Ukraine : l'UE débloque 500 millions d'euros pour produire deux millions d'obus d'ici 2025

Par latribune.fr  |   |  1098  mots
Les vingt-sept ont annoncé ce vendredi le déblocage de 500 millions d'euros pour produire deux millions d'obus d'artillerie par an d'ici 2025 (photo d'illustration). (Crédits : VIACHESLAV RATYNSKYI)
L'Union européenne a débloqué de nouvelles aides pour développer son industrie de défense et aider l'Ukraine face à l'invasion russe. D'autant que le pays manque de plus en plus d'hommes, de munitions et de systèmes de défense aérienne.

L'Europe continue de renforcer son industrie de défense. Les vingt-sept ont annoncé ce vendredi le déblocage de 500 millions d'euros pour produire deux millions d'obus d'artillerie par an d'ici 2025, une demande insistante de l'Ukraine pour se défendre contre la Russie et son invasion depuis le 24 février 2022.

Au total, l'Union européenne a confirmé vouloir consacrer quelque deux milliards d'euros au renforcement de ses capacités de défense, dans le cadre de plusieurs programmes européens déjà en place, selon un communiqué de la Commission européenne, dont les 500 millions d'euros pour les obus.

L'artillerie, nerf de la guerre

La capacité actuelle de production des obus de 155 mm, les plus utilisés en Ukraine, était d'un million par an à fin janvier. Pour la doubler, la Commission européenne a identifié 31 projets dans l'UE et en Norvège. Des projets qui seront consacrés aux deux tiers à la production de poudre et d'explosifs, les composants dont l'Europe manque le plus.

De son côté, le chancelier allemand Olaf Scholz a annoncé le même jour l'établissement d'une coalition des alliés de l'Ukraine sur l'artillerie à longue portée, des armes également réclamées par Kiev. Dans le cadre du format Ramstein, groupe de contact des alliés sur la défense de l'Ukraine, « nous créons une nouvelle coalition de capacités pour l'artillerie à longue portée », a déclaré le dirigeant lors d'une conférence de presse aux côtés des chefs de l'Etat français Emmanuel Macron et polonais Donald Tusk réunis à Berlin.

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Capacités de production insuffisantes

Il faut dire qu'après un peu plus de deux ans de guerre, l'armée ukrainienne est en manque d'effectifs et réclame des munitions et des systèmes de défense aérienne pour contenir une armée russe à l'offensive. D'autant que les craintes d'une défaite de l'Ukraine face à la Russie, faute d'armements suffisants, ont grandi ces dernières semaines, après plusieurs avancées des forces russes sur le champ de bataille. Le renseignement américain a même averti lundi que « la dynamique est en train de changer de plus en plus en faveur de Moscou ».

« L'Ukraine n'est pas à court de courage et de ténacité, elle est à court de munitions. Et nous commençons à manquer de temps pour les aider », avait également alerté le directeur de la CIA, Bill Burns.

Mais les aides de la part des Occidentaux ont rencontré quelques obstacles ces derniers mois. En effet, l'UE tente depuis deux ans de renforcer son soutien militaire à l'Ukraine, mais s'est heurtée à des capacités de production insuffisantes, notamment en ce qui concerne les obus d'artillerie devenus essentiels dans cette guerre de positions. Encore l'année dernière, les Européens avaient promis de fournir un million d'obus à l'Ukraine d'ici la fin mars 2024, mais les responsables européens ont reconnu que cet objectif ne serait pas atteint. Ils ont toutefois assuré qu'ils le seront d'ici la fin de l'année.

L'UE et ses Etats membres ont tout de même déjà consacré quelque 28 milliards d'euros en aide militaire à l'Ukraine. Les 27 pays membres de l'UE ont aussi trouvé mercredi un accord pour ajouter 5 milliards d'euros à un fonds visant à financer l'achat d'armes pour l'Ukraine. La Commission européenne a également présenté la semaine dernière une nouvelle stratégie en matière de défense, qui vise à développer la coopération entre Etats membres et garantir des commandes aux industriels européens. Les 27 doivent en discuter lors d'un sommet européen la semaine prochaine à Bruxelles.

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Aide bloqué au congrès

Outre-Atlantique, les aides patinent également. En effet, une aide américaine d'un montant de plus de 60 milliards d'euros est toujours bloquée au Congrès. Approuvé mi-février par le Sénat, l'adoption finale du texte est toujours suspendue au bon vouloir des partisans de Donald Trump à la Chambre, qui refusent en l'état d'examiner le texte. Et en pleine année électorale aux Etats-Unis, la question s'est transformée en bras de fer entre Joe Biden et son prédécesseur.

La Maison Blanche a toutefois annoncé mardi une aide de 300 millions de dollars (274 millions d'euros) pour l'Ukraine. Elle comprend notamment des missiles antiaériens, des munitions et des obus d'artillerie. « C'est une aide relativement modeste, destinée à donner à l'Ukraine le minimum nécessaire pour une courte période », a indiqué un haut responsable américain.

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Toujours plus d'aides

Mais est-ce suffisant ? Pas au regard de certains dirigeants ou personnalités politiques. Encore hier, le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a réclamé plus de munitions pour l'Ukraine. Le problème, ce n'est pas le manque de capacités dans les industries de défense, c'est une question de « volonté politique » nécessaire pour « prendre les décisions et donner la priorité à notre soutien à l'Ukraine », a-t-il ainsi clamé auprès des membres de l'Alliance atlantique.

D'autant que la Russie a mis son économie sur le pied de guerre et reçu des centaines de milliers d'obus de la Corée du Nord. Ainsi, d'après un document du ministère des Finances consulté fin septembre dernier par l'AFP, les dépenses de Défense vont ainsi augmenter de 68% en 2024 par rapport à 2023 et atteindre 10.800 milliards de roubles (environ 106 milliards d'euros). Au global, la somme allouée à la Défense va représenter environ 30% des dépenses fédérales en 2024 et 6% du PIB, une première dans l'histoire moderne de la Russie.

De son côté, la Pologne, l'un des plus fidèles alliés de Kiev, a exhorté à plusieurs reprises ses partenaires occidentaux à augmenter leurs dépenses en matière d'aide militaire pour contrer l'invasion russe. Avant de se rendre aux Etats-Unis en début de semaine pour rencontrer Joe Biden, le président polonais a déclaré qu'il allait proposer aux membres de l'Alliance de l'Atlantique Nord de consacrer non pas 2% de leur PIB à leur budget défense comme c'est le cas aujourd'hui, mais 3%. Un effort très important alors que certains membres n'ont toujours pas atteint la cible des 2%. Pour rappel, dix-huit pays de l'Otan sur 31 atteindront cette année cet objectif, avait annoncé mi-février le secrétaire général de l'Alliance Jens Stoltenberg.

(Avec AFP)