PSA Peugeot Citroën : ça va mieux, mais il y a encore du boulot

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  1206  mots
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La perte nette du constructeur a été divisée par deux au premier semestre. Mais les activités automobiles demeurent lourdement déficitaires. PSA refuse de confirmer l'objectif du retour à l'équilibre fin 2014. Heureusement, les derniers modèles semblent recueillir les suffrages de la clientèle.

Mission: rassurer. Lors de la présentation des résultats financiers de PSA Peugeot Citroën dont il est le président, Philippe Varin a martelé ce mercredi, sourire aux lèvres: "nous voyons les premiers signes du redressement". PSA a effectivement divisé par deux sa perte nette au premier semestre à 426 millions d'euros. Avec un petit déficit opérationnel de 65 millions au niveau du groupe (du même ordre grosso modo que l'an dernier). Le constructeur auto tricolore met également en avant l'accord donné par la Commission européenne, le 30 juillet dernier, à la garantie de l'Etat français accordée à la Banque PSA Finance, laquelle "clarifie la situation jusqu'en  2016".

Pas d'urgence financière

Jean-Baptiste de Chatillon, directeur financier de PSA, a pour sa part souligné la sécurité financière (trésorerie et lignes de crédit) du groupe, renforcée à 11,8 milliards d'euros. Philippe Varin a également confirmé une "réduction au moins par deux"  de la consommation de cash cette année par rapport à 2012 et la perspective d'une "réduction très significative en 2014". "Le groupe n'est pas dans une situation d'urgence financière", a affirmé  le président du directoire. Ca, c'est pour les bonnes nouvelles.

Les usines en sous-charge

Pourtant, le constructeur français, allié de GM qui détient 7% de son capital, est loin d'être tiré d'affaire. Sa division automobile, qui se trouve au coeur de ses activités, demeure encore lourdement déficitaire, avec une perte opérationnelle de 510 millions d'euros sur le semestre, certes réduite par rapport à 2012 (657 millions sur la période), mais représentant encore 2,7% du chiffre d'affaires.

Les ventes mondiales du consortium ont reculé de 1,1% à 1,46 millions de véhicules (hors Iran), à cause d'un plongeon en Europe dû à la crise mais pas seulement. PSA réalise 59% de ses ventes en Europe, accusant une dépendance trop forte vis-à-vis du Vieux continent, mais il espère réduire cette part à 50% d'ici à 2015. Le chiffre d'affaires de la division automobile a fléchi de son côté de 7,5% à 18,7 milliards. Les usines tournent en Europe à 74% à peine de leurs capacités, et même à 61% seulement sur la seule France. C'est peu.

Le taux d'endettement grimpe

Au niveau du groupe dans son ensemble, il y a aussi des mauvaises nouvelles. Le taux d'endettement a grimpé à 3,32 milliards, passant de 31% des capitaux propres à fin décembre dernier à 35% au 30 juin. Lesdits capitaux propres ont continué à dégringoler, passant de 10,17 milliards à 9,56 milliards en six mois. Le groupe devrait encore consommer 1,5 milliards de cash (au plus) sur l'année. Même si c'était prévu, c'est beaucoup.

Et Philippe Varin ne confirme plus l'objectif d'un retour à l'équilibre fin 2014, fixé précédemment. Il ne s'est d'ailleurs pas engagé non plus sur un flux de trésorerie équilibré en 2015... Le dirigeant a en outre refusé de s'exprimer sur une éventuelle augmentation de capital, en discussion au sein de la famille Peugeot selon nos informations, et qui pourrait diluer la part de l'actionnaire familial historique.

Succès des derniers modèles

Dans ce qui constitue la passe la plus difficile de son histoire depuis le début des années 80, PSA dispose quand même de sérieux atouts. Il peut ainsi s'enorgueillir des derniers lancements de véhicules réussis. 180.000 Peugeot 208 ont été vendues au premier semestre. Et le modèle vient de démarrer en Amérique du sud. A peine commercialisé, son dérivé "Crossover" 2008 a déjà recueilli 36.000 commandes, "soit 30% au-dessus de l'objetif que nous nous étions fixés", rappelle le groupe.

