Les difficultés du capital-investissement français, dont les ressources financières s?étiolent, Laurence Parisot les entend. Mais cela n?a pas empêché la présidente sortante du Medef de mettre le private equity face à ses responsabilités, lors de la conférence annuelle de l?Afic (association française des investisseurs pour la croissance), qui se déroulait ce mercredi. Le capital-investissement veut convaincre les pouvoirs publics d?orienter davantage l?épargne financière des Français dans sa direction ? Eh bien, qu?il commence par mieux expliquer son métier, souvent assimilé à celui des « hedge funds » (fonds spéculatifs).
« Ces dernières années, les Français ont un peu mieux compris l?économie. Mais pas la finance. Votre modèle, encore peu connu, inquiète. Vous devez donc faire des efforts de pédagogie, à l?égard du grand public, du monde politique et des entreprises elles-mêmes », a lancé Laurence Parisot aux fonds de capital-investissement réunis au Palais Brongniart, l?ancien temple de la Bourse de Paris.
« Des financiers qui prennent la substance d?une entreprise »
De fait, il y a tout juste un an, François Hollande lui-même avait déclaré, lors d?une visite à l?usine de chariots-élévateurs Still-Saxby - propriété du fonds de private equity américain KKR - qu?il souhaitait remettre à plat la technique du LBO (Leverage Buy-Out : acquisition par endettement). Et ce, afin de la réserver exclusivement aux salariés et aux cadres d?une société, « et non à des financiers qui viennent prendre la substance d?une entreprise et la vendre après. » Certes, du chemin a été parcouru depuis. « Nous avons réussi à faire comprendre que notre métier ne consiste pas à dépecer des entreprises », estimait ainsi, le 10 avril dernier, Louis Godron, président de l?Afic, au vu des rapports Gallois, Berger-Lefebvre et Beylat-Tambourin, qui recommandent au gouvernement de mieux orienter l?épargne financière des ménages vers le capital-investissement.
Formuler des exigences de rendements raisonnables
« Vous avez fait des efforts de pédagogie, je le reconnais, mais il faut aller plus loin », insiste de son côté Laurence Parisot. Pour la future ex-patronne des patrons, les fonds de capital-investissement doivent notamment lever le pied sur les taux de rendement qu?ils exigent de leurs investissements dans les PME. « S?il vous plaît, soyez raisonnables. Si vous voulez être mieux compris, vous devez avoir des demandes de rendements jouables », a martelé Laurence Parisot. Il est vrai que le capital-investissement français est l?un des plus rentables d?Europe, en particulier sur le segment des LBO, qui affichait en France un TRI (taux de rendement interne) de 14,6%, fin 2011, contre une moyenne de 11,4% en Europe, selon l'Afic.
Des investissements en chute de près de 38%
Mais, si Laurence Parisot pousse le capital-investissement dans ses retranchements, c?est pour que ce dernier persuade le gouvernement de lui donner les moyens de continuer à financer l?économie française. « Nous avons drôlement besoin de vous », reconnaît la présidente du Medef. Bon an mal an, le private equity français comble en effet 7% des besoins en financement des PME, alors que la Bourse y répond à hauteur de 1% seulement. Or, leurs réserves se tarissant, les fonds de capital-investissement ont limité leurs apports aux entreprises à 6 milliards d?euros en 2012, soit une chute de près de 38%.