A380 : Airbus va réduire la production à 1 avion par mois !

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  829  mots
Le carnet de commandes de l'A380 s'élève à 126 exemplaires (Crédits : <small>DR</small>)
Selon nos informations, Airbus a décidé de réduire de plus de la moitié la production de son très gros-porteur. La cadence passera à 1 exemplaire par mois en 2018, contre 2,5 aujourd'hui. La faiblesse des ventes est à l'origine de cette mesure.

Article modifié à 20h45 avec la confirmation d'Airbus

C'est un coup dur très pour l'A380 qui en dit long sur les perspectives commerciales du très gros-porteur européen et qui relance les questions sur l'avenir de ce programme lancé il y a à peine 16 ans.

27 livraisons en 2015

Selon nos informations, Airbus a décidé de réduire la production de l'A380. Au deuxième semestre 2018, la cadence de production (au poste 40) passera à un appareil par mois contre 2,5 aujourd'hui. Une décision qui va impacter dès 2017 certains fournisseurs situés en amont dans la chaîne de production.

En 2018, il n'y aura donc que 12 A380 qui seront livrés, contre un peu plus de 25 aujourd'hui. Pour 2016, Airbus entend livrer peu ou prou le même nombre d'A380 que l'an dernier qui s'était soldé par 27 livraisons. Dans un communiqué, Airbus a confirmé l'information.

Aujourd'hui, sur les 319 avions commandés depuis le lancement du programme en 2000 -à cette époque, Airbus tablait sur 1.200 commandes pour les 20 prochaines années-, 126 restent à livrer, dont une soixantaine pour Emirates, le plus gros client. Soit l'équivalent de quatre ans et demi de production au rythme actuel. Un peu moins si l'on tient compte de la fragilité de certaines commandes (les 6 de Virgin Atlantic ou les deux derniers exemplaires d'Air France, pourtant annulés par la compagnie).

Un A380 remotorisé?

A défaut de nouvelles ventes, la baisse des cadences prévue par Airbus lui permet de gagner du temps pour trancher sur l'avenir de cet appareil. Autrement dit, elle lui donne du temps pour décider de lancer ou pas une version améliorée de l'appareil (avec notamment de nouveaux moteurs) ou, dans le pire des cas, d'arrêter le programme. Evoqué fin 2014 par certains dirigeants d'Airbus Group, un tel scénario inquiète Emirates, le plus gros client de l'A380 avec 142 appareils commandés.

"Ma principale préoccupation, c'est que la production s'arrête", expliquait le 30 juin à Bloomberg son directeur général, Tim Clark, lequel a récemment déclaré être prêt à acheter de nouveaux appareils classiques même si Airbus devait renoncer à lancer une version remotorisée.

La commande de l'Iran est incertaine?

Plébiscité par les passagers pour son confort et son silence, l'A380 se vend mal. L'an dernier, Airbus a enregistré une commande pour seulement trois exemplaires. L'année 2016 avait plutôt bien commencé pour l'A380 avec l'accord signé avec l'Iran en janvier portant sur l'achat de 118 Airbus dont 12 A380, mais le 30 juin, le ministre iranien des Routes et du Développement urbain, Abbas Akhoundi, a laissé planer le doute en disant que "l'Iran avait la liberté de choisir et qu'il n'y avait pas d'obligation ni d'engagement d'acheter des A380."

Concurrence du B777X

Les marges de manœuvre sont faibles. Les perspectives pour les quadriéacteurs restent sombres face aux gros biréacteurs comme le B777X ou l'A350-1000. Pour rappel, le B777X n'est autre que la version améliorée du B777-300 ER, qui, lancé commercialement en 2000 en même temps que l'A380, est l'avion qui a plombé les ventes du super jumbo d'Airbus.

Mis en service en 2004 à l'heure où le prix du baril a commencé à grimper, ce "triple 7" a rencontré un incroyable succès. Avec une configuration de base de 365 sièges, cet appareil a privé l'A380 de la quasi-totalité du marché du renouvellement du B747 que convoitait Airbus.

Les compagnies ont en effet préféré sacrifier un peu de capacité pour une meilleure performance économique en termes de coût au siège et de coût à l'étape. D'autant plus que le B777 avait une capacité fret supérieure à celle de l'A380; le fret jouant un rôle majeur dans l'économie de certaines lignes. Par ailleurs, à cause des retards pris dans le programme, l'entrée en service progressive de l'A380 (à partir de fin 2007) a coïncidé avec les débuts de la crise financière et économique, laquelle n'a pas poussé les compagnies à passer de nouvelles commandes.

Un B777-10X de 450 sièges?

Pis pour Airbus, alors que Boeing a lancé le B777-8X (365 sièges) et 9X (400 sièges) qui seront mis en service dans les années 2020, le groupe américain étudie une version encore plus grande de son biréacteur. Selon Bloomberg, Boeing est en effet en train de proposer à des compagnies aériennes, dont Emirates, une version de 450 sièges du B777, qui répond au nom de code de 777-10X. L'existence de ce projet ne peut que semer le doute des compagnies qui étudieraient l'achat de l'A380. S'il voyait le jour, il risquerait de lui porter un coup fatal. Pour riposter, Airbus est tenté de lancer une version allongée de l'A350-1000 (366 sièges, la mise en service est prévue en 2017) qui pourrait aller au-delà des 410 sièges.

Lire ici l'interview du PDG d'Airbus  Fabrice Brégier : "Les nouvelles technologies permettront de rapatrier des productions en Europe"