Rafale : hé oh la France !

Par Michel Cabirol  |   |  896  mots
Les opérationnels et les politiques devraient prendre une décision d'une nouvelle commande de Rafale à l'horizon de 2019-2020
Les trois contrats export du Rafale ne doivent pas faire oublier que l'armée de l'air française a besoin d'une nouvelle commande de Rafale.

Les succès des Rafale à l'export (Égypte, Qatar et Inde, soit 84 appareils vendus au total) ne doivent surtout pas faire oublier aux politiques de tous bords, le plus souvent déjà en campagne et prêts à certains raccourcis, que l'armée de l'air française a toujours autant besoin d'avions de combat supplémentaires. Sauf à "menacer gravement les capacités opérationnelles" de l'armée de l'air, estime la présidente de la commission de la défense de l'Assemblée nationale, Patricia Adam.

Ces nouveaux appareils remplaceront les Mirage 2000 vieillissants dans les années 2020 et certains Rafale vieillis prématurément par l'emploi intensif lors des opérations extérieures (OPEX) à la fin des années 2020. Le format de l'aviation de combat défini dans le livre blanc de la défense et de la sécurité nationale de 2013 s'élève à 225 appareils.

Respect de la commande de la tranche 4 du Rafale

Les aviateurs français comptent déjà sur le respect des livraisons de la totalité de la tranche 4 : 60 avions au total, dont 26 avaient été livrés au 30 juin 2016. Ce qui est sûr, c'est que six Rafale supplémentaires seront livrés avant la fin de cette Loi de programmation militaire 2014-2019 (LPM) à l'armée de l'air française. Soit deux Rafale biplaces en 2016, un en 2017 et, enfin, trois au début de 2018 pour la constitution à l'été de la même année du deuxième escadron nucléaire de Rafale. Fin 2018, 32 appareils de la tranche 4 auront été livrés.

"Nous tiendrons compte des besoins des forces nationales, en particulier de la montée en puissance des escadrons nucléaires et de ce que le groupe aéronaval puisse disposer de flottilles complètes", avait expliqué à l'Assemblée nationale en octobre 2015 le délégué général pour l'armement, Laurent Collet-Billon.

Lorsque le nouveau ministre de la Défense arrivera à l'Hôtel de Brienne en mai 2017, il pourrait se pencher sur la poursuite de la commande de la tranche 4 (soit 28 Rafale). A ce jour, les livraisons de la tranche 4 devraient reprendre en 2021 et se poursuivre en 2022 et 2023. L'armée de l'air compte sur ces appareils comme l'avait rappelé au Sénat en octobre 2015 le chef d'état-major de l'armée de l'air, le général André Lanata : "Nous avons construit notre feuille de route capacitaire sur cette hypothèse qui suppose toutefois une reprise impérative des livraisons de Rafale en 2021".

Et la tranche 5?

Pour l'heure, il n'y a pas de décision sur la commande de la tranche 5. Combien de Rafale à commander? Une ou plusieurs commandes? Quand? Quel échéancier pour les livraisons? Tout reste à affiner. "Il reste encore du temps pour décider", explique-t-on à La Tribune. Même si des indicateurs très factuels vont permettre aux opérationnels et aux politiques de prendre une décision à l'horizon de 2019-2020. Outre bien sûr, la contrainte financière, la prochaine commande française de Rafale devra tenir compte du format de 225 avions de combat à l'horizon de 2030 défini par le livre blanc de la défense de 2013.

A ce jour, 180 Rafale ont été déjà commandés par Paris, dont 146 livrés au 30 juin 2016. Sur ces 146 appareils, cinq ont été perdus par l'armée (quatre Rafale Marine et un exemplaire de l'armée de l'air). La prochaine commande devra également tenir compte d'une éventuelle nouvelle attrition (l'armée estime une perte d'un Rafale toutes les 10.000 heures de vol en principe). En outre, elle doit prendre en compte le retrait programmé des Mirage 2000 (notamment des Mirage 2000D) tout au long des années 2020 ainsi que celui des premiers Rafale mis en service au début des années 2000. Le retrait du dernier avion de combat sorti des bureaux d'études de Dassault Aviation est désormais programmé à la fin des années 2020 en raison d'un vieillissement prématuré généré par les nombreuses utilisations en OPEX. De nombreux indices de fatigue avancée sont apparus ces derniers mois. Enfin, dernier paramètre, l'arrivée à l'horizon 2030-2035 de drones armés (UCAV) dans l'armée de l'air conditionnera également le nombre de Rafale commandés.

Toutes ces données permettront donc d'ajuster au mieux la ou les commande(s). Les prévisions initiales prévoyaient les premières livraisons de la tranche 5 en 2022. Mais le contrat indien (36 appareils) pourrait les repousser à 2024, estime-t-on au ministère de la Défense. D'ailleurs, les premiers contrats d'exportation signés avec l'Égypte et le Qatar ont déjà modifié le calendrier de livraison des Rafale.

Vers le standard F4

Enfin, la tranche 5 correspondra-t-elle avec l'entrée en service du standard F4 (communication avec les drones armés, connectivité accrue, modernisation de l'armement et accroissement de la puissance du moteur de 7,5 à 9 tonnes de poussée) ? Le développement de cette version pourrait également coïncider avec l'achat de Rafale par un pays souhaitant un avion plus performant que le standard actuel, comme les Emirats Arabes Unis (EAU). A ce jour, le ministère de la Défense procède à des adaptations ponctuelles du standard F3R, comme le fait de doter le Rafale de capacités de communication par satellite.

"Nous allons commencer à réfléchir à ce que pourra être un standard F4, qui correspondra vraisemblablement à la cinquième tranche Rafale, acquise au-delà de 2020", a expliqué Laurent Collet-Billon à l'Assemblée nationale en octobre 2015.