Si, si Jean-Yves Le Drian va relancer une filière de munitions de petit calibre "Made in France"

Par Michel Cabirol  |   |  639  mots
La réimplantation d'une usine de fabrication de munitions de petit calibre pourrait nécessiter un investissement initial de 100 millions d'euros.
Le ministre de la Défense devrait annoncer en mars sa décision de relancer une filière de munitions de petit calibre "Made in France".

Selon plusieurs sources concordantes, le ministre de la Défense va relancer une filière de munitions de petit calibre "Made in France". C'est aujourd'hui décidé. En avril 2016, Jean-Yves Le Drian avait évoqué des questions de souveraineté pour relancer une filière de munitions de petit calibre (5,56 mm). Ainsi la fabrication en France de ce type de munitions, qui est aujourd'hui dans sa totalité importées, permettra de mieux garantir la sécurité des approvisionnements des forces armées. La création de cette filière permettrait de répondre d'ailleurs aux besoins accrus des ministères concernés - défense, intérieur, justice et finances - , au moment où la menace reste au très haut niveau.

"Nous savons fabriquer des Rafale mais nous n'avons pas de fabrication française de poudre militaire pour les petites munitions", avait expliqué en 2016 Jean-Yves Le Drian sur le site de la poudrerie de NobelSport à Pont-de-Buis-lès-Quimerch. "Nous allons travailler autour de cette situation anormale. C'est une question de souveraineté nationale. Nous devons agir rapidement, 2017 au plus tard, pour manifester cette nouvelle dimension de l'activité de l'entreprise Nobelsport", a-t-il précisé.

Si elle est confirmée, cette décision interviendrait quelques mois seulement après que le ministère de la Défense ait notifié le contrat de remplacement du fusil d'assaut FAMAS au fabricant allemand Heckler & Koch, qui va fournir 102.000 fusils d'assaut HK416F aux armées françaises. Les forces seront équipées selon leurs besoins des HK416 en version HK416F-C (canon de 11'') et HK416F-S (canon de 14,5''). Le ministère prévoit dans le cadre de son budget de 2017 une livraison de 5.340 fusils d'assaut de nouvelle génération dès cette année.

Trois groupes concernés

Cette volonté ministérielle va s'appuyer sur l'expertise de trois groupes : NobelSport, qui revendique être le premier fabricant européen de poudres de chasse et de tir, Thales ainsi que le fabricant de machines de cartoucherie Manurhin. La future usine sera implantée... en Bretagne chez NobelSport, qui a déjà un site à Pont-de-Buis-lès-Quimerch (Finistère).

Selon le député PS Nicolas Bays, auteur d'un rapport sur la filière munition avec Nicolas Dhuicq (Les Républicains), Thales TDA Armements a "fait part d'une éventuelle volonté de recréer une filière de munitions de petit calibre par rapatriement d'une ligne de production australienne". Thales a également développé le fusil d'assaut F90 sélectionné en 2015 par l'armée australienne.

Qui finance?

En revanche, ce qui n'est pas décidé, c'est le financement d'environ 100 millions d'euros que nécessiterait une telle opération (achat du terrain et des machines, construction de l'usine...). Deux options sont en cours d'examen actuellement. L'une verrait les industriels financer l'intégralité de l'opération, l'autre verrait l'État mettre la main à la poche pour financer entre autres les machines de cartoucherie de Manurhin. Mais le ministère de la Défense voudrait éviter de se mettre sous les fourches caudines de Bruxelles. Une réunion de calage serait imminente. En revanche, le ministère est prêt à donner une visibilité aux industriels sur le long terme en passant des commandes régulières.

"La réimplantation d'une usine de fabrication (de munitions de petit calibre, ndlr) pourrait nécessiter un investissement initial de 100 millions d'euros, comprenant l'achat du terrain, l'embauche du personnel et l'installation de la chaîne de production", avaient estimé les députés Nicolas Bays et Nicolas Dhuicq.

Les deux députés estimaient que trois à quatre ans seraient nécessaires pour bâtir entièrement une usine et produire les premières munitions. "La rentabilité serait assurée à partir d'une production annuelle de 60 millions de cartouches sous réserve qu'un niveau de commandes constant soit assuré durant les cinq premières années", avaient-ils écrit.