Banques : le scénario très, très noir du stress test du gendarme européen

Par Delphine Cuny  |   |  526  mots
C'est "le scénario le plus sévère à ce jour" depuis la première vague de tests de résistance des banques aux chocs remontant à 2014, a expliqué l'Autorité bancaire européenne.
L'Autorité bancaire européenne (EBA), qui déménagera bientôt à Paris, a lancé ce mercredi sa troisième vague de tests de résistance aux chocs auxquels elle va soumettre 48 banques de l'UE. Le scénario est "le plus sévère" jamais testé, soit deux années de récession et de fortes tensions sur les marchés financiers. Résultats d'ici au 2 novembre.

C'est une épreuve redoutée par les banques européennes : la troisième vague de "stress tests", les tests de résistance aux chocs, macro-économiques et financiers, qu'elles se doivent de pouvoir encaisser. L'Autorité bancaire européenne (EBA) en a donné le coup d'envoi ce mercredi en dévoilant les hypothèses qu'elle a imaginées : c'est "le scénario le plus sévère à ce jour" depuis la première édition remontant à 2014, souligne-t-elle dans un communiqué.

Ce scénario très, très noir serait celui de deux années consécutives de récession dans l'Union européenne, en 2018 (-1,2%) et en 2019 (-2,2%), suivies d'un modeste rebond en 2020 (+0,7%). Cela reviendrait à un écart de PIB de 8,3% en 2020 par rapport aux hypothèses actuelles de croissance dans l'UE, à un accroissement de 3,3 points du taux de chômage et à une chute de 27,7% des prix de l'immobilier par rapport aux estimations en vigueur. La sévérité de ces hypothèses se situe "entre le scénario négatif et le scénario extrêmement négatif" de la Fed américaine en 2017 estime l'ABE.

Ces tests seront appliqués à un échantillon de 48 banques représentant 70% des actifs bancaires de la zone euro, avec l'aide de la Banque centrale européenne (BCE). Les résultats seront publiés au plus tard le 2 novembre. Ils serviront à la BCE à affiner les niveaux de capitaux requis des banques qu'elle surveille.

La précédente vague, à l'été 2016, avait notamment la grande fragilité de la banque italienne Monte dei Paschi di Siena, renflouée par l'Etat italien l'an dernier.

Correction sur les marchés, dette publique et privée

L'ABE a identifié quatre risques systémiques et détaille les menaces les plus significatives pour la stabilité du secteur bancaire européen, qui peuvent en outre s'enchaîner par un effet boule de neige.

Tout d'abord, un risque de correction brutale sur les marchés financiers (d'actions et obligataires) mondiaux, dont "les valorisations sont élevées" souligne l'ABE : des tensions géopolitiques ou des changements d'attentes des investisseurs pourraient entraîner la chute de la valeur des actifs et une accentuation de la courbe des taux, donc des conditions de financement plus tendues.

Ensuite, l'impact d'un recul de l'activité économique et de la hausse du chômage sur la rentabilité déjà faible des banques de certains pays (on pense à l'Italie notamment).

Troisième menace : une éventuelle remontée des primes de risques (donc des taux) pourrait rendrait difficilement soutenables les dettes publiques et les dettes privées (des entreprises).

Enfin, les problèmes de liquidités dans la finance non bancaire : si les fonds d'investissement, les fonds de pension, les assurances, étaient contraints de brader des actifs, cela accentuerait la chute de la valeur de ces actifs et pourrait contaminer l'ensemble du système.

L'ABE, qui déménagera dans quelques mois de Londres à Paris à cause du Brexit, ne mentionne que très peu la sortie du Royaume-Uni de l'UE : elle indique que son scénario noir "balaie un large éventail de risques macroéconomiques associés au Brexit", notamment les effets sur les échanges commerciaux avec l'Union européenne.