Hausse des taux : pas de pause prévue face à l'inflation, prévient (aussi) Christine Lagarde

Par latribune.fr  |   |  756  mots
Elle suggère ainsi que les gardiens de l'euro devront encore resserrer davantage la vis du crédit, son arme favorite pour abaisser les tensions sur les prix. (Crédits : KAI PFAFFENBACH)
La présidente de la BCE n'écarte pas de nouvelles hausses des taux d'intérêt. Et de doucher les espoirs d'une pause sur le durcissement monétaire, emboîtant ainsi la position de la réserve fédérale américaine. Pour rappel, la Banque centrale européenne a relevé au total de 3,75 points de pourcentage ses taux depuis juillet 2022, un rythme inédit dans l'histoire de l'institut monétaire.

La baisse des taux ne sera pas immédiate. La présidente de la Banque centrale européenne (BCE) laisse la porte ouverte à de nouvelles hausses des taux, dans une interview parue mercredi dans la presse japonaise, parue ce mercredi 10 mai.

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Lors des neufs derniers mois, l'institution monétaire européenne a « agi de manière très délibérée et décisive afin de lutter contre l'inflation » avec sept hausses de taux d'affilée jusqu'en mai, a rappelé Christine Lagarde, dans cette interview accordée au quotidien Nikkei. La dirigeante française a toutefois reconnu qu'il restait « encore du chemin à parcourir ». Elle suggère ainsi que les gardiens de l'euro devront encore resserrer davantage la vis du crédit, son arme favorite pour abaisser les tensions sur les prix.

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Des risques « importants »

Les denrées alimentaires et un large éventail de biens continuent de voir leurs prix grimper. L'inflation en zone euro a atteint 7% en avril. Elle navigue ainsi toujours bien au-delà de l'objectif de 2% visé par la BCE.

« Il existe des facteurs qui peuvent induire des risques à la hausse importants pour les perspectives d'inflation », « en particulier, en ce qui concerne les augmentations de salaires dans divers pays européens », selon Christine Lagarde.

Cette déclaration n'est pas anodine. « Sur la base des données actuelles, nous devrons continuer à augmenter les taux d'intérêt plus longtemps que prévu », a ainsi écrit Peter Kazimir, le gouverneur de la Banque de Slovaquie et membre du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE), mardi sur son blog. « Le ralentissement du rythme à 25 points de base est donc une étape qui nous permettra d'augmenter progressivement les taux pendant plus longtemps, si cela s'avère nécessaire et justifié par les données entrantes ».

Un constat partagé

Dans une interview accordée mardi à la Frankfurter Allgemeine Zeitung, Joachim Nagel, le président de la Banque Fédérale d'Allemagne pousse, lui aussi, en faveur d'un maintien de la hausse des taux. Selon lui, « les taux devraient continuer d'augmenter » pour poursuivre la lutte contre l'inflation, qui a regagné 0,1 point de pourcentage en avril, à 7% en avril dans la zone euro, malgré sept hausses consécutives en neuf mois qui ont porté les taux directeurs au-delà de 3%.

La hausse des prix pèse sur le pouvoir d'achat des ménages et alimente les revendications de hausses de salaire. Les économistes s'attendent désormais à ce que l'institut monétaire relève ses taux d'intérêt lors de ses deux réunions prévues avant la pause estivale.

Concernant l'économie, la zone euro est « dans une meilleure position que ce que nous craignions il y a six mois », quand l'Europe devait parer à l'approvisionnement en énergie en devant se passer du gaz russe, estime la présidente de la BCE. Cependant, une ombre demeure selon elle au tableau. De grandes incertitudes subsistent, « y compris ce qui se passera dans la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine, et certains signes émergents de faiblesse de la demande de produits manufacturés ».

Même son de cloche aux Etats-Unis

La poursuite de la politique de resserrement monétaire européenne rencontre un écho aux Etats-Unis. La banque centrale américaine (Fed) n'exclut pas non plus un relèvement supplémentaire des taux lors de sa prochaine réunion, a indiqué mardi un de ses responsables, une semaine après une réunion qui avait marqué un changement de ton et laissé prévoir une pause.

Mais quelques heures avant Christine Lagarde, la Fed est revenue sur ces propos. Et de doucher les espoirs d'une pause. « Nous n'avons pas dit que nous avions fini d'augmenter les taux », a déclaré John Williams, le président de la Fed de New York.

Les effets de ces actions sur l'économie réelle mettent des mois à se faire sentir. Et, récemment, la crise bancaire a ajouté une couche supplémentaire de difficultés pour les emprunteurs, puisque les banques accordent moins facilement de crédits à leurs clients, ce qui agit comme une hausse des taux. La prochaine réunion de la Fed aura lieu les 13 et 14 juin. La Fed a, depuis mars 2022, relevé de 5 points son principal taux directeur, le faisant passer de la fourchette de 0 à 0,25% dans laquelle il se trouvait depuis le début de la pandémie, à 5,00-5,25%.

(Avec AFP)