody's. (Crédits : FLORENCE LO)
Pour justifier sa dégradation, l'agence de notation américaine pointe de « vrais risques sur la solidité budgétaire » de la Chine. La crise immobilière et les perspectives de croissance en berne du pays ont aussi joué dans cette décision.

Mauvaise nouvelle pour l'économie chinoise. Moody's, l'une des agences de notation de référence, a abaissé ce mardi de « stable » à « négatif » la perspective de la note de la Chine, en raison de l'endettement dans la deuxième économie mondiale.

« Le passage à une perspective négative est le reflet de preuves croissantes que le gouvernement et le secteur public apporteront un soutien financier aux gouvernements régionaux et aux entreprises d'Etat en difficulté », justifie l'agence américaine dans un communiqué.

Avant d'ajouter que cela « pose de vastes risques (...) pour la solidité budgétaire » de la Chine, en raison d'une croissance économique « plus faible » du géant asiatique et des difficultés du secteur immobilier. Dans la foulée de ce rapport, le ministère chinois des Finances s'est dit « déçu » par la décision de Moody's.

La crise de l'immobilier chinois en cause

Au cœur de la décision de l'agence de la notation, l'immobilier chinois inquiète. Ce secteur a longtemps représenté au sens large un quart du produit intérieur brut (PIB) de la Chine, et fait vivre des milliers d'entreprises et d'employés peu qualifiés. Le secteur a connu durant deux décennies une croissance fulgurante mais les déboires financiers de groupes immobiliers emblématiques (Evergrande, Country Garden...) alimentent désormais la défiance des acheteurs, sur fond de logements inachevés et de chutes des prix du mètre carré.

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Pour relancer l'immobilier et stimuler l'activité, le gouvernement chinois a multiplié ces derniers mois les mesures de soutien au secteur. Mais les résultats demeurent peu probants et la crise de l'immobilier continue sa descente, freinant d'autant plus la reprise économique du pays.

Pour tenter de contenir l'endettement massif des grands groupes immobiliers chinois, à partir de 2020, Pékin a progressivement durci leurs conditions d'accès au crédit. Problème, cette décision a tari les sources de financement de groupes déjà endettés. Une vague de défauts de paiement a suivi, notamment celui du groupe Evergrande, qui mine la confiance des acheteurs potentiels et se répercute sur l'ensemble du secteur, sur fond de ralentissement économique. Un autre géant chinois du secteur, Country Garden, n'a, de son côté, pas été en mesure d'honorer, le 9 octobre dernier, un paiement portant sur 470 millions de dollars hongkongais (56,7 millions d'euros).

Coup de frein économique

Cette mauvaise note tombe un peu plus d'un mois après que le Bureau chinois de statistiques (BNS) ait annoncé un tassement de sa croissance économique pour le troisième trimestre 2023 (+4,9% sur un an). Il s'agit d'un sérieux coup de frein sur l'activité de la deuxième puissance économique mondiale puisque cette dernière s'était établie à +6,3% au deuxième trimestre.

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De plus, ce chiffre, déjà inquiétant pour un pays habitué à une croissance à deux chiffres depuis des années est trompeur, car la comparaison se fait toujours avec la même période un an plus tôt. Or en 2022, l'activité était largement pénalisée par les restrictions draconiennes contre le Covid-19. D'un trimestre à l'autre, base de comparaison plus réaliste, la croissance du géant asiatique accélère à +1,3%, après +0,8% sur la période juillet-septembre, soit un quasi surplace.

Objectif de croissance perturbé

Ces récents mauvais chiffres semblent bien loin de l'objectif de croissance pour 2023, fixé par le gouvernement à « environ 5% ». D'ailleurs, ce dernier pourrait être difficile à atteindre sans plan de relance massif, estiment certains économistes alors que le gouvernement privilégie les mesures ciblées.

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« Des mesures plus robustes » seront nécessaires, estimait mi-octobre l'analyste Gene Ma, de l'Institut de la finance internationale (IIF), auprès de l'AFP. L'an dernier, le PIB du géant asiatique avait progressé de 3%, loin de l'objectif officiel de 5,5%, et à l'un des rythmes les plus faibles depuis quatre décennies.

(Avec AFP)