Allemagne : la consommation a tiré la croissance en 2015

Par Romaric Godin  |   |  633  mots
Le PIB allemand a progressé de 1,7% l'année dernière
L’Allemagne affiche une croissance de 1,7 % en 2015. Un chiffre dû pour les deux tiers à la consommation des ménages.

La croissance allemande a été de 1,7 % en 2015, selon la première estimation de l'Office fédéral des statistiques, Destatis. Cette croissance est supérieure à la moyenne des dix dernières années (1,3 %) et elle est quasi-stable par rapport à celle de 2014 (1,6 %), mais largement au-dessus de celle de 2013 (0,3 %). On est cependant loin des chiffres enregistrés en 2010 et 2011 (4,1 % et 3,7 %), ainsi qu'en 2006 et 2007 (3,7 % et 3,3 %).

La consommation tire la croissance

Cette année 2016 dénote la poursuite du rééquilibrage de la première économie européenne. Le premier contributeur de la croissance allemande l'an dernier a été la consommation des ménages à hauteur d'un point de PIB, soit le double de sa contribution en 2014. La bonne tenue du marché du travail (l'Allemagne est en situation de plein emploi) et la hausse continuelle des revenus (le revenu disponible a augmenté de 2,8 %) expliquent en grande partie cette performance qui a été encore renforcée par l'inflation faible (0,3 % en 2015), notamment sur les produits énergétiques. Sur un an, la consommation privée a ainsi progressé de 2,5 %. Du jamais vu depuis 2012.

L'Etat a également par ces dépenses largement contribué à la croissance, ce qui est une nouveauté outre-Rhin. La contribution des dépenses de l'Etat a ainsi été de 0,5 point de PIB en 2015 contre 0,3 point en 2014. Malgré une politique de contrôle des dépenses au niveau fédéral, la hausse des recettes a permis d'injecter davantage de fonds dans l'économie.

Faiblesse de l'investissement et de la contribution extérieure

En revanche, malgré une nouvelle progression, l'investissement n'a guère soutenu la croissance en Allemagne. L'investissement productif apporte 0,2 point de PIB, celui dans la construction est neutre. Non que les entreprises allemandes aient moins investi, mais elles ont réduit la croissance de ces investissements. Sur un an, les investissements productifs ont progressé de 4 % contre 4,7 % en 2014. Le rythme de 2015 est cependant supérieur à celui de 2012 et 2013. Mais il dénote une vraie prudence face à un environnement international fragile.

Du reste, la demande externe n'a apporté que 0,2 point au PIB allemand. Là encore, la faute n'en est pas aux exportations, qui continue à bien se comporter (+6,4 % sur un an contre +3,9 % en 2014), mais bien plutôt aux importations qui viennent alimenter la croissance de l'investissement et qui ont doublé leur rythme de croissance en 2015, passant de + 2,1 % à + 4 %. C'est ici le signe du rééquilibrage de l'économie allemande.

Bon millésime

L'année 2015 est donc un cru honnête pour l'économie allemande. Mais, compte tenu des circonstances exceptionnelles liées au plein emploi, à l'excédent courant immense du pays, aux taux bas, à l'euro faible et aux prix faibles des matières premières, ce n'est pas non plus une croissance exceptionnelle. La participation de l'Etat et des entreprises à cette reprise de la demande intérieure reste encore relativement modeste. Et si cette croissance est une bonne nouvelle pour les économies de la zone euro, elle n'est sans doute pas encore suffisante pour servir réellement de « locomotive » à l'ensemble de l'union monétaire.

Une croissance durable ?

Enfin se pose la question de la capacité de l'Allemagne à tenir ce rythme de croissance dans un contexte international toujours marqué par la crise des émergents, et notamment de la Chine, ainsi que par une croissance faible dans le reste de la zone euro. Les derniers chiffres de la production industrielle n'étaient guère encourageant. Mais, pour le moment, le consommateur allemand veille. D'autant que 2016 sera aussi marquée pour l'économie allemande par le défi de l'intégration du million de migrants arrivé en 2015. L'Etat fédéral a annoncé davantage de dépenses pour relever ce défi. Quel sera l'impact sur la demande intérieure allemande ? L'année qui commence apportera sa réponse. Les économistes, eux, tablent sur une croissance encore un peu supérieure, mais toujours inférieure à 2 %.