La Pologne et la Hongrie dans le viseur de l'Union européenne

Par Grégoire Normand  |   |  897  mots
Le parlement européen a adopté par 393 voix contre 221 et 64 abstentions une résolution ce mercredi 17 mai qui donne la possibilité au Conseil européen de constater "qu'il existe un risque clair de violation grave par un État membre" .
Le Parlement européen a recommandé d'engager des sanctions contre la Hongrie pour non respect des règles de droit des traités de l'Union européenne et de ses valeurs démocratiques. Du coté de la Pologne, le dialogue reste ouvert mais les institutions européennes pourraient durcir le ton si Varsovie ne fait pas d'efforts pour accueillir les réfugiés.

L'Europe se montre de plus en plus critique à l'égard de la Pologne et de la Hongrie. Alors que les deux pays multiplient des décisions à l'encontre des ONG, des médias ou des réfugiés depuis plusieurs années, des députés européens ont décidé ce mercredi 17 mai de dénoncer la violation des règles de droit par les deux gouvernements. Le député belge et président du groupe libéral-démocrate Guy Verhofstadt avait déjà adressé à la fin du mois d'avril dernier un véritable réquisitoire contre la dérive autoritaire du gouvernement Orban.

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La Hongrie s'attire les foudres de Strasbourg

Dans une résolution adoptée mercredi 17 mai à Strasbourg, le parlement européen a affirmé que l'ampleur des violations des principes fondamentaux de l'Union européenne commises par la Hongrie justifie la mise en place d'une procédure de sanctions. Les députés européens ont déploré que les procédures d'infraction ouvertes par la Commission européenne en 2015 pour non-respect du droit d'asile ou le mois dernier à propos d'une loi controversée sur l'enseignement supérieur soient restées sans effet.

La résolution, adoptée par 393 voix contre 221 et 64 abstentions, donne la possibilité au Conseil européen de constater "qu'il existe un risque clair de violation grave par un État membre" des valeurs fondamentales de l'UE

Le Premier ministre hongrois Victor Orbán multiplie les attaques contre les organisations non gouvernementales. Crédits : Reuters.

Les récentes évolutions dans le pays ont "provoqué une grave détérioration de l'Etat de droit, de la démocratie et des droits fondamentaux", affirment des élus européens, en citant notamment la liberté d'expression, la liberté académique et les droits des minorités.

En Hongrie, le chef de la diplomatie Peter Szijjarto a rejeté la résolution du parlement européen. Pour lui, cette initiative correspondrait "à une nouvelle attaque du réseau de George Soros contre la Hongrie". Depuis plusieurs années, le milliardaire d'origine hongroise finance différentes organisations non-gouvernementales. Ces dernières favoriseraient les flux migratoires selon Victor Orbán.

Le milliardaire Georges Soros finance plusieurs organisations à but non lucratif dans le monde. Crédits : Reuters.

Le ministre des affaires étrangères hongrois a ajouté dans un communiqué que "les institutions sont manifestement incapables d'accepter le fait que (...) le gouvernement hongrois continue de mener une politique migratoire qui vise exclusivement à garantir la sécurité de la Hongrie".

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Lors d'une conférence de presse ce jeudi 18 mai, le chef du groupe parlementaire Fidesz (parti de Victor Orban) à l'Assemblée nationale a déclaré que "la résolution votée hier par le Parlement européen traite de questions qui, à notre avis, ne relèvent en rien de l'Union européenne ou du Parlement européen".

"La Hongrie conservera sa législation stricte en matière d'immigration et maintiendra la clôture le long de sa frontière sud malgré la demande du Parlement européen d'abrogation des lois restreignant le droit d'asile", a ajouté le ministre de la chancellerie, selon des propos rapportés par Reuters.

 La voie du dialogue avec la Pologne

Du côté de Varsovie, les institutions européennes semblent moins remontées contre la politique du gouvernement conservateur. Une majorité des Etats membres ont appelé cette semaine la Commission européenne à poursuivre le dialogue avec la Pologne. "J'ai vraiment l'impression que le gouvernement polonais est maintenant ouvert au dialogue" et "suis convaincu qu'il est encore possible de réaliser des progrès", a expliqué le premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans.

 Au mois de décembre dernier, la Commission avait donné deux mois aux dirigeants hongrois pour apporter des réponses concernant une réforme du tribunal constitutionnel polonais, qui menacerait l'indépendance de la justice du pays, selon l'AFP. Bien que les réponses apportées par les autorités polonaises ont été jugées insuffisantes, la Commission européenne n'a pas voulu déclenché la procédure de l'article 7 du traité de l'UE. Celle-ci pourrait permettre d'imposer des sanctions à la Pologne réclamées par plusieurs ONG comme Amnesty International ou Human Rights Watch. L'utilisation de cet article pourrait par exemple entraîner la suspension du droit de vote d'un membre de l'UE comme le rappelle le traité :

"Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut décider de suspendre certains des droits découlant de l'application des traités à l'État membre en question, y compris les droits de vote du représentant du gouvernement de cet État membre au sein du Conseil."

Si la voie du dialogue semble bien entamée avec la Pologne, la Commission européenne pourrait à nouveau brandir des menaces de sanctions en raison du refus exprimé par les autorités pour accueillir des réfugiés.

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