IFRS17 : la nouvelle norme comptable internationale bouleverse le quotidien des assureurs

Par latribune.fr  |   |  672  mots
La norme IFRS 17 est le fruit d'un travail de longue haleine puisque les travaux pour l'instaurer ont commencé en 2004. (Crédits : DR)
Depuis le 1er janvier 2023, s'applique la norme révisée IFRS 17, première véritable « norme internationale d'information financière » appliquée au secteur de l'assurance qui vise à harmoniser l'évaluation des contrats d'assurance entre pays comme à rendre plus transparente leur présentation comptable. De l'avis -partagé- des dirigeants du monde feutré de l'assurance, c'est une révolution. L'IFRS 17 introduit des méthodes qui vont renouveler aussi la manière de mesurer la qualité du pilotage de l'activité, mais encore la communication financière.

Avec IFRS 17, place à l'harmonisation internationale chez les assureurs. L'objectif de cette nouvelle norme est, entre autres, de « réduire les différences d'évaluation et de comptabilisation des contrats d'assurance entre pays », analyse le cabinet d'audit et de conseil Deloitte.

Passage à la comptabilité « prospective » qui anticipe le profit futur

En pratique, il est demandé aux assureurs de passer d'une comptabilité « historique », constatant année après année la valeur générée par les contrats en cours, à une comptabilité « prospective », anticipant dès la signature le profit à venir sur la durée du contrat puis en l'actualisant au réel, année après année. But final : rendre compte de façon plus fidèle dans le temps de la performance d'un contrat.

Entrée en vigueur le 1er janvier 2023, la norme révisée IFRS 17 est en fait le fruit d'un travail de longue haleine. Les travaux menés par le Bureau international des normes comptables (IASB), organisme de droit privé basé à Londres, ont commencé en 2004. C'est là que sont élaborées les normes, dites International Financial Reporting Standards (IFRS, ou en français, « normes internationales d'information financière »), qui assurent aux investisseurs internationaux que l'on parle bien de la même chose d'un pays à l'autre.

Lire aussiL'évaluation des tiers dans le monde de l'assurance : un défi à poursuivre

Plus de transparence de la part des assureurs

Cette méthode a plusieurs conséquences très concrètes pour les assureurs. Elle va mécaniquement faire enfler leur bilan : Crédit Agricole a par exemple prévenu que ses capitaux propres allaient grossir de plus de 1 milliard d'euros.

Elle risque par ailleurs d'ajouter un effet yo-yo aux résultats, en fonction de l'évolution des marchés. De plus, elle oblige les assureurs à davantage de transparence, de l'avis de l'agence de notation Fitch, notamment sur les frais affectés à chacun des contrats.

Les normes IFRS « sont des grands principes, ce ne sont pas des règles », rappelle néanmoins Anne-Marie Jolys-Bris, directrice associée au sein du cabinet de conseil BM&A.

« C'est à chacun d'interpréter, de voir », souligne-t-elle à l'AFP.

Par exemple, quand certains choisiront de répartir certains frais généraux comme les dépenses de publicité, ils pourront préférer les laisser à la charge du groupe ou les répartir sur les divers contrats en diminuant ainsi leur rentabilité.

Pour le cabinet PwC, la nouvelle norme IFRS 17 bouleverse bilans et comptes de résultat en présentant les choses différemment mais elle « ne change pas » la performance d'une activité.

Lire aussiLes assureurs jouent le jeu du bouclier anti-inflation

Les assureurs pas spécialement ravis

La mise en place d'un tel chantier chez les assureurs a été particulièrement lourde, et l'est encore. Chez Axa, elle a « mobilisé ces dernières années l'ensemble des équipes finance dans l'ensemble du groupe », pointait lors de la présentation des résultats du troisième trimestre 2022 le directeur financier Alban de Mailly Nesle.

« C'est une révolution copernicienne complète de la façon de comptabiliser les activités d'assurance », a souligné auprès de l'AFP le directeur général de CNP Assurances Stéphane Dedeyan.

« Tous les réflexes vont être bouleversés », a-t-il ajouté en marge de la présentation des résultats annuels de l'assureur public le 16 février, les derniers sous l'ancienne norme, IFRS 4. La société les présentera à nouveau le 11 avril, selon les nouvelles règles.

Chaque direction financière a par ailleurs fait ses petits calculs. La banque HSBC a déjà prévenu que la norme IFRS 17 « pourrait avoir un impact négatif important sur la rentabilité » de ses activités d'assurance.

Reste que comparer les résultats des assureurs selon la norme IFRS 17 sera toutefois « difficile dans un premier temps », préviennent les analystes de Fitch, en raison « des différences entre les approches des sociétés ».

Lire aussiBanques-assurances : le système financier français assez robuste pour absorber les chocs

(avec AFP)