Emprunts toxiques : les collectivités locales s'en sortent (plutôt) bien

Par Mathias Thépot  |   |  524  mots
Le stock de dette toxiquedes collectivités territoriales est évalué à 14 milliards d'euros
Comme prévu, un fonds de soutien aux collectivités locales embourbées dans l'affaire des emprunts toxiques a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale. Reste qu'une jurisprudence pénalisant les banques et favorable aux collectivités a été annulée.

Bonne nouvelle pour les collectivités locales, les députés ont voté jeudi soir le dispositif gouvernemental de sortie des emprunts toxiques par les collectivités locales. Comme prévu, le projet de budget 2014 organise la constitution d'un fonds de soutien aux collectivités locales et organismes publics aux finances affectées par des emprunts toxiques, qui sera doté chaque année de 100 millions d'euros sur une durée maximale de 15 ans, soit 1,5 milliard sur la décennie. Ce fonds sera abondé pour moitié par l'État, pour l'autre par les banques dont la taxe de risque systémique va être relevée de 0,5% à 0,539%. Les emprunts toxiques qui seront éligibles au fonds seront précisés par décret.

L'État entend les élus

"C'est la première fois que l'État entend de façon sérieuse et constructive nos propositions, après cinq années d'actions et d'interpellations. C'est une avancée incontestable", s'est réjouie l'association des acteurs publics contre les emprunts toxiques (APCET).

L'affaire des emprunts toxiques concerne quelque 1.500 collectivités ou organismes publics . Entre 300 et 400 contentieux sont en cours, dont plus de 200 auprès de la Sfil (Société de financement local), la société publique héritée de la faillite de Dexia, le leader historique du prêt aux collectivités locales françaises.
Le stock de la dette toxique est évalué à 14 milliards d'euros, selon l'APCET.

La jurisprudence de Nanterre supprimée...

Un aspect de la loi voté hier soir ne convient en revanche pas du tout aux collectivités locales. Il s'agit de l'annihilation d'une décision de justice du TGI de Nanterre favorable aux collectivités locales et qui faisait jurisprudence. Elle obligeait Dexia à recalculer à la baisse les taux consentis au conseil général de Seine-Saint-Denis pour avoir oublié de mentionner un taux d'intérêt déterminant dans un fax, le fameux Taux effectif global (TEG), qui représente le coût réel du crédit.

... car elle faisait peser un risque majeur pour l'État

L'État craignait les répercussions de cette décision :

"Cette jurisprudence fait peser un risque majeur sur les finances publiques, dans la mesure où l'État est actionnaire à 75 % de la Société de financement local (SFIL) et à 44 % de Dexia SA qui détiennent à leur bilan une part très significative de crédits conclus conformément au processus sanctionné par cette jurisprudence", est-il écrit dans le PLF.

Il y est ensuite mentionné que:

"l'absence d'une telle validation législative ferait porter un risque à la fois sur les finances publiques en raison des obligations de l'État actionnaire vis à- vis de ces mêmes établissements (évaluées à 15 milliards d'euros ) ; sur le marché bancaire dans son ensemble (en raison du caractère systémique d'une déstabilisation des établissements Dexia et SFIL) ; enfin sur l'économie en général du fait de l'assèchement de l'accès au crédit pour les collectivités territoriales, principales contributrices à l'investissement national".

Les autres banques françaises ayant banalisé la vente de ces produits très risqués lors des années 2000 s'en sortent donc à bon compte.