Le VBCI de Nexter est-il ensablé au Qatar ?

Par Michel Cabirol  |   |  590  mots
En décembre 2017, le ministère de la Défense qatari avait signé une lettre d'intention (LoI) avec Nexter en présence d'Emmanuel Macron.
Préoccupations sérieuses de Paris sur le prospect du VBCI (Nexter) au Qatar. Florence Parly y va lundi pour tenter d'y voir plus clair et pour déminer le terrain. En cause, l'allemand Rheinmetall, qui ne s'est jamais avoué vaincu.

Le dossier préoccupe en France. Et pas qu'un peu. Alors que le véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) fabriqué par Nexter et armé de missile MMP de MBDA semblait être sur une orbite balistique au Qatar avec un contrat potentiellement annoncé le 18 décembre jour de la fête nationale, des vents contraires venus de Doha ont récemment douché l'optimisme dans lequel baignaient les Français depuis le mois de septembre. Pourtant, dans d'autres dossiers franco-qataris, tout se passe bien, fait-on observer à La Tribune.

A la fin de l'été, tout semblait largement balisé ou presque surtout après la visite de l'émir du Qatar en France, Cheikh Tamim Bin Hamad Al Thani, qui avait déjeuné le 19 septembre avec Emmanuel Macron. Et plus rien ne devait faire dérailler le premier contrat du VBCI (blindé huit roues de 28 tonnes) à l'export sur un segment de marché très concurrentiel. Mais cela ne semble plus être le cas alors que l'équipe de France a respecté les demandes qu'avaient fixés les Qataris.

Florence Parly pour déminer

Selon certaines sources interrogées par La Tribune, le Qatar remettrait en cause la plateforme elle-même, le VBCI de Nexter, et regarderait le Boxer (Rheinmetall et Krauss-maffei Wegmann). Ni plus, ni moins. Un travail de sape aurait pu être effectué par des concurrents, notamment Rheinmetall, qui n'a jamais accepté le choix de Doha, estiment-elles. D'autres suggèrent une tactique de négociations de la part des Qataris, qui ont toujours été de très bons négociateurs. Ou bien est-ce enfin en raison de la mise en examen du président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, très proche de l'émir du Qatar ? En réalité, personne en France ne semble vraiment savoir ce qui se passe sur ce contrat  sur lequel compte fermement la France.

C'est pour cela que Florence Parly tentera d'y voir plus clair et élucider les demandes des Qataris lors de sa tournée dans le Golfe, où elle fera un stop lundi à Doha. La ministre des Armées essaiera de lever les ambiguïtés, si ambiguïtés il y a, lors de ses rencontres avec l'émir du Qatar, et le Dr Khalid bin Mohammed Al Attiyah, vice-Premier ministre et ministre d''État aux Affaires de la Défense. Un échec serait durement ressenti par Paris. En décembre 2017, le ministère de la Défense qatari avait signé une lettre d'intention (LoI) avec Nexter en présence d'Emmanuel Macron. Une commande qui avait été estimée à l'époque par l'Elysée à 1,5 milliard d'euros.

L'ombre de Rheinmetall

Rheinmetall connait bien le Qatar, et plus particulièrement l'armée de terre qatarie. Le groupe allemand a déjà vendu à Doha en mars 2013 62 chars Leopard 2A7 et 24 pièces d'artillerie PzH200 notamment. Pour le Boxer au Qatar, Rheinmetall a obtenu le soutien de l'Etat allemand, qui lui interdit en revanche d'exporter vers l'Arabie Saoudite. Résultat, le dispositif (lobbying, expertise...) de Rheinmetall a depuis en grande partie basculé d'Arabie Saoudite vers le Qatar. Notamment les experts de Rheinmetall International Holding (RIH), filiale basée à Zurich, ont été envoyés à Doha.

L'ancien patron de RIH, John Taylor travaille depuis janvier comme consultant chez Barzan après avoir passé trois ans à la tête de la filiale de Rheinmetall. Enfin, le lobbying de Rheinmetall pourrait également passer via BAE Systems avec qui le groupe allemand a récemment créé une société commune. Bref, Nexter sent le souffle chaud de Rheinmetall sur sa nuque..