L'Etat français sera-t-il le sauveur ou le fossoyeur de Manurhin ?

Par Michel Cabirol  |   |  550  mots
L'Etat a-t-il abandonné Manurhin? (Crédits : Manurhin)
L'entreprise centenaire Manurhin est proche de la sortie de route. Bruno Le Maire promet de trouver des solutions mais....

Bruno Le Maire sera-t-il sauveur de Manurhin, une entreprise centenaire ? Le ministre de l'Economie a promis mardi de trouver "toutes les solutions" pour le fabricant de machines de munitions "Made in France", placé sous le régime de la sauvegarde depuis juin 2017. D'autant que le président du directoire de Manurhin, Rémy Thannberger. qui emploie 190 salariés, a rendez-vous mercredi tôt à la chambre commerciale du Tribunal de grande instance de Mulhouse pour une nouvelle audience cruciale pour son avenir, dont l'issue pourrait être le dépôt de bilan ou bien prolongation de la période d'observation.

"Je crois que tous nos efforts doivent être mis pour trouver un repreneur de qualité, un investisseur de qualité qui offre des perspectives à l'entreprise Manurhin", a assuré Bruno Le Maire, qui répondait à l'Assemblée nationale à une question du député MoDem, Bruno Fuchs.

Si Bruno Le Maire a une solution, c'est le moment de la dégainer pour Manurhin, une "entreprise qui fait partie du patrimoine industriel de notre pays", au moment où celle-ci a précisément rendez-vous au Tribunal de grande instance, a-t-il rappelé. Mais le ministre n'a pas précisé si la solution devait intervenir avant ou après le redressement judiciaire de l'entreprise. Ni s'il avait une solution française ou étrangère. Selon nos informations, le groupe allemand Rheinmetall serait dans les starting-blocks pour s'offrir à moindre coût l'entreprise mulhousienne à la barre du tribunal. Avec l'appui de l'Etat ? En revanche, de source proche du dossier, une solution avant dépôt de bilan pourrait venir d'un important client du Golfe de Manurhin, Oman. Ce poker menteur pourrait être in fine préjudiciable à l'entreprise mulhousienne.

Une aide de l'Etat, quelle aide ?

A l'Assemblée nationale, Bruno Le Maire a affirmé que l'Etat avait "apporté tous les soutiens financiers qu'il pouvait apporter". Selon le ministre, "nous avons apporté 12 millions d'euros de garanties à l'exportation. Nous avons débloqué 5 millions d'euros au titre de l'article 90 du Trésor pour aider au financement de l'entreprise, dont 2,8 millions ont déjà été débloqués". C'est vrai mais c'était bien avant les très graves problèmes que  Manurhin a rencontré depuis deux ans. Car le fabricant de machines de munitions n'a reçu aucun euro de l'Etat français depuis 2015 et aucune couverture de la Coface puis de Bpifrance depuis le désengagement des groupes publics du capital en 2016, selon une source proche du dossier. Ainsi, deux des plus importants contrats de Manurhin n'ont fait l'objet d'aucune garantie publique française : Oman (70 millions d'euros) et Pakistan (56 millions), qui est cours d'exécution.

"Il se trouve que tous ces soutiens financiers qui ont été apportés par l'Etat n'ont pas permis à l'entreprise de se redresser et de garnir à nouveau de manière satisfaisante le carnet comptable et le carnet de commandes de l'entreprise, a pourtant jugé le ministre. Ce qui est inexact. Car l'Etat semble avoir "abandonné" Manurhin à son sort depuis 2015. Par ailleurs, l'entreprise revendique un carnet de commandes stable de 100 millions d'euros. Et pourrait même décrocher un contrat d'un peu plus de 50 millions d'euros au Turkménistan. Si Manurhin n'avait pas des problèmes récurrents de trésorerie et de financement à l'export, le leader mondial de son secteur serait vraiment en forme. A qui la faute?