Emirates achète 36 Airbus A380 et donne 10 ans de vie au super-jumbo

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  778  mots
Alors que la direction d'Airbus avait évoqué un arrêt du programme de son très gros-porteur si les négociations avec Emirates sur une nouvelle commande échouaient, la compagnie du Golfe a signé ce jeudi un protocole d'accord portant sur une commande de 36 appareils supplémentaires, dont 10 en option. Combinée à une baisse des cadences de production, ce contrat garantit plus de 10 ans de production à Emirates. Un temps précieux qui permettra à Airbus d'envisager le lancement d'une remotorisation de l'appareil à partir du milieu de la prochaine décennie qui pourrait séduire de nouvelles compagnies.

Emirates sauve une nouvelle fois l'A380. Alors que la direction d'Airbus avait évoqué un arrêt du programme de son très gros-porteur si les négociations avec Emirates sur une nouvelle commande échouaient, la compagnie du Golfe a signé ce jeudi un protocole d'accord portant sur une commande de 36 appareils supplémentaires, dont 10 en option. Le choix du motoriste et la possibilité d'inclure dans la commande des A380Plus, une version présentée en juin dernier qui sans aller jusqu'à une remotorisation, permet d'améliorer les performances de l'avion.

Près de 180 appareils A380 pour Emirates

L'annonce de cette commande montre qu'Emirates ne pouvait se permettre un arrêt du programme. L'A380 est en effet au cœur de sa stratégie et la compagnie du Golfe. A tel point que la compagnie aurait probablement eu plus à perdre qu'Airbus d'un arrêt du programme. Avec 162 commandes d'A380 (178 avec les options), Emirates détient désormais près de 50% des commandes enregistrées depuis le lancement de l'avion en 2000.

Il s'agit donc d'une bonne nouvelle pour Airbus qui va pouvoir regonfler son carnet de commandes qui s'est réduit comme peau de chagrin en raison de l'absence de ventes depuis plusieurs années. Avec cette commande, il s'élève officiellement à 115 appareils, même si en réalité, à l'exception de la soixantaine d'avions d'Emirates, les autres commandes ont peu ou pas de chance d'être honorées, soit parce que le client a déjà indiqué qu'il ne les prendrait pas soit parce qu'il apparaît fragile financièrement. A tel point que certains affirment que le carnet de commandes réel se résume peu ou prou aux seuls avions d'Emirates.

Baisse des cadences de production

Pour autant, avec la baisse des cadences de production prévues au cours des prochaines années, Airbus s'assure environ 10 ans de production. Après avoir livré 15 A380 l'an dernier, l'avionneur européen prévoit d'en construire 12 en 2018, 8 en 2019 et devrait descendre à 6 à partir de 2020, un niveau qui lui permet encore, selon Fabrice Brégier, le Président d'Airbus Commercial Aircraft, de fabriquer l'avion de manière industrielle (ce dont beaucoup doutent). Ce niveau devrait être maintenu au cours des prochaines années. Il constitue un socle qui sécurise pendant 10 ans la production réservée à Emirates, dont la direction demandait une telle garantie sur le maintien du programme.

Il est évident que la compagnie de Dubaï voulait non seulement être sûre de prendre livraison des appareils commandés mais aussi que la valeur résiduelle des exemplaires qui pourraient commencer à sortir dès l'année prochaine ne soit réduite à néant par un arrêt précipité du programme. Selon des analystes en effet, Emirates amortit ses A380 sur 10 ans. Dès cette année, le premier appareil reçu (en 2008) pourrait potentiellement être cédé sur le marché de l'occasion. D'ici à 2020, il y en aura neuf de plus. D'ici à 2024, 40 appareils supplémentaires seront concernés.

"Je suis personnellement convaincu que d'autres commandes suivront l'exemple d'Emirates et que cet excellent avion continuera à être construit au cours de la décennie 2030, déclare le PDG de la compagnie, Cheikh Ahmed ben Saïd Al Maktoum, cité dans le communiqué.

(Un graphique de notre partenaire Statista)

Un A380 remotorisé est envisageable d'ici à 10 ans

Avec cette nouvelle commande d'Emirates, Airbus dispose désormais d'un carnet de commandes lui permettant de produire l'avion jusqu'au jour où de nouvelles technologies de moteurs émergeront (à partir de la moitié de la prochaine décennie) et permettront d'envisager une remotorisation de l'appareil, voire son allongement pour baisser les coûts au siège.

Une telle amélioration de la performance de l'A380 pourrait non seulement permettre à Airbus d'avoir une solution pour le renouvellement de la flotte d'A380 classiques d'Emirates ou d'autres clients actuels, mais aussi de séduire de nouvelles compagnies. A ce moment-là en effet, certains facteurs qui avaient justifié le lancement du programme en 2000 mais qui n'ont pas vu le jour, comme la sous-capacité aéroportuaire, auront une acuité plus prononcée, notamment en Chine. En revanche, d'autres éléments qui ont quant à eux contribué à l'échec commercial de l'appareil européen jusqu'à présent, seront également plus prononcés. Notamment la concurrence des gros biréacteurs de près de 400 sièges ou plus comme le B777 9X qui verra le jour à partir de 2020 ou l'A350-1000 (350 sièges) qui va entrer en service prochainement, voire des versions encore plus longues de ces deux appareils aujourd'hui à l'étude chez les deux constructeurs.

Lire ici l'analyse : le plan en deux temps pour l'A380 passe par le maintien des moteurs Rolls Royce chez Emirates