Mais pourquoi la pépite stratégique française CLS file en Belgique

Par Michel Cabirol  |   |  511  mots
(Crédits : CLS)
La vente de CLS au fonds belge CNP par le CNES, Ardian et l'IFREMER, devrait logiquement faire l'objet d'une procédure IEF (Investissements étrangers en France). Car cette société technologique est stratégique pour l'armée française.

Il y a des choix qui seront toujours très étonnants pour la souveraineté de la France comme la privatisation de CLS, filiale du CNES. Le Centre national d'études spatiales (54% du capital de CLS), Ardian (32%) et l'IFREMER, l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (14%), ont annoncé jeudi avoir signé "un accord d'exclusivité avec la Compagnie Nationale à Portefeuille (CNP), société d'investissement du groupe Frère, en vue de lui céder une participation majoritaire dans le capital du Groupe CLS". Le CNES, qui va garder une participation minoritaire dans CLS (autour de 35%), a pourtant beaucoup investi dans CLS. Tout comme le ministère des Armées (environ 15 millions d'euros) dans la filiale détenue à 100% par CLS, Kinéis. Des investissements qui profiteront in fine à un fonds belge, qui n'a même pas semble-t-il signé la charte ESG (Environnement, Social, Gouvernance). De son côté, CLS a construit une vision afin de déployer des solutions innovantes pour comprendre et protéger la Planète, et gérer durablement ses ressources.

La vente de cette société technologique spécialisée dans la fourniture de solutions à très forte valeur ajoutée basées sur des données satellitaires, qui fait partie de la liste des sociétés stratégiques pour la France, va probablement faire l'objet d'une procédure dite IEF (Investissements étrangers en France), selon plusieurs sources interrogées. CLS est notamment suivie par la direction générale de l'armement (DGA), plus particulièrement pour son activité de gestion et management des flottes militaires (véhicules et navires pour les armées). Une telle procédure va donc reporter le closing de la transaction d'au moins deux mois une fois le dossier déposé à la direction générale des entreprises (DGE) et étudié par la DGA.

Une transaction estimée à 400 millions d'euros

Selon nos informations, le CNES, Ardian et l'IFREMER ont donc choisi l'offre la mieux-disante au second tour (400 millions d'euros), qui a devancé celle proposée par le véhicule d'investissement français Five Arrows de Rothschild (plus de 380 millions d'euros), mais qui avait une véritable vision stratégique pour CLS. En outre, le fonds britannique Charterhouse avait été semble-t-il éliminé à l'issue du grand oral organisé par le CNES en dépit d'une offre supérieure à Rothschild. Quant à la holding industrielle et financière belge Cobepa, elle n'a jamais été vraiment dans la course. Pour Ardian, l'IFREMER et le CNES, c'est donc une très belle bascule alors qu'ils en espéraient au début de l'année entre 300 et 350 millions.

Aux termes de l'opération, CNP et le CNES devraient nouer un partenariat en vue d'accompagner une nouvelle phase de croissance de CLS. La finalisation de cette opération est soumise à un certain nombre de conditions, notamment l'accord des conseils d'Administration du CNES et de l'IFREMER, l'avis des instances représentatives du personnel de CLS et l'obtention des autorisations réglementaires nécessaires. "Les parties visent la finalisation de l'opération avant fin janvier 2020", indique le communiqué. Pas sûr.