Brexit : après la rencontre entre May et Juncker, chronique d'une escalade

Par Alice Cassoulat  |   |  794  mots
"La Commission européenne a durci sa position de négociation. Des menaces ont été proférées contre le Royaume-Uni par des politiciens et responsables européens", explique la Première ministre britannique Theresa May, suite à son dîner le mercredi 26 avril, avec Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne.
Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a rencontré Theresa May, Première ministre britannique, mercredi 26 avril au sujet du Brexit. Depuis cette rencontre, la relation entre Londres et Bruxelles se tend, laissant présager un divorce (encore) plus compliqué qu'anticipé.

Une première "rencontre constructive" entre la Première ministre britannique Theresa May et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a eu lieu à Downing Street mercredi 26 avril,. Le sujet de ce dîner : un début de négociation du Brexit.

Malgré un accueil chaleureux devant les caméras, le dîner semble s'être très mal passé du côté de Jean-Claude Juncker. Selon lui, Theresa May se ferait de grandes illusions sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne, d'après le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Un divorce plus compliqué que prévu

Ces derniers mois, Theresa May avait été confrontée à la dure réalité d'un Brexit qui s'annonce d'ores et déjà long et coûteux à mettre en place. Même si les négociations officielles ne débuteront qu'après les élections législatives britanniques, certaines tractations ont été entamées au cours des deux derniers mois. Toutes ont prouvé à la Première ministre que la sortie de l'Union Européenne ne se ferait pas sans difficulté :

  • Le 29 mars, Theresa May envoie la lettre officielle du divorce Royaume-Uni/Union européenne à Bruxelles. Missive dans laquelle elle réclame que tous deux travaillent en parallèle pour établir un partenariat afin de conserver la sécurité européenne et une relation commerciale, et de ne pas promouvoir des frontières entre les deux Irlande pour ne pas déstabiliser la paix entre les deux pays.
  • Le 31 mars, la chancelière allemande Angela Merkel refuse de commencer des négociations parallèles. Theresa May répond à ce refus en menaçant de ne plus venir en aide dans les procédures européennes antiterroristes.

La négociation du Brexit en version cartoon: Theresa May veut plus que sa part du gâteau.

Confrontés au déni de Theresa May, qui refuse d'accepter la part de responsabilité financière que doit le Royaume-Unis à l'Europe, les chefs d'Etats réagissent :

"Nous ne voulons pas affaiblir le Royaume-Uni. Mais nous ne voulons pas davantage que le reste de l'Europe soit affaibli. Le Royaume-Uni, après la sortie [de l'UE], ne devrait pas obtenir des avantages que d'autres pays n'auraient pas," explique Le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble.

"Je quitte Downing Street dix fois plus pessimiste que je ne l'étais"

D'après un article du Sunday Times, le 1er mai, Jean-Claude Juncker s'est dit déçu par l'entêtement de la Première ministre. Selon lui, May vivrait dans "une autre galaxie", vu son refus d'accepter de payer sa part à l'Europe. "L'UE n'est pas un club de golf", aurait même ajouté le président de la Commission.

Michel Barnier, le négociateur en chef du Brexit, également présent au dîner, a ajouté que le Royaume-Uni se faisait des illusions en pensant que la sortie de L'Europe se ferait sans dommages collatéraux. Le mot final de Juncker : "Le Brexit ne peut pas être un succès", si celui-ci se fait dans les conditions réclamées par Theresa May.

Cette dernière, humiliée par ce qu'elle considérait au départ comme étant des "rumeurs de Bruxelles", a exprimé son mécontentement dans un discours devant la presse à son retour d'un rendez-vous avec la reine à Buckingham Palace au sujet des législatives le 3 mai. Selon elle, ces commentaires doivent être interprétés comme une déclaration de guerre venant de Bruxelles, en les accusant de semer la confusion au sein des élections britanniques.

"Les événements de ces derniers jours ont montré que, peu importe nos souhaits, et peu importe si les positions des autres leaders européens [sur le Brexit] sont raisonnables, il y en a, à Bruxelles, qui ne veulent pas que ces négociations réussissent, et qui ne veulent pas que le Royaume-Uni prospère," a déclaré la Première ministre.

Les dirigeants européens commencent à s'inquiéter au sujet de ce Brexit. Pensant avoir été clairs dans la procédure financière inévitable de celui-ci, ils sont aujourd'hui complètement abasourdis : Theresa May ne veut rien entendre. Ce dîner annonce donc à quel point l'entente va être difficile à trouver lors des négociations.