Finalement, la France participera à l'initiative de la République tchèque, qui entend jouer les intermédiaires pour des pays européens qui souhaitent acquérir des obus produits hors d'Europe, puis les fournir à l'Ukraine. « L'initiative prise par la République tchèque en matière de munitions est un complément important auquel nous adhérons et donc nous allons travailler ensemble, a annoncé mardi Emmanuel Macron lors de sa visite à Prague. (...) C'est l'illustration d'un volontarisme et d'un pragmatisme ». En dépit des doutes sur les quantités d'obus identifiées par la République tchèque et la volonté du chef de l'État français de privilégier la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE), le pragmatisme l'a finalement emporté pour aider à tout prix l'Ukraine, dans une période difficile, à résister à l'agression russe.
« L'initiative tchèque est extrêmement utile, nous la soutenons, nous y participerons. Elle consiste à aller chercher des munitions partout où elles sont disponibles, compatibles avec les équipements que nous avons livrés », a expliqué Emmanuel Macron.
5.000 obus par jour
Les ministres de la défense vont poursuivre les travaux pour trouver des solutions très rapidement et coordonner toutes les initiatives similaires lancées par plusieurs pays européens. « Nous avons commencé des travaux qui étaient jusqu'alors conduits séparément, et là c'est un travail de mutualisation de plus grande efficacité », a expliqué mardi Emmanuel Macron. Pourquoi ce pragmatisme ? « Les besoins de l'Ukraine sont d'un tel niveau qu'il faut aller chercher maintenant au-delà de ce que nous pouvons produire et de ce que nous avons en stock, c'est le sens de cette initiative. Il faut aussi aller chercher vers des pays tiers non-européens des capacités restantes pour faire face aux besoins de court terme en termes de munitions à l'Ukraine », a précisé le président français. Car les forces ukrainiennes consomment 5.000 obus environ par jour.
En dépit de l'accélération et de l'augmentation des productions en Europe ainsi que de la livraison des stocks d'obus disponibles, les pays européens sont très loin de pouvoir satisfaire les demandes des Ukrainiens, confrontés à une guerre de haute intensité très consommatrice en munitions. Par exemple, la France devrait produire 4 à 5.000 obus par mois d'ici à la fin de l'année (contre 2.000 au début de la guerre). Trop peu pour tenir les positions face aux Russes. D'autant que la France souhaite garder une partie de cette production pour ses propres forces. « Nous devons garder des capacités pour nous défendre nous-mêmes », a averti Emmanuel Macron.
Avec quels financements ?
« Les ministres vont nous proposer les voies et moyens de le faire et je pense que, dans ce cadre, cela peut être une mobilisation bilatérale, ça peut être des coopérations avec ces tierces parties, des financements bilatéraux comme des financements européens, ceux de la Facilité européenne de paix qui peuvent être mobilisés pour partie au service de cette initiative », a souligné Emmanuel Macron. Pourtant, la France avait été très claire sur le financement de cette initiative. C'est « une initiative extra-européenne, en tout cas hors des mécanismes financiers de l'Union européenne et hors des discussions que nous avons en ce moment sur la Facilité européenne de paix », précisait pourtant la présidence de la République en fin de semaine.
Le président a exclu de financer ces achats de munitions avec les avoirs russes gelés pour des raisons de légalité. En revanche, il a expliqué que « la position de la France est simple : nous sommes tout à fait favorables à la proposition de taxer les revenus des avoirs qui sont identifiés et dont le cadre légal a été précisé sur Euroclear, ce qui représente 3 à 5 milliards par an ». Il est également favorable à financer cet effort, « y compris avec des financements européens plus innovants, comme l'a proposé, par exemple, la Première ministre (estonienne, ndlr) Kaja Kallas, consistant à apporter des garanties budgétaires nationales pour émettre sur le marché de la dette commune afin de financer notre effort industriel et de guerre ». Cela fait partie des options que la France soutient.
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