Polémique sur le sauvetage public des banques italiennes

Par Delphine Cuny  |   |  527  mots
"Si des banques ne sont pas rentables, il est préférable de les laisser quitter le marché plutôt que de les maintenir artificiellement en vie avec des recapitalisations préventives", a fait valoir une porte-parole du ministère allemand des Finances. La liquidation des deux banques de Vénétie par Rome devrait coûter 17 milliards d'euros.
L'Allemagne estime que la Commission ne devrait pas valider l'aide d'Etat de 17 milliards d'euros pour liquider les banques vénitiennes. L'Espagne souligne que le cas de Banco Popular a été réglé sans argent public.

Le sauvetage par des fonds publics de deux banques italiennes en perdition fait polémique en Europe. L'Allemagne a exprimé son désaccord avec la mise en liquidation de Banca Popolare di Vicenza et Veneto Banca, dans le cadre d'une "recapitalisation préventive" par l'Etat italien, approuvée par la  Commission européenne. Une aide d'Etat qui pourrait atteindre 17 milliards d'euros, soit trois fois plus qu'estimé initialement, et qui fait grincer des dents outre-Rhin :

"Si des banques ne sont pas rentables, il est préférable de les laisser quitter le marché plutôt que de les maintenir artificiellement en vie avec des recapitalisations préventives", a déclaré une porte-parole du ministère allemand des Finances, sans citer spécifiquement les banques italiennes.

"Le recours à une aide publique devrait être évité autant que possible dans les situations de faillite. Dans les procédures de liquidation également. C'est la mission de la Commission européenne de garantir que l'aide de l'Etat est limitée au minimum et d'éviter le contournement des règles de démantèlement via des programmes nationaux de mise en liquidation"

En Espagne, des actionnaires ruinés

En Espagne, le ministre de l'Economie, Luis de Guindos, a relevé que le récent sauvetage de Banco Popular par sa compatriote Santander pour un euro symbolique n'avait rien à voir - c'est le privé qui a tout assumé. Glissant au passage que l'Italie s'y prenait fort tard pour assainir son système bancaire :

"Ce qu'est en train de faire l'Italie est ce qu'a fait l'Espagne en 2012. Nous avons dû injecter de l'argent public et nous avons restructuré et assaini le système financier. L'Italie le fait maintenant, et actuellement la restructuration est impossible en Italie sans aides publiques", a déclaré le ministre espagnol de l'Economie. "C'est très différent de ce qui s'est passé avec Banco Popular, pour laquelle il n'y a eu aucune sorte d'aide publique" a-t-il souligné.

L'Espagne avait dû injecter plus de 41 milliards d'euros, prêtés par l'Union européenne. La facture totale du sauvetage des banques espagnoles aurait même atteint 61 milliards aux contribuables, selon la cour des comptes locale. Pour Banco Popular, qui a subi une crise de fuite de dépôts et souffrait d'un stock d'actifs toxiques, Santander a accepté de lancer une augmentation de capital de 7 milliards d'euros et les quelques 300.000 actionnaires de Popular, dont de petits porteurs, ont tout perdu du jour au lendemain. Des porteurs d'obligations subordonnées ont aussi perdu la totalité de leur investissement.

"En Espagne, les dirigeants ont eu le courage politique de ruiner des gens. Ce n'est pas le cas en Italie, où les banques n'ont, en outre, pas été très insistantes sur le recouvrement de leurs créances" analyse le dirigeant d'une grande française.

En outre, un autre sauvetage sur fonds publics se prépare en Italie, celui de Monte Paschi, la quatrième italienne, qui prévoit l'injection de 6,6 milliards d'euros d'aide de l'Etat, qui sera officiellement validée par la Commission européenne sous peu. "C'est une affaire réglée", a déclaré lundi le vice-gouverner de la Banque d'Italie, Fabio Panetta.