>> Lire aussi : Le succès du Peugeot 2008 met du baume au coeur d'un PSA en crise

Quant aux véhicules d'entrée de gamme pour pays émergents fabriqués en Espagne, à Vigo, les Peugeot 301 et  Citroën C-Elysée, ils ont déjà été vendus  à  71.000 exemplaires au total, dépassant les objectifs de 40% et 30% respectivement, selon le dirigeant de PSA. Quant aux tout nouveaux monospace Citroën C4 Picasso II et berline compacte Peugeot 308, sur la plate-forme flexible "EMP2", ils arrivent, avec notamment un bond en avant de la qualité perçue.

Accélération en Chine

PSA accélère aussi en Chine où il décolle enfin après des années de marasme. Grâce notamment à des produits bien accueillis comme le Peugeot 3008, présenté en Chine comme un "Crossover" grâce à un style plus baroudeur que sur la version européenne, et à la berline C4L à quatre portes, un modèle compact rallongé au goût local. Les ventes de PSA y ont progressé de 33%, soit deux fois plus vite que le marché. 

Un troisième site, Wuhan III, a été ouvert le 2 juillet dernier, portant les capacités à 750.000 unités pour DPCA, la co-entreprise chinoise de PSA, qui a généré un dividende de 100 millions d'euros sur le semestre. PSA s'apprête par ailleurs à démarrer, à la rentrée, une quatrième usine, à Shenzhen, pour produire la ligne DS à travers une seconde entreprise conjointe, CAPSA. Ces succès n'empêchent pas, malheureusement, PSA d'avoir encore une part de marché faible en Chine (3,8%). Quant aux bénéfices générés par les activités locales, ils demeurent anecdotiques par rapport à ceux que rapportent les mêmes activités de Volkswagen au consortium allemand!

Boom en Argentine, pas au Brésil

En Amérique du sud, PSA est en plein boom en Argentine... mais reste à la traîne au Brésil. Sur l'ensemble du continent, il  affiche une pénétration un peu supérieure à 5%, très inférieure là aussi par rapport aux principaux concurrents. "A cause d'un effet de change défavorable, nous afficherons des pertes au Brésil", reconnait-on chez PSA. La percée dans le Maghreb et en Turquie n'empêche pas de mauvaises performances en Russie, malgré l'implantation récente d'une usine à Kalouga.  En dépit de ces difficultés, l'intercontinentalisation de PSA est en marche, incontestablement.

Restructuration en bonne voie

Les plans de restructuration sont, eux, "en bonne voie", avec la suppression prévue de 8.000 emplois en France via la fermeture du site d'Aulnay (3.000 postes) et la réduction de la voilure à Rennes (1.400).  Après les levées de boucliers il y a un an lors de l'annonce de ce plan social - qui avait valu à la famille Peugeot des rodomontades de la part d'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif -, celui-ci est bien avancé dans son exécution. 2.000 propositions d'emploi ont été faites à Aulnay et 600 à Rennes, le groupe  ayant promis "zéro licenciement sans solution derrière". 

5.000 solutions de reconversion

En tout, PSA affirme que 5.000 solutions de reconversion ont été proposées aux 8.000 personnes frappées en France par ledit plan social. La direction de PSA Peugeot Citroën a indiqué par ailleurs ce mercredi qu'elle allait proposer "un gel des salaires et une adaptation de la durée de travail hebdomadaire" dans le nouveau contrat de compétitivité actuellement en négociation, afin de soutenir "le redressement du groupe".  Bref, ce n'est pas gagné. Mais le marché financier a plutôt préféré voir les bonnes nouvelles. Sitôt les résultats connus, le  titre du constructeur automobile a bondi de plus de 7% dans les premiers échanges à la Bourse de Paris ce mercredi.